Anne Queffélec au piano, Marion Tassou, soprano, et l’Orchestre Sinfonia Varsovia, dirigé par Aziz Shokhakimov, oui, vraiment de grâce à foison ce lundi 8 août à 21hdans le parc du château de Florans
Au programme:
Mozart : Ch’io mi scordi di te ?…Non temer, amato bene K. 505
Mozart : Concerto pour piano et orchestre n°27 en si bémol majeur K. 595
Dvorák : Symphonie n°9 en mi mineur opus 95 “Du Nouveau Monde”
Anne Queffélec est de retour dans le parc de Florans. Une habituée du festival, très attendue et très aimée du public. Son programme ce lundi 8 août était consacré à Mozart. Les mélomanes l’aiment dans tous les répertoires, mais c’est assurément pour beaucoup une brillante mozartienne.
Ceux qui n’ont pas la chance ou l’opportunité d’assister aux concerts de la Roque d’Anthéron, auront pu découvrir la pianiste sur le petit écran le 1er août dernier : France télévision retransmettait un concert de toute beauté.
Autre « tête d’affiche « de cette soirée, l’orchestre Sinfonia Varsovia dirigé par Aziz Shokhakimov, qui a enthousiasmé le public vendredi 5 août avec Alexandre Kantorov dans un progamme Tchaïkovski : Concerto pour piano et orchestre n°2 de Tchaikovski, et Liszt, Concerto pour piano et orchestre n°2 en la majeur.
On attendait donc le meilleur et on l’a eu !
Un petit moins convaincus par l’interprétation de Marion Tassou dans le Mozart : Ch’io mi scordi di te ?…Non temer, amato bene K. 505, une œuvre superbe si souvent chantée par des cantatrices de renom et on se souvient de sopranos qui nous ont littéralement envoutés. On ne se lasse pas de la beauté irrésistible de la mélodie principale. Peut-être sommes-nous moins sensibles au timbre si particulier de la soprano, à ses aigus singuliers ? On reconnait à Marion Tassou une excellente prononciation et un joli phrasé et quoi qu’il en soit, la soprano, l’orchestre, Anne Queffelec au piano, et ce chant sublime nous ont permis de passer un excellent moment et le public était visiblement enchanté.
Anne Queffélec a la délicatesse requise pour offrir toute la poésie du Concerto pour piano et orchestre n°27 en si bémol majeur K. 595. C’est toute l’âme mozartienne qui se déploie ici. Son jeu est d’une beauté indicible alliant, lumière et mélancolie, angoisse et optimisme, collant si parfaitement à ce Mozart de légèreté et de tristesse. La pianiste distille toutes ces notes perlées et colorées avec grâce. Elle est l’une des pianistes qui atteignent le mieux les intentions, l’esprit du compositeur, et fait chanter sa musique. Par moments, la joie de vivre au clavier est contagieuse, et on est aux anges dans ces pages pleines de musicalité où l’orchestre et la soliste se rejoignent, dans un climat souriant et lumineux, pour se détacher ensuite dans les larmes et les plaintes. C’est souvent plein d’ambiguïté, plus complexe qu’il n’y parait chez Mozart, et c’est cela qui nous fascine justement dans ce concerto pour piano. Il y a toujours quelque chose pour nous surprendre, quelque chose de nouveau que l’on n’avait pas perçu dans d’autres écoutes. L’interprétation d’Anne Queffélec trouve auprès du charismatique chef ouszbek un partenaire attentif et souriant. Nul doute, la pianiste est ravie de cette rencontre sous le ciel étoilé du parc. D’autant plus que la température est tombée, et une légère brise s’est invitée. On respire !
Cette douceur sera accompagnée d’un bis, le Menuet en sol mineur de Handel, annoncé par la pianiste comme un « rituel » à la Roque d’Anthéron car elle l’a offert à plusieurs reprises. Qui s’en plaindra ?
Après un court entracte, retour plein de ferveur de ce magnifique orchestre, dont l’engagement cette année est décidément extraordinaire. Les quatre mouvements de la symphonie, tout en étant bien différents, participent d’un même élan, d’une même dynamique. Nous ne sommes pas devant une « machine orchestrale » bien huilée, mécanique, comme c’est quelque fois le cas dans cette symphonie pleine de tension et de rigueur.
Ici l’engagement dans ce voyage épique et héroîque offert par Aziz Shokhakimov est émouvant, rempli de promesses. Il est riche des inspirations venues des deux continents, l’Europe et l’Amérique.
Le jeune chef fait du reste partie du spectacle, se faisant obéir par ses musiciens par des gestes conquérants. Très applaudi le cor anglais. On l’a aimé notamment dans « Largo », le deuxième mouvement d’une nostalgie attendrissante. Une nostalgie qui se propage jusque dans les bois qui dialoguent subtilement. On anticipe dans notre tête, on le recherche presque ce thème principal, Allegro molto, un leitmotiv puissant qui nous emporte.
Superbes encore les cordes, pleines de mystère et on pourrait encore évoquer le charme des flûtes. Tous les pupitres du reste sont mis en valeur et font naitre de belles sonorités, et à l’issue de ce concert, on comprend davantage encore pourquoi ce Nouveau monde plein de ferveur et de panache, est aussi populaire, dans le sens le plus noble du terme.