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Pierre Judet de La Combe avec les Dieux de l’Olympe

par Pierre de Restigné

Enfin un livre qui reprend les textes que Pierre Judet de La Combe lit dans son émission diffusée par France Inter Quand les Dieux rodaient sur la terre. Une émission écoutée, podcastée, et surtout appréciée par tous les auditeurs. Si vous ne la connaissez pas, alors allez vite la charger sur un site dédié à la réécoute, vous jouirez alors d’un moment de pur plaisir ! Or chacune de ses interventions sont si riches et nous amènent à tant de réflexions, qu’il est impossible de tout retenir. D’où l’utilité du livre, utilité jamais démentie depuis l’invention de l’écriture. On peut s’arrêter, réfléchir, recommencer. On peut lire un chapitre, et puis passer à autre chose et revenir, enfin autant d’attitudes que nous ne pouvons que plus difficilement avoir quand seule l’ouïe est sollicitée. 

Donc, voilà Quand les Dieux rodaient sur la terre  réuni dans un volume (il y en aura d’autres nous promet l’auteur) publié par France Inter en collaboration avec les éditions Les Belles lettres et Albin Michel, excusez du peu !

Une plongée dans la mythologie grecque à travers XXXIII chapitres qui vont de Prométhée, le voleur de feu à Antigone, l’emmurée en passant par Héra la première Wonder Women Médée, l’exilée qui reprend, ou encore Clytemnestre, celle qui veut. A chaque chapitre, une périphrase qui résume parfaitement son contenu. Un seul ne porte pas sur un Dieu en particulier à savoir : Deux villes fabuleuses et maudites : Troie et Thèbes.

Pierre Judet de La Combe1 dissèque, étudie les mythes, montre que parfois même leur signification peut évoluer (Prométhée bénéfique pour avoir donné le feu aux hommes, ou bien écocide vu ce que les hommes font à la nature grâce à leur savoir ? Leur vie aussi : Aphrodite est-elle née de Zeus et d’une naïade ou alors de la castration de Cronos ? Combien d’enfants Atrée a-t-il fait manger à son frère : 3 ou 12 ? Le supplice de Tantale est-il de ne pouvoir boire ni manger ou plutôt d’avoir un rocher placé juste au-dessus de sa tête et qui peut l’écraser à tout moment ?

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De fait peu importe, ce sont des poètes, Homère, Hésiode, Pindare, par exemple ou des auteurs de théâtre, Eschyle, Sophocle et d’autres aussi qui ont écrit ces récits auxquels parfois ils ne croient pas et n’hésitent pas à le dire. Non ce qui importe, tant pour les auteurs que pour les Grecs, c’est plus le message, les réflexions que ces mythes posent. Car les Dieux sont loin (très loin) d’être parfaits. Ils ont souvent même des caractères très affirmés, ne sont pas totalement libres de leurs attitudes (même Zeus !). Ils sont parfois maladroits, souvent rancuniers, calculateurs, bref ! En quelque sorte les Dieux sont aussi insupportables que les hommes le sont mais eux sont immortels, ils le savent et font sentir parfois durement aux hommes leurs conditions de mortels.

© Bibliothèque nationale de France / CNRS – Maison Archéologie & Ethnologie René Ginouvès Hermès à la poursuite de Ganymède.
Date 470 – 460 av J.-C. Lieu Athènes. Amphore attique attribuée au peintre d’Oionoclès
Céramique à figures rouges. H. 29, 2 cm ; D. 16 cm ; L. 17, 4 cm.

Au début les Dieux frayaient avec les mortels mais l’attitude de certains d’entre eux qui se croyaient un peu trop leur égal comme Tantale ont fini par distendre les liens et ils sont restés sur l’Olympe non sans intervenir de temps en temps dans la destinée des hommes. De fait les mythes ont été créés pour ouvrir une sorte de lien de communication entre les humains et ces êtres surpuissants qui ont fait le monde tel qu’il est devenu. Ils avaient des noms, des lieux de naissances des histoires ce qui les rendaient proches. Puis sont arrivés les philosophes qui ont conceptualisé ces histoires, qui ont mis des mots, des tentatives d’explications à l’incompréhensible. On peut créer un lien entre l’homme et Océan et Poséidon, mais aucun entre lui et l’eau, même si elle est « le principe de toute chose ». On peut implorer Zeus pour qu’il calme son courroux, pas l’électricité pour que cesse la foudre ! Ce dialogue était possible grâce aux sacrifices, aux rites, aux initiations parfois, qui nous portaient dans un univers où les évènements avaient un sens, où rien n’était incertain, comme c’est le cas pour la vie humaine. On était loin des problèmes théologiques autour du libre arbitre !

Mais de fait ces mythes se sont progressivement construits sur toute la surface du globe et pas seulement qu’en Grèce. Ils ont exercé leur influences les uns envers les autres, certains sont devenus de vraies religions, mais tous répondent à une série de questions, toujours les mêmes : d’où venons-nous ? Que doit-on faire sur la terre ? Pourquoi la mort etc. Les mythes grecs ont des réponses originales et constituent une des bases de notre culture occidentale.

L’Illiade et L’Odyssée sont toujours des œuvres lues sur toute la surface de la terre, Achille, Hélène, Ulysse font encore et toujours partie des rêves de plus d’un. Jason est un prénom porté dans tout l’Occident, et que dire des Ariane et autres Pénélope.

Pierre Judet de La Combe1 dépasse la lettre de chaque mythe, le replace dans son contexte, expose les questions (et certaines réponses) qu’il pose. Nous sommes vraiment dans la pure interrogation de la base même de la nature humaine.

Et puis, quel plaisir que le petit essai que Pierre Judet de la Combe nous livre sur la tragédie à partir d’Iphigénie de Sophocle. C’est brillant, tout simplement brillant, comme tout ce magnifique livre.

Quand les Dieux rodaient sur la terre
Pierre Judet de La Combe

édition Les Belles Lettres- France-Inter, Albin-Michel. 25€

1/ Pierre Judet de La Combe (1949 -) est helléniste, agrégé de grammaire, et directeur de recherches à l’EHESS. Spécialiste des auteurs de théâtre grecs, il a soutenu en 1981 sa thèse à l’université Lille III (La réflexion lyrique dans l’Agamemnon d’Eschyle) sous la direction de Jean Bollack, qui a donné lieu à une publication en deux volumes aux Presses Universitaires de Lille (1981 et 1982). Auteur de Les tragédies grecques sont-elles tragiques ? Théâtre et théorie (Bayard Éditions, 2010), il a déjà traduit Médée d’Euripide (2012) et Les Grenouilles d’Aristophane (2012) pour la collection des Classiques en poche aux Belles Lettres. 

lllustration de l’entête: © Bibliothèque nationale de France / CNRS – Maison Archéologie & Ethnologie René Ginouvès
Céramique à figures rouges. 460-450 av. J.-C. Trouvé à Nola avant 1840. Auteur: Hydrie (kalpis) attique attribuée au peintre des Niobides
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