Accueil Livres, Arts, ScènesHistoire Les Plantagenêts et leur cour au coeur de la fondation de l’Angleterre

Les Plantagenêts et leur cour au coeur de la fondation de l’Angleterre

par Félix Delmas

La dynastie des Plantagenêts, un peu plus d’un demi siècle de l’histoire de l’Angleterre entre les XIIè et XIIIè siècles, trois rois, soit un père (Henri II) et deux de ses fils (Richard Cœur de lion et Jean sans terre), et une femme extraordinaire aussi bien pour l’époque que pour la nôtre : Aliénor d’Aquitaine. Les Plantagenêts, de leur temps avait une renommée dans tout l’occident, et ont laissé leurs traces bien après leur disparition. À tels exemples la Grande Charte (Magna Carta), base de la démocratie anglaise, c’est Jean sans terre (bien obligé de la prendre à la grande ire du pape Alexandre III), certains articles des rôles d’Oléron d’Aliénor se retrouvent de nos jours dans le droit maritime international, et j’en passe.

Pourtant, les Plantagenêts n’étaient à la base que des petits seigneurs d’Anjou que les circonstances, une guerre civile et un roi sans descendance, ont mis sur le trône d’Angleterre. Leur état, leur empire était divers, multiple, et le lieu de tous les affrontements religieux, politiques, militaires de leur temps. A cette époque, le Pays de Galles, l’Écosse étaient « indépendants », comme l’Irlande. Soit, l’immense duché d’Aquitaine était intégré à leurs possessions, mais il était parcouru non seulement par bien des volontés d’indépendance et la volonté de Philippe Auguste de faire tout ce qu’il pouvait pour le récupérer.

Pour gérer cet empire, les Plantagenêts ont créé une méthode de gouvernance originale avec une cour qui reflétait les forces en présence. Une cour encore très marquée par la conquête de Guillaume et la toute puissance des seigneurs normands qui ont encore des réflexes de supériorité (nous dirions racistes à notre époque) par rapport aux saxons et autres « ethnies » qui peuplaient le royaume.

Une cour cultivée et des monarques attachés à leur image et très attentifs à la « propagande ». Quand on gagne, les flatteurs tressent des louanges (il y a peu d’écrits négatifs à l’encontre d’Henri et de Richard qui quand même sont montrés comme très colériques), mais quand ont perd, comme Jean, alors l’image qu’en retient l’histoire est très négative, bien éloignée de la réalité.

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C’est sous les Plantagenêts que le mythe arthurien va se développer et servir à la propagande de la dynastie. Tous à la cour n’ont pas la même vision de cette histoire mais elle est quand même un élément de la création du sentiment d’appartenance à un groupe.

Des rois (et une reine) très pieux, chacun à sa façon, très pieux (même Jean). Mais aussi très attentifs à ce que le spirituel n’empiète pas sur le temporel dont ils sont les dépositaires, et ce, en pleine réforme grégorienne. Ce conflit qui déchira les prélats de la cour finit par l’assassinat de Thomas Becket, mais les rois surent « récupérer » l’évêque martyr pour leur propagande.

Politiquement, nous sommes à l’époque où les liens féodaux s’implantent en Angleterre, les Angevins viennent avec un système politique qui existe sur le continent, ce qui ne va pas sans poser des problèmes auprès des autochtones. Surtout, si en Angleterre, le roi n’a aucun supérieur au dessus de lui (sauf Dieu), il est obligé de prêter le serment vassalique au roi de France pour ses possessions sur le continent. De plus ses vassaux en France furent souvent d’une loyauté très changeante, car ils allaient vers leurs intérêts personnels et non vers ceux de leur seigneur. Et Philippe Auguste a parfaitement su les attirer vers lui.

Et que dire de la culture. Déjà, lors de son mariage avec Louis VII, Aliénor était entourée de troubadours et il en fut de même lors de son remariage, avec un homme qui lui aussi appréciait le « fine amour ». Les Plantagenêts furent aussi des bâtisseurs qui ont laissé un style propre, différent du français. Il suffit d’aller voir la cathédrale du Mans et bien sûr l’extraordinaire abbaye de Fontrevault où seul Jean ne put se faire inhumer. Bien sûr, tous ces édifices ont été remaniés, ont évolué, mais il en reste bien des traces et surtout ils montrent la spécificité du roman poitevin qui en est résulté.

Amaury Chauou, à partir d’une impressionnante documentation, nous décrit un univers différent de celui qui existait à l’époque dans le royaume de France, mais tellement pris dans des forces contradictoires qu’il ne pouvait durer longtemps. Mais un univers qui a grandement contribué aux fondements de ce qu’est devenu l’Angleterre et sa démocratie.

Les Plantagenêts et leur cour
Amaury Chauou

éditions Alpha / Humensis 11€

Illustration de l’entête: gisant d’Aliénor d’Aquitaine. Abbaye de Fontevraud

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