Que faire quand on habite aux fins fonds de la campagne, dans un petit village rural, éloigné de tout ? Faire des gîtes, des chambres d’hôtes mais il y en a pléthore ! Alors Maggy Germinal, une sexagénaire alerte a une idée originale : créer une maison d’artistes. Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’idée n’enchante pas Germain son mari qui préférerait que l’on ne l’ennuie pas, tant cultiver son potager et son jardin est devenu le seul loisir qu’il conçoit depuis la mort de leur fille unique il y a plus d’une quinzaine d’années. De fait le couple est ravagé par cette mort et chacun essaie de surmonter sa douleur avec sa personnalité : elle par des flots de paroles, en s’entourant du plus de monde possible, lui en se renfermant sur lui même quitte à passer pour un ours mal léché.
Rien ne peut arrêter Maggy, sûrement pas Germain. Aussi cet été là, quatre artistes viennent séjourner dans leur résidence : un couple d’écrivains Julia et Richard Duval, un metteur en scène, Basile Renoir qui veut se mettre au vert après le scandale qu’il a causé lors de la dernière cérémonie des Molières, et un ventriloque enfin Frank Colonus. Tous les matins est prévue une séance de méditation menée par Proserpine accompagnée de Balthazar, son jar, réincarnation, suivant sa propriétaire, de Demis Roussos.
De fait, tous les quatre ont chacun des secrets, des blessures qu’ils s’évertuent à cacher pour ne pas affronter la réalité. Basile est un alcoolique ravagé par la rupture de son compagnon qui ne supportait plus ses frasques et surtout son égoïsme, Julia se sait dominée par son mari qui l’empêche de fait à s’exprimer alors qu’elle est pleine d’idées, d’histoires qui ne demandent qu’à prendre vie. Elle a conscience que son couple arrive à sa fin, l’inconnu lui fait peur, et l’amour profond, sincère qu’elle a eu pour le grand écrivain n’existe plus. Richard, lui, a un secret, terrible qu’il n’a jamais osé dire à sa femme. Quant à Frank, c’est un nouveau venu dans le monde du spectacle. Il a décidé d’être ventriloque après un accident dans lequel il a failli perdre la vie. Dés sa première démonstration, il a montré qu’il n’avait strictement aucun talent comme ventriloque. Mais c’est un homme bon, une sorte de Candide qui ne supporte pas la violence ou les conflits. Dés qu’il y en a un, il a une méthode pour faire baisser la tension : il chante Le lac du Connemara !
Tout aurait pu se passer bien, normalement, si ce n’était la présence de Martial. Celui ci en effet est un voisin qui voit d’un très mauvais œil ces artistes ce qui ne fait que développer chez lui ses penchants de délateur. Qui plus est il y a aussi Gaston Palabre, le maire, sorte de résumé du maire de Champignac de Spirou et tyran local. Or voilà, il se fait assassiner une nuit dans une ruelle bordant la maison des Germinal. Tous deviennent suspects, les voiles, les masques commencent à tomber par la force des choses. Julia s’avère être une piètre enquêteuse, la réalité ne correspond en rien avec toutes les théories qui foisonnent dans son cerveau toujours en ébullition. Mais c’est pour chacun d’entre eux l’occasion d’avancer, de devenir lucide, de reconnaître et de surmonter ce qu’ils fuyaient, d’assumer leurs passés pour affronter un nouvel avenir, enfin pour emprunter un chemin autre que celui dans lequel ils croyaient avancer alors qu’ils ne faisaient que reproduire encore et encore toujours les mêmes choses, les mêmes attitudes !
Le réel, avec cet assassinat, les a rattrapés, chacun va devoir le vivre et ne plus le fuir à la fin de leur séjour aux Bergeronnettes.
Avec Bienvenue aux Bergeronnettes, le lecteur va passer un agréable moment plein d’humour, d’humanité avec des personnages attachants qui chacun mériterait d’être le personnage principal de nouveaux romans. Mais n’est-ce pas la force même de la lecture que de permettre à chacun d’imaginer le devenir de chacun de ces personnages dans leurs nouvelles vies ?
Bienvenue aux Bergeronnettes
Coralie Caujolle
éditions Eyrolles. 18€90
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