Marseille, 1962. Marseille, la ville tenue par la pègre en général et les frères Guérini en particulier. Marseille, la tête de pont de ce qui va devenir la French connexion grâce au professionnalisme de ses chimistes. Marseille en 1962, c’est le port qui reçoit des flots de réfugiés d’outre Méditerranée, des pieds noirs mais aussi des Algériens de tout bord politique. Marseille et la France, traumatisées par la fin de la guerre d’Algérie qui est le paroxysme des exactions de l’OAS et où commence d’apparaître une nouvelle organisation, créée avant tout pour protéger le général de Gaulle tant les projets d’attentats pour l’éliminer fleurissent un peu partout.
C’est dans cette ville, à la Police Judiciaire, que viennent d’être nommés Jacques Molinari, ancien résistant qui a participé à la libération de la ville en 1944, un homme d’ordre, gaulliste de la première heure, et le jeune Louis Anthureau. Son nom a lui seul fait partie de la culture épique de la ville. Ses parents communistes ont monté un réseau de résistance qui a été dénoncé. Si sa mère a pu s’enfuir, son père a été déporté. Il est revenu des camps, malade mais tout aussi combatif, et juste avant les élections municipales qu’il avait des chances de gagner, il décède brusquement. Elle, fidèle à ses engagements part soutenir le FLN en Algérie lui faisant bénéficier de sa formation de médecin. Mais entrant dans la clandestinité, elle abandonne son fils qui n’a plus de nouvelle d’elle depuis plus d’une dizaine d’années. Louis, fidèle à l’engagement familial est membre du parti communiste.
Voilà le cadre posé.
On découvre un, puis deux cadavres d’algériens vidés de leur sang. Molinari et Anthureau qui sont censés faire équipe sont chargés de l’affaire. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’ils n’ont pas toujours les mêmes méthodes et Jacques a une forte propension à garder des renseignements. En même temps un petit caïd se fait voler une livraison de plusieurs kilos d’héroïne base destinés à être affinés. Si la première affaire est en lien direct avec la guerre d’Algérie, elle trouve aussi comme la seconde ses racines profondes dans la résistance, ses fausses amitiés, les intérêts politiques primant sur l’efficacité.
Si Molinari reste aux ordres de ses supérieurs du SAC, Anthureau va voir son univers se transformer. Il retrouve sa mère qu’il doit aider et protéger, mais surtout, il finit par savoir qui a dénoncé le réseau de son père et les vrais circonstances de son décès. Son appartenance au parti communiste est alors totalement remise en cause.
Le roman est basé sur la découverte progressive du passé des deux protagonistes et leur face à face avec celui-ci, mais tout cela sur le fond de l’Histoire, celle de la France profondément divisée par la guerre d’Algérie et l’Histoire de Marseille, totalement pourrie par la pègre. Le patron à la mairie n’est pas le maire mais plutôt « Mémé » Guerini, lui aussi auréolé de ses actions durant l’occupation.
Le sang de nos ennemis est un roman policier facile à lire, comme je les aime, avec des personnages attachants et un fond historique qui permet de bien comprendre leurs actions, leurs réactions, leurs façons de penser et d’évoluer.
Le sang de nos ennemis
Gérard Lecas
éditions Payot-Rivage Noir . 21€
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