In Africa, in the sands of the actual Chad desert, the ancestor of man was born
Paris, 11 novembre- Le Président du Tchad, Idriss Deby Itno, a remis aujourd’hui à l’UNESCO, en présence de la Directrice générale, Irina Bokova, un moulage du crâne de Toumaï, le plus vieil hominidé trouvé à ce jour. La cérémonie s’est tenue en marge de la 37e session de la Conférence générale de l’Unesco, qui réunit tous les représentants des Etats membres de l’Organisation jusqu’au 20 novembre.
« L’Unesco nous donne aujourd’hui l’occasion publiquement de dire que le travail de l’équipe franco-tchadienne dirigée par le Pr Michel Brunet, a donné des résultats et a confirmé que Toumaï est bien l’ancêtre de l’humanité. Toumaï est né à 6000 kilomètres d’ici dans le désert. Toumaï se reposera à partir d’aujourd’hui ici à l’Unesco pour l’éternité », a déclaré le Président Idriss Deby Itno avant de remettre un moulage de son crâne à la Directrice générale de l’Unesco, en présence du Pr. Baba Malaï, ancien Directeur général du Centre national d’appui à la recherche du Tchad et du Pr. Michel Brunet, Professeur au Collège de France, qui dirigeait la mission paléoanthropologique franco-tchadienne à l’origine de la découverte de Sahelanthropus tchadensis, dit Toumaï.
« La découverte de ce crâne a bouleversé la vision de nos origines et sa portée historique, scientifique et anthropologique est considérable. […] a déclaré pour sa part Irina Bokova avant de rappeler le travail effectué par l’UNESCO depuis le début des années 1970 avec la rédaction de l’Histoire générale de l’Afrique.
Organisé par la Délégation permanente du Tchad auprès de l’UNESCO et le secteur de la culture de l’Organisation, ce colloque portait sur l’influence de cette découverte sur la recherche paléoanthropologique et sur l’actualisation en conséquence de l’Histoire générale de l’Afrique.
Communiqué Unesco
Dans les sables du désert
Le crâne de Toumaï, qui signifie « espoir de vie » en langue goran, a été trouvé au Tchad le 19 juillet 2001. Datant de plus de sept millions d’années, Toumaï est le plus vieil hominidé trouvé à ce jour. Cette découverte a remis en cause les théories paléoanthropologiques qui prévalaient jusque-là et qui situaient le berceau de l’humanité en Afrique de l’Est.
La découverte de Sahelanthropus tchadensis est le fruit d’une recherche de plusieurs années menée par Michel Brunet, paléoanthropologue, professeur à l’université de Poitiers, nommé fin 2007 professeur au Collège de France. Dès les années 1980, il explore l’Afrique de l’Ouest et notamment le Cameroun à la recherche de couches sédimentaires âgées de 6,5 à 7 millions d’années, afin de tester scientifiquement la théorie de l’« East Side Story ». Cette théorie, popularisée par Yves Coppens en 1982, met en relation l’apparition des premiers hominines en Afrique de l’Est avec les changements climatiques et environnementaux liés à la formation du Grand rift.
Le Centre national d’appui à la recherche (CNAR) du ministère de l’Enseignement supérieur de la République du Tchad l’invite pour une conférence en 1992 et lui propose de participer à des missions de terrain. Sa première mission au Tchad aura lieu en janvier 1994.
Le 21 janvier 19956, lors de sa seconde mission, Mamelbaye Tomalta, un chauffeur de la Direction des Mines, découvre dans le secteur de Koro-Toro, en plein désert du Djourab, au nord du Tchad, un reste d’homininé. Il s’agit d’un fragment de mandibule ayant appartenu à un individu qui sera surnommé Abel et qui conduira à la définition de l’espèce Australopithecus bahrelghazali. La Mission paléoanthropologique franco-tchadienne (MPFT), une collaboration scientifique entre l’université de Poitiers, le CNAR et l’université de Ndjamena, naît de cette découverte. Des prospections et fouilles systématiques se développent et permettent la découverte en 1997 du secteur fossilifère de Toros-Menalla, plus de 150 km à l’ouest de Koro-Toro. Sur le 266ème site découvert dans ce secteur, une équipe de quatre hommes en service au CNAR – composée d’Alain Beauvilain, géographe docteur d’État, Fanoné Gongdibé, ingénieur détaché du ministère des Mines, Ahounta Djimdoumalbaye, licencié en sciences naturelles, vacataire au CNAR, et Mahamat Adoum, non diplômé, employé au CNAR – met au jour le 19 juillet 20018 le crâne de Sahelanthropus tchadensis qui sera surnommé Toumaï.
Controverse scientifique
Ces découvertes posent de nombreuses questions, ces ossements sont-ils ceux d’un hominidé ou appartiendraient-ils à un ancêtre des grands singes. Les revues scientifiques internationales qui font autorité, tels Nature ou La Recherche, deviennent le lieu du débat et la controverse enfle parmi les chercheurs.
Pour les uns ce crâne dispose d ‘une faible capacité crânienne, les orbites autour des yeux s’apparentent à ceux des grands singes actuels, l’inclinaison à l’arrière du crâne est trop forte, la racine de la canine inférieure retrouvée sur la mandibule est trop longue, bref il ne peut s’agir d’un quelconque ancêtre de l’homme, il s’agirait plus exactement de ce que l’on appelle un paléo-gorille, c’est à dire d’un ancêtre du gorille actuel, c’est notamment la théorie de Martin Pickford professeur au Muséum national d’histoire naturelle de Paris et maître de conférences au Collège de France.
En revanche pour Michel Brunet il s’agit bel et bien d’un hominidé, d’un lointain ancêtre de l’homme et à l’appui de sa théorie, il présente une reconstruction virtuelle tridimensionnelle du crâne qui permet notamment d’effectuer des mesures d’angle de la boîte crânienne et des corrélations induites avec une bipédie primitive supposée par examen du trou occipital. Yves Coppens relayé par des chercheurs américains avec William Kimbel de l’université de l’Arizona ou David Pilbeam et Daniel E. Lieberman de l’université d’Harvard, appuient la thèse de Michel Brunet
Des études extrêmement poussées dans l’une et l’autre école établissent des comparaisons entre les différents fossiles et typologies d ‘homininés trouvés à ce jour et les grands singes actuels. Chacune des deux écoles scientifiques qui s’affrontent a largement utilisé des moyens d’imagerie 3D et de génie logiciel de reconstitution d’images (Morphologika).
La datation radiométrique du crâne a été effectuée grâce à la méthode du béryllium 10 / béryllium 9, et les systèmes de mesure du synchrotron de l’ESRF de Grenoble qui ont permis d’établir que l’âge de Toumaï est compris entre 6,8 et 7,2 millions d’années
Il est bien dur de trouver ses marques dans cette période qui a vu la séparation et la dichotomie se produire entre l’homme et le chimpanzé. Cela est d’autant plus difficile que les analyses conduites autour de ces ossements de Tournaï, restent quelque peu fragmentaires et manquent d’os d’autres parties du corps, notamment du bassin ou des fémurs qui auraient permis de cerner avec bien plus de certitudes les théories avancées
Pour Yves Coppens qui fut le découvreur de Lucy dans la vallée du Rift, et de l’origine de la belle histoire de l’East Side Story (Kenya, Ethiopie) qui était considérée géographiquement comme le berceau de l’humanité, il ne fait plus de doute aujourd’hui que cette localisation ne tient plus quelle que soit cependant l’importance considérable de cette région dans les recherches paléontologiques
En complément et pour étayer ces recherches, des études géologiques et paléontologiques ont été menées autour du site de Toros-Menalla où a été exhumé le crâne.
Pierre-Alain Lévy
Sources documentaires: Université de Poitiers, CNRS, Collège de France, Mission paléoanthropologique franco-tchadienne, Wikipédia, La Recherche
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Illustration de l’entête: Moulage du crâne holotype non-reconstruit de Sahelanthropus tchadensis TM 266-01-060-1, surnommé Toumaï (orientation approximative selon le plan de Francfort horizontal).Taille : 182,5 × 105 × 97 mm
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