A new comer with a first novel, her name Corinne Devillaire, remember her, she is promised to success for sure, we bet it !
La chronique littéraire d’Émile COUGUT
« C’est quoi ce roman ? » se dit Malou le vendredi 30 aout 1985 en voyant sortir de sa voiture son fils Frédéric, sa femme Katrin et leurs trois enfants Clothilde, Clarisse, Pierre et le chien Robert. Son fils avec qui elle n’a plus de contacts depuis des années, son fils qu’elle a toujours rejeté, son fils qui la hait. Ses petits enfants qu’elle n’a jamais vus car ils symbolisent la vieillesse qu’elle refuse, qu’elle combat quotidiennement grâce à la chirurgie esthétique, les produits de beauté, esthéticiennes et autres masseurs. Et que va dire Robert, pas le chien, mais son dernier mari, chirurgien (esthétique) adepte d’une nourriture équilibrée et triste ? Très vite il apparait que Clothilde, 16 ans, est une surdouée anorexique, Clarisse, 13 ans, une fille lucide, curieuse voulant devenir Diva et Pierre, 7 ans, un petit garçon sincère, qui ne sait pas dissimuler, éleveur d’escargots et très attaché à Robert le chien dépressif.
Dès le lendemain, après une explication entre la mère et le fils, la famille repart, mais l’histoire personnelle de chaque protagoniste va changer. Au contact de Pierre, Malou va voir se développer en elle un instinct maternel qu’elle n’eut jamais pour son fils et va vouloir vieillir, ressembler à l’image d’une grand mère. Clothilde va connaitre l’Amour, la passion, avant tout intellectuelle puis physique avec Robert (pas le chien, mais le mari de sa grand-mère), Fréderic va essayer d’assumer les blessures du passé dues à sa mère.
Les enfants reviendront chez leur grand-mère durant les vacances de la Toussaint, sans que leur père le sache, mais la mort de Robert (le chien) qui se suicide sous les roues de la voiture familiale va entrainer drame sur drame, instaurer un chaos qui va marquer à tout jamais les principaux personnages : Malou, Frédéric et surtout Clothilde.
« C’est quoi ce roman ? » est la question que le lecteur se pose à la fin de ce livre, essentiellement à cause de la façon dont il est bâti. Corinne Devillaire est loin d’être allée à la facilité, et le pari qu’elle a du se donner est parfaitement réussi. Ce roman est divisé en trois parties et dans chacune s’entremêlent le journal de Malou, les mémoires de Clothilde, des dépositions (dans la première partie que de Clarisse, puis de Clarisse et de ses deux parents), et les lettres de Pierre à sa grand-mère (à partir de la seconde partie). Il n’y a jamais le point de vue de Robert (le mari de Malou, pas le chien), personnage pourtant essentiel à l’histoire, mais cette absence permet de mieux approfondir la psychologie des autres protagonistes.
De fait seul le journal de Malou est chronologique ainsi que les lettres de Pierre et dans une moindre mesure les mémoires de Clothilde. Par contre les dépositions, qui elles racontent d’une façon plus descriptive l’histoire, font parfois des allers-retours dans le temps et surtout, essentiellement dans la troisième partie, devancent les autres écrits. Nous voyons Malou et Clothilde dans leur bonheur égoïste alors que le lecteur sait déjà que celui-ci n’est qu’éphémère, que bientôt les dures réalités de la vie vont les rattraper. Mais n’est-ce pas ce que la vie apporte à tout un chacun ? Le bonheur est furtif et il faut savoir en profiter au maximum, car l’avenir peut nous réserver drames et désastres. Et c’est cet entremêlement, ces sauts temporels qui donnent toute sa force à ce roman, qui permet de mieux suivre les changements de chacun, qui expliquent ce qu’ils sont devenus quand l’histoire est achevée.
Les éditions Thierry Marchaisse ont eu le courage de publier le premier roman de Corinne Devillaire et elles ont eu raison, car, pour un coup d’essai, c’est un vrai coup de maître.
Emile Cougut
C’est quoi ce roman
Corinne DEVILLAIRE
Éditions Thierry Marchaisse. 19 €. Sortie en librairie le 9 janvier