Alain RESNAY, our memory
Alain Resnais vient de rejoindre la mémoire éternelle, celle qu’il affectionnait tant et qu’il a tout au long de ses films célébrée. Il s’en est allé ce samedi 1er mars à l’âge de 91 ans. Alain Resnais est un homme de culture , donc un homme de mémoire et son oeuvre cinématographique en porte les marques. Au tout début de sa carrière, dans l’immédiate après-guerre, il réalisa un grand nombre de courts-métrages dont plusieurs furent consacrés à des peintres ( Henry Goetz, Labisse, Van Gogh), puis vint Guernica, et Les Statues meurent aussi réalisé en collaboration avec Chris Marker en 1955 sur la colonisation suivi deux ans plus tard par Nuit et Brouillard qui le consacra comme un des meilleurs cinéastes de son temps, l’expression juste traduite de ces terrifiantes litotes nazis sur les camps d’extermination. Il est l’ami des écrivains, Marguerite Duras, Alain Robbe-Grillet, Jean Cayrol, Jorge Semprún, qui signèrent pour lui ses meilleurs scénarios.
Mémoire, et politique, mémoire et histoire, mémoire et philosophie, mémoire et science, mémoire et intelligence avec Toute la mémoire du monde en 1955 où dans un court-métrage encore il célèbre le livre, la civilisation et la culture au travers d’un documentaire inspiré sur la Bibliothèque Nationale. Vient quelques années plus tard en 1959 Hiroshima mon amour (1959) d’après le roman de de Marguerite Duras avec Emmanuelle Riva, Eiji Okada, peut être son chef d’oeuvre, en tous cas un film bouleversant qui le place définitivement au pinacle de la gloire cinématographique internationale. Alain Resnais connait alors un succès qui ne se démentira jamais plus et chaque nouveau film est une nouveau parement tissé sur son habit de gloire. Il s’entoure d’une pléiade de grandes actrices, de grands acteurs qui lui sont fidèles, rayonnent dans chacun de ses films et les portent à l’incandescence, Delphine Seyrig dans L’Année dernière à Marienbad (1961) d’après un livre d’Alain Robbe-Grillet où Alain Resnais s’empare du Nouveau Roman, Yves Montand dans La Guerre est finie (scénario de Jorge Semprun) sur l’histoire des républicains espagnols exilés en France. La curiosité d’Alain Resnais prend comme il se doit plusieurs directions et les thèmes de ses films sont variés, Mon Oncle d’Amérique (1980) ( avec Gérard Depardieu),s’intéresse à des sujets scientifiques plus complexes sur les questions du comportement où il fait intervenir le biologiste Henri Laborit , dans le droit fil de cette même ouverture d’esprit qu’il avait eu en 1958 quand il avait réalisé un film de commande sur un produit de l’industrie appelé lyriquement Le Chant du Styrène
Au film du temps son oeuvre, (car d’oeuvre il s’agit au même titre que celle d’un écrivain ou d’un peintre), le ton de ses films se fait plus allègre, plus léger, très français, c’est à dire d’intelligence, de subtilité, de finesse et de raffinement, c’est alors Sabine Azéma, dans Mélo (1986), Smoking/No Smoking (1993) ou On connait la chanson (1997)
Les plus grands acteurs français, les meilleurs, ont travaillé dans ses films, honneur du cinéma français, il est définitivement installé dans le Panthéon de notre mémoire collective, cette mémoire qu’il a tout au long de sa vie célébrée, celle qui porte respect et brille à jamais.
Pierre-Alain Lévy
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Illustration de l’entête: Alain Resnais et l’équipe de son film présenté à Cannes, « Vous n’avez encore rien vu ». © Valery Hache / AFP. 21 mai 2012