Neuf nouvelles, neuf nouvelles autour de la solitude, ou plus exactement des solitudes dans ce beau livre de Jean-Pierre Pinet, car ce sentiment, ou cet état de fait (tout dépend comment on le ressent ou on le vit), connaît bien des facettes. A la lecture de chacune de ces nouvelles, comment ne pas penser à ce que nous avons lu, ou du moins ressenti à chaque situation. A titre personnel, j’ai très vite pensé à Bérenger 1er de l’extraordinaire pièce de Ionesco Le Roi se meurt, ou aussi à bien des pièces de Shakespeare, à quelques phrases tirées de lectures comme : «Je cherchais une âme qui me ressemblât, et je ne pouvais pas la trouver. Je fouillais tous les recoins de la terre ; ma persévérance était inutile. Cependant je ne pouvais pas rester seul . Il fallait quelqu’un qui approuvât mon caractère, il fallait quelqu’un qui eût les mêmes idées que moi.» de Lautréamont, «C’est aussi cela la solitude : lorsqu’on commence à penser à quelque chose, à se penser, et que personne n’est là pour vous empêcher d’aller jusqu’au bout du rouleau.» de Madeleine Chapsal, «Il n’aime que la solitude et n’est pas heureux.» de José Cabanis ou encore «La vie, autour d’elle, devenait tellement morne, tellement inutile et monotone qu’on se demandait si la rue était vraiment là, à portée de main en quelque sorte, grouillante de vie, de lumière, de couleurs , de sons et d’odeurs » de Georges Simenon. Mais surtout comment résister à: «La solitude ! Tu la connais, toi, la solitude ? Celle des poètes et des impuissantes. La solitude ? Mais laquelle ? Ah ! Tu ne sais que seul, on ne l’est jamais. Et que partout le même poids d’avenir et de passé nous accompagne… Mais ceux qu’on a aimés, ceux qu’on a pas aimés et qui vous ont aimés, les regrets, les désirs, l’amertume et la douceur, les putains et la clique des dieux… La solitude ! Elle est peuplée de grincements de dents et tout entière retentissante de bruits et de clameurs perdues.», paroles immortelles qu’Albert Camus met dans la bouche de Caligula.
Et ce ne sont que quelques exemples, car chacun en connait sans nul doute diverses formulations qui pourraient ici être complémentaires. C’est dire ô combien les situations de solitude, le ressenti de la solitude, la façon que tout un chacun a de vivre cette émotion, cette perception que partage toute l’humanité est diverse. C’est ce que nous dit Jean-Pierre Pinet. Peu importe l’époque, peu importe la situation sociale, peu importe le sexe, la solitude est partout, constamment, même dans des situations apparemment des plus banales, un couple marié par exemple, où on ne pense pas la trouver. La solitude c’est être seul, mais pas obligatoirement, c’est surtout et avant tout un état d’esprit. D’ailleurs les personnages de Jean-Pierre Pinet qui ont choisi d’être seul l’assument parfaitement, totalement, et trouvent ainsi une sorte de bonheur dans cet état de fait. Si elle peut s’avérer destructive voire mortelle pour certains, elle peut aussi apporter une positivité pour d’autres. Tout est une question de choix, voire de culture personnelle.
Si certains personnages peuvent sembler quelque peu pontifiants d’autres dégagent dans leurs tourments une profonde humanité. Le tout est servi par un style élégant que certains pourraient juger désuet, mais c’est ce style qui justement à fait la gloire de la littérature française au niveau de la culture mondiale.
Solitudes
Jean-Pierre Pinet
éditions Fables fertiles. 18€90
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