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Le Mage du Kremlin, le livre de l’année

par Suzanne Ferrières-Pestureau

Giuliano da Empoli, auteur du « Mage du Kremlin » pour lequel il a reçu le grand prix du roman de l’Académie française, commence à écrire dès l’âge de 22 ans. Dans le sillage de son père victime d’un attentat des Brigades rouges quand il avait douze ans, il s’intéresse très tôt au fonctionnement du pouvoir. En 1996 il entre dans l’équipe de Matteo Renzi comme conseiller politique où il fait l’expérience d’un monde qu’il analysera dans ses articles et essais. 

Le Mage du Kremlin est le surnom donné à Vadim Baranov, un conseiller politique fictif de Vladimir Poutine, inspiré d’un homme qui a existé, Vladisiav Sourkov.  Avec ce premier roman Giuliano da Empoli se libère de la contrainte imposée par les personnages réels pour analyser la pratique du pouvoir absolu ainsi que l’évolution des mentalités dans la société russe de la fin du XXe siècle à aujourd’hui notamment à Moscou, décor principal du roman. 

On assiste à l’arrivée au pouvoir de Poutine, poussé par son conseiller Vadim Baranov, un ancien metteur en scène et producteur de télévision, aidé de l’homme d’affaire Boris Berezovsky, et à sa métamorphose psychologique au cours de ses dix premières années de pouvoir. D’abord entouré d’intellectuels, de metteurs en scène, de chanteurs, d’artistes russes qui peu à peu s’éloignent du pouvoir, Poutine s’isole de plus en plus dans son « bunker », vivant seul sans sa femme, ses enfants, et sans amis tandis qu’il impose son style autoritaire. 

Si la trajectoire du personnage Poutine obéit à une certaine logique fondée sur une violence qui rappelle celle des années les plus dures du régime soviétique, la personnalité du « mage » est plus complexe. Quand il entre au service de Poutine, Vadim Baranov, formé à une culture européenne basée sur la démocratie, ne perçoit pas encore la nature despotique du régime. Ce n’est que progressivement qu’il découvre un « tsar » qui n’écoute personne, ni son conseiller, ni les courtisans réduits au silence car craignant d’être écartés et privés des avantages matériels dont ils bénéficient. Le mage se résigne très vite à accompagner le tsar en se soumettant à son autorité sans pour autant renoncer à nous faire comprendre le comportement de Poutine ni les raisons pour lesquelles sa stratégie est efficace.

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Si les dialogues sont fictifs, les faits mentionnés par contre sont bien réels ainsi que certains personnages tels que Vladimir Poutine, Boris Berezovsky (homonyne du célèbre pianiste), l’écrivain Edouard Limonov ou le joueur d’échecs Garry Kasparov

On ressort de cette lecture, abasourdi par la mégalomanie du tsar et son manque absolu d’empathie mais plus encore par la résignation d’un peuple en grande partie rompu depuis des siècles à une violence qui semble faire partie de la culture de ce pays.                                                                                                                                                                                                 

Le Mage du Kremlin
Guiliano da Empoli

éditions Gallimard. 20€

Illustration de l’entête: Vladimir Poutine. Photo: Путин/Иллюстративное фо

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