Après « Paris Romantique (1815-1858) » et « Paris 1900, la Ville spectacle », le Petit Palais consacre le dernier volet de sa trilogie au « Paris de la modernité (1905-1925) ». Hâtez-vous ! Vous n’avez que jusqu’au 14 avril au Petit Palais pour en prendre plein les yeux.
Ça partait mal. J’en ai marre, 2024, plus de censure. « Paris de la modernité » titre casse couilles. Quelle connerie. Le Japon, entre tradition et modernité… le pays Basque, entre mer et montagne. Ah noooon. T’as gueule toi aussi ! Pardon, je me calme. Et puis… et puis…
Comme il était dans le ciel, il était tout simple qu’il oubliât la terre
Trois ingrédients du bonheur du dimanche matin. Hélène, un scooter, un café et le Petit Palais. Ça fait 4 tiers ?! Oui et alors ? Dans ces moment-là, il est tout simple d’oublier les mathématiques.
C’est comme Marius, l’autre, celui de Cosette : « il ne savait même pas le soir ce qu’il avait fait le matin, ni où il avait déjeuné, ni qui lui avait parlé ; il avait des chants dans l’oreille qui le rendaient sourd à toute autre pensée : il n’existait qu’aux heures où il voyait Cosette. Comme il était dans le ciel, il était tout simple qu’il oubliât la terre. Tous deux portaient avec langueur le poids indéfinissable des voluptés immatérielles. Ainsi vivent ces somnambules qu’on appelle les amoureux. » Merci Messieurs … Victor et Antoine !
Et bien c’est ce que nous propose cette exposition. Aller dans le ciel et oublier la terre. Le ciel, le vrai avec Santos-Dumont et un aéroplane Deperdussin type B, 1., le juste ciel avec Paris en fête, Paris en liesse, une Ville Monde où tout est bon, tout est beau. Un foyer, une agora au cœur de l’innovation groovant comme les guiboles caoutchoutesques de Josephine Baker.
En y repensant quelques jours après, je reconnecte avec la tension ressentie, l’énergie dégagée.
La Danse du Pan-Pan au Monico
Symbolique pour moi de ce parcours d’adrénaline qui vaut toutes les cures de beroca, d’acérola ou de guanaca, à non ça c’est une vigogne… mais qui ne manque pas de vigueur.
Bref arrêtez-vous quelques minutes devant La Danse du Pan-Pan au Monico, de Severini. Au centre de la toile, s’agitent deux danseuses vêtues de rouge. Autour d’elles, se presse une foule compacte et déchaînée, composée de formes colorées et diffractées. On louche comme avec un kaléidoscope. Le peintre parvient ainsi à rendre le mouvement d’une liesse populaire et de la fièvre qui pouvait s’emparer des cafés parisiens. Pour ceux qui connaissent Montparnasse, La Coupole ou d’autres lieux du genre. On y est. On sent le homard, les huitres, le champagne et le Grand Marnier. Je vous jure ! Une guitare, une trompette en sourdine… De la vie en carafe et en couleurs. Difficile de se deshapper de cet happy tableau qui happeur de rien. La pilule rose du bonheur n’a qu’à bien se tenir. Drogue dure que cette Danse du Pan-Pan au Monico.
« Le soleil de l’art ne brillait qu’à Paris » écrivait Chagall
De la Belle Époque jusqu’aux années folles, Paris attire plus que jamais les artistes du monde entier : de Pablo Picasso, à Lewandowski, en passant par Robert et Sonia Delaunay, Marcel Duchamp, Marie Laurencin, Fernand Léger, Tamara de Lempicka, Amedeo Modigliani, Chana Orloff, Marie Vassilieff, Paul Poiret, Jeanne Lanvin, Cartier, Catet-Stevens, une BB Peugeot, les ballets russes, suédois, et le bal Nègre on a le tournis.
Paris est une fête !
Exposition en 11 sections et 400 œuvres sur tous les viviers de la création de ces 20 /25 ans d’une incroyable vitalité et cela entrecoupés d’années terribles (pendant lesquels d’ailleurs l’énergie vitale demeuraient). Même si les planqués étaient vilipendés sur le front.
Au début du XXe siècle, les ateliers d’artistes se concentrent d’abord à Montmartre avec ses cafés et ses réseaux d’entraide. Le Bateau-Lavoir avec la « bande à Picasso ». Laboratoire de la modernité avec en contre bas le Lapin-Agile, où les artistes se mêlent aux poètes et écrivains, ainsi qu’à la canaille crapuleuse. Et puis petit à petit on quitte Montmartre pour Montparnasse. Rive Gauche à Paris… Adieu mon pays chante Souchon.
On avance et on passe par les salons Parisiens, lieux de vente et de présentation au public et aux amateurs, puis un tour par le Salon international de l’automobile, du cycle et des sports. En 1908, une petite partie du salon est réservée aux aéroplanes et aux ballons. Les visiteurs peuvent y admirer l’Avion de Clément Ader, l’Antoinette de Levavasseur ou la Demoiselle de Santos-Dumont. Le succès est tel que la première Exposition internationale de la locomotion aérienne est inaugurée en 1909 par le président de la République Armand Fallières.
On entre chez « Poiret le Magnifique » qui a « libéré » la femme du corset en 1906 comme dirait une réclame. Il a surtout insufflé de la souplesse à ses modèles. Il s’inspire des fauves et des orientalistes, invente le parfum de grande maison. Regardez les flacons. Magnifiques. Et que dire du papier peint Radis ? Champs Elkysées, fêtes mémorables et déguisements spectaculaires.
En parlant spectacle on passe par le Théâtre des Champs-Élysées à la pointe de la modernité. Il abandonne la Pierre Perret (Ouaf ! Ndlr)pour le béton avec une esthétique épure qui annonce l’art déco. Bourdelle fait la façade, à l’intérieur on fait travailler Maurice Denis, Édouard Vuillard ou encore Jacqueline Marval. Et sur la scène les Ballets russes, de Diaghilev et Nijinski. Le 29 mai 1913, sur la musique d’Igor Stravinsky, la troupe choque le public et la critique la légende est née : le Sacre du printemps.
Le 3 août 1914, autre ambiance. 80 millions d’hommes mobilisés. On s’arrête sur deux toiles. Le saisissant Effet d’obus dans la nuit de Georges Bertin Scott, Effet d’un obus et les Soldats Sénégalais au camp de Maily de Félix Valotton. Visiblement le musée n’autorise pas sa reproduction. Allez voir l’expo rien que pour l’oeil décalé de Valotton.
Période terrible mais qui connaît, paradoxalement, une effervescence culturelle et des innovations artistiques majeures.
Années folles à Montparnasse Soutine et Foujita puis Kiki de Montparnasse, Man Ray.
Alcool débauche encore, robes de cocktail. Paillettes et plumes se prêtent aux nouvelles danses échevelées. Le jazz, le charleston, l’automobile, le train, les paquebots… tout va plus vite, même Lempicka sur des skis.
Le Théâtre des Champs-Élysées accueille La Revue nègre en octobre 1925. Arrivée des États-Unis, la jeune Joséphine Baker fait sensation avec ses danses trépidantes.
On termine sur l’Exposition internationale des arts décoratifs et industriels modernes. 15 millions de visiteurs et un immense succès populaire. De la place de la Concorde au pont de l’Alma et du rond-point des Champs-Élysées à l’esplanade des Invalides, en passant par le pont Alexandre-III. Grandiose mais sans doute le chant du cygne du luxe avec l’apparition de « l’art déco ». Heureusement c’est le Ponpon derrière l’ours de ce dernier, venu de « Boulbi », le Christ rédempteur de Rio nous fait oublier que bientôt tout cela sera fini.
Et qu’on retourne sur terre enivré de vertus, de beauté et de liesse et peut être sortir indemnes de cet hiver. Mais oui gardons le moral, écoutez, au loin de la clarinette…. Elle s’approche, les chevilles s’activent. C’est « Midnight in Paris ». Attendez moi !
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