The essence of the Roman power development

Eric Teyssier apporte dans Les secrets de la Rome antique des éléments de réponse à la question que d’aucuns se sont posés et se posent toujours : comment un petit village de bergers bâtit au VIII siècle avant J.C. a-t-il pu conquérir un immense empire qui durant plus de cinq siècles a rassemblé des dizaines d’ethnies parlant une multitude de langues, priant des dieux différents. A travers onze chapitres, l’auteur nous raconte tous les faits marquants qui ont marqués l’histoire de Rome du mythe de sa fondation à l’entrée des notables gaulois au sénat sous Claude. Il en profite pour les analyser et montrer les spécificités de la démarche de ce peuple. Ce sont d’abord et surtout des soldats paysans, soumis à une très grande discipline, menés par des chefs charismatiques qui savaient être proches de leurs hommes. Ils étaient avant tout pragmatiques. A la guerre, ils savaient évoluer au niveau tactique pour s ‘adapter à leurs adversaires surtout après une défaite, leurs armes ils copiaient les meilleurs de leurs ennemis. Ils surent rester unis à une époque où les peuples, les cités s’affrontaient continuellement, ils jouaient sur leurs divisions, sachant intégrer dans leur armée les peuples hostiles à leurs ennemis. En plus après les 25 ans de leur engagement, ces « supplétifs » avaient automatiquement la citoyenneté romaine et les avantages qu’elle offrait. Les peuples vaincus étaient soumis à des dédommagements importants qui permettait de financer les futures guerres et surtout qui les appauvrissaient. S’ils savaient se montrer « magnanimes » avec les vaincus, ils étaient intraitables contre ceux qui violaient leurs obligations. Carthage, Corinthe furent détruites totalement.

Les Romains ont bâti un empire commercial, le pourtour méditerranéen était un lieu d’échange, de commerce, totalement ouvert, la « mondialisation » de l’antiquité.
Pragmatiques les Romains l’étaient aussi dans la gestion des territoires sous leur domination. Ils surent s’appuyer sur les élites locales, leurs fils étaient formés à Rome et quand ils revenaient chez eux amenaient la culture romaine. Les plus doués entraient dans l’ordre équestre et furent les fidèles serviteurs de la machine étatique et certains entrèrent au Sénat sous l’Empire. Les Romains bâtirent des villes pour vivre suivant leur culture. Elles permirent une implantation spatio temporelle de leur pouvoir et de leur manière de vivre. Elles furent très attractives pour les autochtones qui rapidement furent les résidents les plus important en nombre. Bibracte sur le mont Beuvrey, capitale des Eduens s’est vidé en moins d’une génération au profit de la ville nouvelle d’Autun (Augustodunum).

La force du modèle culturel proposé est bien plus efficace que la violence quand on souhaite intégrer des individus, des peuples. Au delà de l’art de vivre, ce modèle culturel était avant tout tolérant, très tolérant : tant que la parole donnée est tenue, tant qu’il n’y a aucune hostilité contre le pouvoir romain, les individus peuvent vivre comme bon leur semble, avec leurs coutumes, leurs cultures. Mais s’ils veulent participer à la vie publique, il leur est nécessaire de s’impliquer dans la culture romaine pour essayer de bénéficier de la citoyenneté. Car « l’ascenseur social » est particulièrement performant : Gatien, dont les ancêtres étaient supplétifs dans l’armée devient empereur.

Eric Teyssier est un conteur, à partir de petites histoires, de scènes, il dessine une culture, une façon de vivre, des mentalités, un ensemble qui explique la force de cette Pax romana. Il finit, de façon quelque peu attendu par les jeux du cirque, mais d’une façon non originale, mais bien plus proche de ce qu’ils étaient réellement.

La force de l’Empire romain, n’est-elle pas aussi dans cette phrase de Juvénal  : « panem et circenses », du pain et des jeux ? Constat encore d’actualité.

Félix Delmas

Les secrets de la Rome antique
Eric Teyssier

éditions Perrin. 21,90€

WUKALI 13/102015
Courrier des lecteurs : redaction@wukali.com