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Serions-nous tous comme des criquets ?

par Émile Cougut

Petit rappel d’entomologie : le criquet est un insecte proche des sauterelles qui a une vie quelque peu solitaire la plupart du temps. Mais quand son environnement évolue (pluie, température, etc.) son comportement change. Il se regroupe avec ses congénères, se fond totalement dans la masse et migre (en dévastant tout sur son passage). Une des 7 plaies d’Egypte si on en croit l’Ancien Testament.

Prenons un être humain, normal, avec un travail, une vie de famille et soyons sincères, très très peu d’interactions sociales. Quand l’univers dans lequel il évolue change, il devient agressif, ne va-t-il pas ainsi chercher de l’aide quitte à entrer dans un monde qui le dépasse et surtout qui l’oblige à nier la personne qu’il est et d’agir contre ce qu’il pense, qu’il est profondément.

C’est l’histoire de Bruno Mancini, psychologue du travail, marié à Valérie, clerc de notaire, un enfant : Valentin. Un jour, il apprend qu’il est muté à Fontainebleau, dans une filiale ultrasecrète qui travaille sur l’intelligence augmentée. Le secret le plus absolu est de mise ainsi qu’une totale loyauté. D’ailleurs le responsable de la sécurité y veille méticuleusement. Et le salaire est en plus très confortable.

Le couple a trouvé et a acheté un ancien moulin entouré de plusieurs hectares et ils en profitent pour faire plaisir à Valentin en achetant un chien.

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Tout est idyllique, la bonne famille de français moyens qui vivent ce que beaucoup rêvent de vivre. Mais voilà, un incident avec la fille des voisins et ils sont alors victimes de dégradations, de harcèlement : arbres empoisonnés, pneus crevés, Valentin tabassé, etc. Ni le maire qui leur fait sentir qu’ils ne sont pas natifs d’ici et donc gênent, ni les gendarmes qui non seulement ont d’autres délits à régler et qui leur reprochent de façon à peine voilée qu’ils se comportent en nantis et qu’avec les gilets jaunes il est en quelque sorte normal qu’ils attirent la rancœur des plus démunis.

Heureusement qu’il y a l’oncle Giuliano, en Italie, qui lui promet de s’occuper de tout. Et est-ce le hasard, est-ce une action d’un groupe occulte ? Tout s’arrange. Mais voilà, un service demande une compensation, d’autant plus quand c’est la famille qui la réclame. Et voilà Bruno pris dans un engrenage infernal qui l’oblige à renier celui qu’il est, de travailler pour… il ne sait pas qui, une entité qui le dirige mais dont, de fait il fait partie. Qu’est-ce qui prime : la loyauté envers une entreprise multinationale qui n’a pas de vraie consistance, ou cette entité que l’on appelle la famille mais dont ne connait pas non plus tout ce que cela englobe ?

Que des sujets intéressants qui sont, hélas, le plus souvent effleurés, pas assez développés. Dommage, car je n’ai pas parlé de l’incivilité dans les campagnes (et non, cela n’existe pas que dans les banlieues, loin de là) ou de l’espionnage industriel. Maintenant, cela aurait certes nécessité un développement plus grand avec quelques centaines de pages de plus. Et puis la fin est assez décevante, trop rapide laissant au lecteur une impression d’inachevé.

La double personnalité du criquet
Jean-Pierre Poccioni

éditions Héliopoles. Collection Serge Safran. 22€90

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Illustration de l’entête: Larousse

                               

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