Fighting bulls in corridas, life and death
Que veut dire [**La suerte de matar *] ? C’est de l’espagnol soit, mais comment traduire ? Heureusement, à la fin de ce roman [**Frédéric Coudron*] nous donne non une traduction, mais deux qui en fait veulent dire la même chose mais avec une nuance certaine. Et non moindre excellente idée celle qu’il eut de donner ces traductions non au début du livre mais à la fin : ainsi le lecteur n’est pas guidé dans sa façon de lire, c’est quand il a fini qu’il est obligé de penser au chemin qu’il a emprunté. Et, de fait, peu importe celui qu’il a pris, le fond est le même, c’est son interprétation qui peut légèrement différer.
Donc «La suerte de matar» peut être traduit par : « la chance de tuer » et par extension par « la mise à mort ». Comme c’est un roman autour de la tauromachie, il est facile de se placer soit dans le camp des «anti» ou des «pour». Ou alors, évoluer… N’est-ce pas ce que fait l’héroïne qui est contre la corrida, par principe, comme beaucoup, et qui, non l’apprécie, mais qui découvre un univers très ritualisé, plein de symbolique et qui porte, de fait, une vraie philosophie de la vie. Et d’ailleurs, elle comprend vite qu’il existe deux sortes de matadors : ceux qui font « de l’esbroufe », qui se comportent en vrais gladiateurs, qui ne vont dans l’arène que pour être applaudis par le public qui préfère les apparences, le plaqué. Et il y a les autres, ceux pour qui leur travail est de mettre en valeur la bravoure du toro, qui s’effacent devant la bête pour la mettre en valeur, dont le but, le but final est non la mise à mort mais la grâce, la grâce du travail qui aboutit à la grâce du toro qui va devenir un reproducteur recherché. Ils se battent plus pour la vie que pour la mort, pour l’avenir et non l’instant présent.
Peu importe l’histoire quelque peu à « l’eau de rose » : Lise, journaliste à TF1 doit faire un reportage sur un des meilleurs toreros de sa génération Manuel Ortega : un personnage imbu de lui, égocentrique, séducteur irrésistible mais qui a été soupçonné d’avoir assassiné un de ses amis. Elle va non seulement découvrir l’univers de la tauromachie, mais aussi tomber amoureuse, et, cerise sur le gâteau, trouver le véritable assassin !
Non l’intérêt de ce roman n’est certes pas l’histoire, mais l’univers de la tauromachie. L’auteur nous amène dans un univers peu connu, dans les coulisses, aussi bien en Espagne, qu’au Mexique ou en France : les élevages de toros, les rituels qui commencent au choix des bêtes, l’argent qui circule (beaucoup d’argent). Mais surtout toute une réflexion sur la vie, sur la mort, la mort qui peut survenir à tout moment : faut-il ne vivre que l’instant présent, jouir sans se préoccuper des conséquence pour soi et pour les autres ? Ou alors bâtir pour l’avenir en se protégeant et en montrant de l’empathie avec son entourage ?
Ce qui est certain, c’est que [**La suerte de matar*] n’est ni un pamphlet contre la corrida, ni une ode en son honneur. C’est entre les deux, pas de manichéisme, pas de critiques de principe par des personnes qui n’ont jamais fait l’effort d’essayer de comprendre ce qu’est la corrida, ce roman est une variation sur la mort, sur la lutte inégale du fort contre le faible, de l’intelligence sur la bravoure. La corrida, comme le dit [**Frédéric Coudron*], est à remettre dans son contexte, non dans l’histoire, mais dans les mythes fondateurs de l’humanité. Pensons au culte de Mythra, d’une incroyable complexité et qui fut, il y a deux millénaires le principal concurrent à une religion qui finit par triompher : le christianisme.
[**La suerte de matar
Frédéric Coudron*]
éditions Au diable Vauvert. 18€
[(
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WUKALI Article mis en ligne le 27/04/2019
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