General Charles Lallemand was in the army of Napoleon and lived in exile in the young United States of America. An exciting and adventurous true story
La chronique littéraire de Félix Delmas.
Parmi les « oubliés de l’Histoire », parmi les messins non honorés par leur ville natale, se trouve le général Charles Lallemand (auquel on peur rajouter son frère le général Henri Lallemand), si proche de l’empereur Napoléon que les anglais lui interdirent de le suivre à Saint Hélène (l’empereur lui léga 100.000 francs). Un homme à la destinée extraordinaire comme la révolution et l’empire ont produit en grand nombre : Bernadotte qui finit sa vie comme roi de Suède, Joseph Fiévé qui de journaliste sera nommé préfet, et tous « ces grands hommes » qui reposent au Panthéon, qui ont marqué cette période et qui sont oubliés depuis longtemps sauf de quelques rares historiens. Des militaires, des généraux, cette époque en a connu beaucoup, il faut dire qu’une grande majorité sont morts au combat et ont été oubliés eux aussi. Certains nous sont connus par leurs descendances comme les généraux Dumas ou Hugo, d’autres, par le hasard d’une rencontre, comme Bergonnier qui comprit le génie du capitaine d’artillerie Bonaparte au siège de Toulon.
Mais Charles Lallemand rêve d’un autre destin. Il réussi à rassembler autour de lui environ une centaine d’anciens soldats de la grande armée, essentiellement des officiers en leur faisant miroiter la création d’une riche colonie.
Après une traversée mouvementée, ces futurs colons (sans Lallemand qui arrivera plus tard) débarquent le 16 janvier 1818 sur l’île de Galveston où ils sont accueillis par le corsaire français (qui travaille aussi pour les espagnols) Jean Laffite. A la mi mars ils se rendent à Orcoquisc Bluff sur la rivière Trenity où est crée le champ d’asile. Cet endroit se trouve au Texas, alors possession espagnole, et de fait Lallemand, plus qu’une colonie agricole, veut en faire une base militaire pour former une armée encadrée par des officiers français pour conquérir les territoires espagnol d’Amérique. Les colons passent la majorité de leur temps à construire des forts et des fortifications et accessoirement à un peu d’agriculture. Le ravitaillement est assuré par Laffite. Les conditions de vie sont très dures, duels, défections se multiplient, mais Lallemand a un vrai charisme et tant bien que mal assure l’unité de la colonie. Il promulgue un « code colonial » fondé sur l’égalité, la vertu qui doivent régir aussi bien la vie privée que publique de la colonie. Mais Lallemand s’avère aussi être un rêveur, beau parleur, manipulateur, toujours dans le futur, jamais dans le présent, mégalomane voire paranoïaque. Très vite il s’aperçoit que sa colonie sera un échec et le 28 juillet 1818, il la fait évacuer car une rumeur vient de lui apprendre l’arrivée d’une colonne militaire espagnole. De fait c’est faux, les espagnols ne viendront à Orcoquisc Bluff que bien plus tard. Les colons se retrouvent à Galveston. Lafitte en part le 1 septembre, et l’ile est dévastée à la mi septembre par un ouragan. Les rescapés connaitront chacun leur destin, la majorité ayant pu regagner la Nouvelle Orléans. Grace à une souscription en France, ils recevront entre 40 et 200 francs après avoir fait pression sur Lallemand soupçonné de vouloir garder cet argent.
Lallemand se transforme en planteur, fomente quelques complots en Amérique, en Espagne, voyage, dépense l’argent qu’il n’a pas. La révolution de 1830 lui permet de revenir en France où il retrouve son épouse qui est proche de la cour (elle fut la maitresse de Louis Philippe d’Orléans entre autres). Il est couvert d’honneur, devient gouverneur de la Corse, retrouve son siège de pair de France. Il décède le 9 mars 1839, ne laissant derrière lui que des dettes et une bibliothèque bien fournie.
Charles Lallemand reste dans l’histoire pour avoir eu un rêve, un rêve qu’il ne sut concrétiser car totalement détaché des problèmes matériels et n’ayant su percevoir qu’il n’était qu’un pion dans la diplomatie américaine et espagnole. Bien sur il a inquiété quelque temps les autorités françaises qui le soupçonnaient de vouloir délivrer Napoléon. Bien sur, grâce à son frère, véritable publiciste, son aventure fut parfaitement connue aux Etats-Unis d’Amérique et en France où elle fut défendue par Benjamin Constant, et même l’objet d’une chanson de Béranger mise en musique par Rouget de l’Isle. Le champ d’asile n’est pas loin de faire penser à l’Icarie de Cadet ou à la Réunion de Considérant, expériences fouriéristes et saint-simoniennes qui eurent lieux au Texas…
Anne Boquel et Etienne Kern ne sont pas des historiens et n’ont pas commis un livre d’histoire. Ils racontent une histoire, une histoire vraie. Ils ont l’intelligence de fournir des notes précises pour chacun des courts chapitres qui composent ce livre, ce qui permet au lecteur voulant approfondir ce sujet de le faire facilement.
Un roman ? Non l’histoire vraie d’un rêve dérisoire mais plein de grandeur.
Félix Delmas
Les derniers fidèles
Anne Boquel et Etienne Kern
Éditions Flammarion.19,95€