Wood, entre poésie et engagement, recherche esthétique et militantisme, un beau spectacle qui questionne sur l’environnement
Émilie Lalande est depuis 2019 artiste associée au Centre Chorégraphique National d’Aix-en-Provence.
Depuis, la belle Juliette des Ballets Preljocaj, qui a tenu des rôles majeurs du répertoire du chorégraphe aixois, est sur tous les fronts de la création, et avec Jean-Charles Jousni, son Roméo à la ville comme sur la scène, elle a mis 9 mois pour une tout autre création : Zola !
Il ne s’agit pas d’une pièce mais d’un adorable bébé, petit frère de Lou-Biana, née fin 2018.
A la présentation presse* de « Wood », pièce pour une danseuse et une marionnette d’une durée de 45 minutes, le papa nous confiait : « A la base c’est Émilie qui devait danser sur ce projet, Émilie, mais elle a donné le jour à une nouvelle création avec ce petit garçon. Aussi, après une audition nous avons confié le rôle à Caroline Jaubert ».
Un air de ressemblance avec Émilie Lalande, dans la blondeur, la douceur, la silhouette gracieuse. Sa façon de se mouvoir aussi, d’occuper la scène, mais forcément, c’est Émilie, chorégraphe de la pièce qui dicte sa partition. « Wood » est signé, l’artiste applique son sceau et laisse son empreinte sur les tableaux de sa création. « Nous connaissions Caroline Jaubert, car nous avions travaillé ensemble pour les ballets Preljocaj. Elle a également dansé avec Marie-Claude Pietragalla, Sylvère Lamotte », précise Jean Charles Jousni. De belles références, s’il en est, qu’elle complète par une expérience dans la chorégraphie.
S’il y a de la volupté et de l’ivresse dans sa façon de danser, il y a aussi de la pudeur, de la retenue, puis soudain, la jeune femme fragile s’exprime dans la force, et il y a une telle sincérité dans ce qu’elle exprime, qu’on ne peut être que séduit.
Le propos est clair. La chorégraphie d’Émilie Lalande, la danseuse, le décor, les musiques choisies, tout nous provoque avec force ou douceur. Tous les éléments dialoguent entre eux et nous renvoient à ce que l’art réveille en nous de plus personnel, bousculant nos perceptions, nos idées, nos émotions, et quand il s’agit de la terre, de nos enfants, on est touché, troublé, secoué… Et c’est tant mieux !
Enfants, parents, tous concernés, car même si Émilie Lalande axe son travail autour du jeune public, ses projets s’adressent à tous. Elle raconte le monde d’aujourd’hui et nous questionne. Les écoles s’intéressent à ses propositions pédagogiques. « La compagnie a pris tellement d’ampleur, que je danse moins pour d’autres compagnies, confie Jean-Charles Jousni qui est également co-directeur d’(1)promptu et assistant chorégraphique de « Wood ». « Autour de cette pièce nous avons plusieurs actions d’éducation artistique et culturelle. Il nous tarde aussi de présenter le spectacle aux enfants, avant la fin de l’année scolaire, mais aussi à tous les publics, probablement à la rentré prochaine, au Pavillon Noir.»
Jean-Charles Jousni dansera dans la « création 2022 » d’Émilie, mais chut, c’est encore secret ! Pour l’heure, c’est « Wood » qui est à l’affiche et qui le restera pour très longtemps encore, car il ne nous semble pas téméraire de prévoir à ce spectacle une longue vie. L’aventure ne fait que commencer.
1Promptu va bien, il y a fort à faire au sein de la compagnie, aussi Mercedes Perez, vient de rejoindre l’équipe en tant qu’administratrice de production. « Nous sommes ravis », confie le jeune homme. « Par ailleurs, c’est Marius Delcourt, un des interprètes de la compagnie depuis le début de sa création, qui mène la barque pédagogique. Il y a tout une recherche sur la gestuelle, un travail en rapport à la nature, un travail sur la marionnette qui passionne les enfants. »
A Gignac, une classe de 5ème travaille à partir du spectacle dans toutes les matières ; en histoire-géographie, les élèves ont planché sur la déforestation, en biologie, sur les arbres, en français ils ont étudié « L’homme qui plantait les arbres » de Jean Giono, qui fut également une source d’inspiration pour Émilie ».
Une marionnette qui joue un rôle essentiel
Faire d’une marionnette en bois un partenaire de danse et le représentant de la nature m’est apparu comme une évidence », dira Émilie. « Le dialogue est créé entre l’Homme et la Nature, la danseuse et la marionnette, un rapport manipulateur/manipulé qui questionne ».
Questionner, un leiv-motiv pour la jeune chorégraphe. « Aujourd’hui, en tant qu’artiste, il me semble être de mon devoir d’aborder les sujets sur l’environnement et l’écologie… Ce secteur de la création est le creuset d’aventures artistiques formidables. Le contact vécu auprès du public, enfants et adultes, me donne l’envie d’approfondir mon travail dans ce sens.
L’enfant, a le pouvoir de devenir un adulte ouvert sur le monde qui l’entoure. Lui aussi est unique, et précieux, comme la nature ».
Artiste et maman comblée, Émilie Lalande n’en n’est pas moins sensible à tout ce qui touche à notre planète en souffrance. Encore davantage dirons-nous. Les enfants sont là pour nous rappeler, si besoin était, ce proverbe universel : « La terre n’est pas un don de nos parents, ce sont nos enfants qui nous la prêtent. »
Avec « Wood », elle développe de jolis arguments pour nous ouvrir grands les yeux et nous faire entendre « sa musique » : « Voir la musique, et écouter la danse ! » Selon la jolie formule d’Émilie Lalande. On retrouve « la Pie Voleuse » de Rossini, « Ombra Mai Fu » de Georg Friederich Haendel, une musique du « boss », Bruce Springsteen, des ambiances sonores imaginées par Mathieu Maurice, une composition d’Émilie Lalande, elle-même. Et que dire de la musique de Debussy, qui nous laisse plein d’images dans la tête. Ardente, expressive, élégante, « impressionniste » car distillée par petites touches, « Prélude à l’après-midi d’un faune » nous livre différentes atmosphères, anime le rêve, et fait vibrer la nature entière autour de l’arbre solitaire, seul survivant qui nous implore dans une ultime invocation. Une prière entendue. Et l’arbre dans la lumière de se métamorphoser. On ne vous dira comment ! La plénitude du bonheur passe par la magie musicale et les images. Sachez que la Vie reprend ses droits !
*Spectacle-presse avant ouverture au public
Illustration de l’entête:photo JC Carbonne