Sacré travail réalisé sous le houlette de Florent Quellier et présentant Une Histoire de l’alimentation, pas moins, publiée chez Belin. De quoi tout à la fois vous faire saliver et saturer vos méninges toutes excitées de plaisir!
Il faut en effet savoir que depuis bien des décennies, les historiens se sont penchés, ont travaillé, souvent avec brio, sur la perception de ce qui nous semble le plus évident dans notre entourage, dans notre quotidien. De telle sorte, on pense à l’histoire du sport, de la course à pied, des sous-vêtements, des poils, de la fourchette, voire de tel ou tel fruit ou légume, etc.
Et oui, tout a une histoire, la perception que les hommes en ont eu dans le passé est parfois fort différente de la nôtre. Tout évolue ! Avec souvent des allers-retours et, ce que nous croyons évident (et donc permanent) , était loin de l’être dans le passé, voire l’était il y a des décennies et remis en cause après.
Quoi de plus trivial, mais surtout nécessaire que le fait de manger. C’est plus que vital, dès la première heure de notre naissance. Mais manger quoi ? Manger de quelle façon ? Quels sont les rituels présidant aux repas : que de différences entre le service à la française et celui à la russe.
A chaque fois sont sous-entendus non seulement des règles de savoir vivre (et donc de vivre ensemble, la façon de servir à table est aussi un élément du pacte social) mais aussi toute une symbolique rituélique qu’il est bon d’étudier et de connaître car ensemble elles nous permettent de mieux percevoir la société, ses mentalités, ses façons d’être et de penser.
Plus d’une quinzaine d’historiens, spécialistes du sujet, ont été réunis par Florent Quellier pour nous offrir une somme impressionnante sur l’histoire de l’alimentation. Sur la culture de l’alimentation qui a énormément évolué dans le temps et dans l’espace depuis qu’homo sapiens sapiens s’est répandu sur la surface de la terre. L’homme a très vite écrit sur l’alimentation, a écrit de doctes traités de diététiques, élaboré des recettes de cuisines, codifié les bonnes manières à avoir lors des repas, porté une attention souvent critique à l’alimentation des « autres ».
S’appuyant sur les dernières données historiques mais aussi archéologiques, les auteurs nous livrent une histoire de l’alimentation comme il n’y en avait jamais eu avant.
À cet effet, quatre parties composent cette étude : la préhistoire (l’alimentation humaine connaît une vraie révolution avec l’invention de l’agriculture et de l’élevage) ; les temps anciens (Mésopotamie, Égypte, Grèce ancienne, etc ); les temps médiévaux aussi bien en Occident qu’en Orient sans oublier Byzance ; et les mondes modernes et contemporains.
Une nouvelle révolution alimentaire a commencé avec la découverte de l’Amérique et ses nombreux fruits et légumes totalement inconnus des contemporains. Cela a entraîné bien des débats, souvent théologiques aussi bien chez les Chrétiens que chez les Juifs, pour savoir si ces aliments étaient mangeables. Et on ne peut imaginer, aujourd’hui, une cuisine méditerranéenne sans tomate ou poivron !
Le lecteur, à chaque époque, dans chaque société qui existait, apprend non seulement la liste des aliments disponibles, leur façon de les accommoder ensemble, mais aussi leurs interdits alimentaires, les goûts (et bien sûr, les dégoûts alimentaires), les rituels de table et bien entendu les boissons qui accompagnaient tout cela.
Dès lors, vous apprendrez tout sur l’alimentation des vainqueurs des Jeux Olympiques (ceux de l’Antiquité pas les modernes) ou des moines cisterciens avec Saint Bernard, mais aussi sur le souk des confiseurs au Caire au IXème siècle ou le rapport entre Charlemagne et le Roquefort, etc.
Les temps modernes montrent une vraie rupture par rapport au passé. Il va ainsi de la mise en place d’une vraie mondialisation de la nourriture permettant de manger des aliments ne pouvant être cultivés chez le consommateur.
Cela va de pair aussi avec une industrialisation de l’alimentation qui aboutit progressivement à une certaine harmonisation des goûts et des saveurs. Et puis, les temps modernes sont aussi la période où la sur-alimentation et l’utilisation de la faim comme arme de guerre ont pris une proportion bien plus importante que dans le passé.
Dis-moi ce que tu manges, comment tu manges, et je dirai qui tu es ! Voilà une proposition qui peut être formulée à son voisin depuis les débuts de l’humanité. Oui, l’alimentation a une histoire, oui, l’alimentation est bien le reflet de toute les sociétés. Oui, l’alimentation est un vrai marqueur social, c’est d’ailleurs ce qu’a compris L’UNESCO en mettant bien des arts culinaires au patrimoine immatériel de l’Humanité.
Une somme de savoirs impressionnante avec, comme nous a habitué les éditions Belin, une superbe iconographie, des centaines d’encadrés thématiques qui rendent la lecture particulièrement plaisante.
Histoire de l’alimentation
De la préhistoire à nos jours
Sous la direction de Florent Quellier
éditions Belin. 41€