Elle y va Michèle Sauberli, passionnément, instinctivement, et ne semble dresser aucune frontière entre ses mille activités. Vous pensez la voir installée définitivement dans un genre, c’est mal la connaitre.
Certes, elle l’explorera en poussant loin ses recherches, jusqu’à ce qu’un jour, elle avoue « en avoir fait le tour » et l’histoire s’interrompra pour un temps, l’aventure aura été belle. Elle a duré parfois plusieurs années. Par ailleurs on songe à ses envolées de fleurs qui occupent l’espace dans une danse de pétales aux couleurs éclatantes. D’autre part encore à ses passionnantes expériences sur la calligraphie déclinées avec emphase. D’ailleurs elle fut longtemps fidèle à l’abstraction. Ses expérimentations tout à la fois méditatives et instinctives ont, elles aussi, connu beaucoup de succès. Ainsi Michèle les réalise le plus souvent dans de très grands formats pour assouvir sa passion de la gestuelle.
L’artiste expose souvent. Plus justement dit, en ces temps compliqués, exposait. Le confinement change la donne, « Personne ne peut exposer son travail de l’année. Les galeries, les grands salons, repoussent les dates d’exposition d’une fois sur l’autre. Cela ne donne pas envie de travailler !«
Sans doute. Cependant chez l’artiste, le désenchantement est de courte durée et elle reprend de plus belle ses outils. Elle fait régulièrement des portraits d’amis, ou encore des personnalités qu’elle apprécie. Elle apporte sa touche reconnaissable entre toutes, nerveuse et colorée. Sur la toile ou sur le papier, des lignes en mouvement structurent l’ensemble et lui insufflent une belle énergie.
Son Beethoven est paru dans le magazine des Arts et Sciences et Lettres à Paris en 2020. On le sait, le musicien refusait de poser pour les artistes. Gageons qu’il aurait sans doute aimé que Michèle Sauberli le comprît si bien, et le magnifiât dans une œuvre touchante et quasi musicale.
Mais aussi la peintre aime peindre les animaux, de toutes espèces, y compris ceux qui font peur ou qui nous repoussent. Elles les adoptent le plus souvent sans les mettre en scène. L’animal trône dans toute sa majesté, qu’il s’agisse d’un lion, d’un loup, d’un corbeau, ou d’un rat. Même si l’approche de l’artiste est « réaliste », le trait et les détails soignés, elle est libre Michèle Sauberli, et ponctue l’œuvre par des signes, des arabesques, des courbes et taches colorées. Le fruit du hasard ? Sûrement pas ! Même si elle l’avoue, sa main l’étonne et va plus vite que la musique, selon la formule consacrée. Elle aurait presque du mal à la suivre, tant sa main connait le chemin à prendre sur le papier ou sur la toile. « C’est comme si une force me guidait ! » Une force intérieure ou supérieure, les deux n’étant pas opposées ! » dit-elle, amusée.
Certes, Michèle Sauberli ne s’est jamais sentie aussi proche de la nature. Elle se souvient de ses années d’études aux Beaux-Arts, où, des heures durant elle réalisait des planches naturalistes. Si bien que c’est un défi qu’elle se lance aujourd’hui, dans un autre contexte, il est vrai. Les années ont passé, cependant, elle exprime à travers ses illustrations un talent d’observatrice toujours intact. C’est tout à la fois artistique et scientifique. Ce n’est pas si évident de mettre en scène autant de sujets. Il faut composer en tenant compte des formes, des couleurs, de la taille du modèle. « Je dessine, je peins, je grave : poissons, squelettes, fruits et légumes, piments, racines, coquillages, pommes de pin, minéraux, plumes… tout y passe ! » Une histoire toute… naturelle s’écrit en ce moment et pour de nombreuses années encore.
Illustration de l’entête: Triptyque. Michèle Sauberli