Accueil Livres, Arts, ScènesHistoire Cannibalisme et violences atroces à l’Âge de Bronze

Cannibalisme et violences atroces à l’Âge de Bronze

par Pierre-Alain Lévy

Mais qui donc pourrait encore encore croire à cet âge d’or, à ces temps très lointains de la préhistoire, à ces proto-paganismes, bien avant la «civilisation » et que d’aucuns dans leurs délires messianiques voudraient nous faire accroire ! C’est confondre les Pierreafeu de Joseph Barbera et William Hanna avec les compte-rendus de l’académie des Sciences ou les publications du CNRS.

Pourtant à cadence régulière l’on peut lire dans certaines tribunes des critiques de la civilisation judéo-chrétienne mettant en valeur le paganisme romain ou idolâtre et chamanique, et sapant ainsi subrepticement l’air de rien, la démocratie même où nous vivons. Comment donc oublier la violence de Rome, son impérialisme sanglant, ses jeux du cirque et ses conquêtes brutales, or l’esprit humain comme un code digital fonctionne en binôme et a du mal à ne pas réfléchir au-delà de 2, cela se vérifie chaque jour.

Quant à la préhistoire proprement dite elle est largement méconnue. Pourtant aujourd’hui de nombreux chercheurs utilisant les données nouvelles de la technologie et notamment du radio-carbone et de l’imagerie numérisée, travaillent à décrypter la vie de nos lointains ancêtres, tel est en substance le sujet dont nous allons traiter.

Ainsi venons -nous de découvrir sur un site de l’université de Cambridge, les résultats d’une étude conduite sur les restes osseux de 40 squelettes de l’âge de bronze et dont il apparait que la mort est survenue dans des conditions on ne peut plus brutale, et qui furent exhumés dans le comté du Somerset dans le sud-ouest de l’Angleterre. L’on y parle de cannibalisme, d’éviscération, d’arrachement de la langue, nous nous arrêterons là. Il ne saurait être question bien entendu de confondre morale et science, l’on sait que trop hélas où cela nous a conduit au XXè siècle et nous restons mordicus dans une approche scientifique, la seule au demeurant qui convienne.

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Dans les années 1970-80, des archéologues anglais ont trouvé plus de 3 000 fragments d’os dans un puits de calcaire naturel de 20 mètres de profondeur sur le site de Charterhouse Warren, dans le comté de Somerset, Les analyses conclusives viennent d’être publiées. Au moins 37 personnes, dont l’âge allait du nouveau-né à l’adulte, ont été retrouvées dans le puits, et les datations au radiocarbone suggèrent que ces personnes sont mortes il y a au moins quatre millénaires, au cours de l’âge du bronze ancien (2200 à 2000 av. J.-C.).

Marques de coupure visibles sur la mandibule d’un enfant de 10 ans.
. Photos Schulting et al. 2024

C’est ainsi que les chercheurs ont découvert qu’environ 20 % des os portaient des marques de coupure, la plupart d’entre elles ayant été faites à l’aide d’outils en pierre. L’emplacement de ces marques révèle les types d’actes violents auxquels les cadavres ont été soumis : Les marques de coupure sur l’os frontal d’un crâne suggèrent un scalpage, les longues marques de coupure sur la mâchoire inférieure d’une autre personne suggèrent une ablation de la langue, et les coupures sur les côtes pourraient être dues à une éviscération. Au moins six personnes présentaient des marques de coupure sur leur deuxième vertèbre cervicale, ce qui signifie qu’elles ont été décapitées, et un certain nombre de petits os de la main et du pied présentaient des fractures par écrasement correspondant à la mastication par l’homme.

En conclusion de ces recherches et en examinant de près les os fragmentés, les archéologues ont réussi à déterminer qu’au moins 30 % des crânes avaient été fracturés au moment du décès, ce qui implique que de nombreuses personnes – ou peut-être toutes – ont subi une mort violente.

Crânes découverts sur site. Photos Schulting et al. 2024

Ce qui s’est passé après la mort est encore plus horrible. Ainsi apparait il que de nombreux individus ont été scalpés, que leur peau ait été arrachés et qu’ils aient été démembrés et que leurs organes pareillement aient été éviscérés. La trace des morsures observées sur les os indiquent q’elles ont été produites par des omnivores, c’est à dire des hommes et non des carnassiers, des carnivores, des animaux. Les analyses au radio-carbone apportent les preuves que les victimes étaient originaires de la région .

Les chercheurs, et c’est particulièrement intéressant, ont établi des comparaisons avec des analyses sur d’autres sites pré-historiques ( cavernes de Gough situées à 3km) . Selon les auteurs de l’étude, il existe quelques exemples limités d’enterrement de victimes de violence, comme celui d’un jeune homme retrouvé dans un fossé à Stonehenge, qui avait reçu de multiples flèches. Mais les rituels funéraires prévoyaient surtout l’incinération ou l’enterrement de plusieurs personnes ensemble, contrairement à ce qui a été découvert à Charterhouse Warren. Il a pu aussi être démontré que les personnes n’ont pu être tuées du fait d’une famine, étant donné le grand nombre d’os de bovins trouvés mélangés aux os humains.

De même manière, les auteurs de l’étude ne pensent pas que les attaquants se battaient pour le contrôle des ressources du site, et le changement climatique ne semblait pas avoir eu d’impact sur les conflits en Grande-Bretagne à l’époque.

Plus intéressantes encore sont les analyses au radio-carbone, ainsi des recherches antérieures ont pu apporter la preuve que les dents de deux des enfants victimes étaient atteintes de la peste, bien que l’on ne sache pas exactement comment cette maladie a pu être liée à l’épisode de violence.

Pour Rick Schulting, professeur d’archéologie scientifique et préhistorique à l’Université d’Oxford: « Il est possible que cet épisode ait été perçu comme une vengeance pour une transgression quelconque ». En effet« de tels actes de violence peuvent survenir dans un climat de colère et de peur – il existe des preuves que certains individus avaient la peste, ce qui peut avoir contribué à un sentiment de peur et d’incertitude. Les tensions ont pu se développer à partir de faits relativement anodins (vols, accusations de sorcellerie, etc.), puis devenir incontrôlables. »

De nombreuses marques de coupure couvrant les os et les fractures au moment de la mort ou à proximité montrent que la tête, les bras, les pieds et les jambes des victimes ont été retirés de leur corps à l’aide d’outils en pierre. Des preuves montrent également que le cuir chevelu et la peau ont été enlevés, ainsi que certaines têtes dont la mâchoire inférieure et éventuellement la langue ont été enlevées. Pareillement il a été découvert l’usage d’armes tels des arcs et des flèches et même des épées dont il sembleraient qu’elles aient commencé à se répandre dès 1500 ans av. J-C.

Ce site préhistorique anglais de Charterhouse Warren a fait l’objet de nombreuses publications,

Le nombre de morts violentes et le traitement intensif des corps sont extrêmement inhabituels pour la Grande-Bretagne de l’âge du bronze, notent les chercheurs dans leur étude, et ces pratiques ne sont manifestement liées à aucun rite funéraire connu.

Ah, qu’il est bon de ne rien faire quand tout s’agite autour de vous !1

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  1. Citation de Jules Barbier (1825-1901), librettiste français notamment pour Ch.Gounod et J. Offenbach

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