Accueil Actualités Les réseaux de la Police, fantasmes ou manipulations ?

Les réseaux de la Police, fantasmes ou manipulations ?

par Pierre de Restigné

Oui, il y a des réseaux plus ou moins « occultes » dans la police nationale. Il y en a aussi dans la gendarmerie, l’armée, les avocats, les médecins ou les polytechniciens, et que dire des associations d’anciens élèves des « grandes écoles ». Mais voilà, quand il s’agit de la police, de par son statut « extraordinaire », sa visibilité médiatique, l’amour immodéré de la population pour les faits divers dont elle représente plus des deux tiers, bien des fantasmes pèsent sur elle !

Et de fait, depuis le XIXème siècle, on ne compte pas les articles, les travaux journalistiques portant sur cette institution, ses turpitudes et ses réseaux secrets. Quand il s’agissait de réseaux de résistants durant la Seconde Guerre mondiale, ils furent couverts d’éloges (mérités), quand il s’agissait de « petits arrangements » entre amis, les critiques fusèrent, mais le summum, bien sûr, nous sommes en France, quand une brebis galeuse était reconnue comme étant membre de la Franc Maçonnerie, alors arrivent en courant les théories les plus absurdes du complot.

Frédéric Ploquin signe là un bon livre historique (il y a très peu d’affaires actuelles après le quinquennat de Nicolas Sarkozy et sur certains scandales qui ont touché l’institution policière ces dernières années. Une bonne recherche journalistique, bien documentée.

Il est toutefois utile de noter que la plupart des protagonistes, de fait, travaillaient dans la police dans un cadre « culturel » qui fut celui du début de leur carrière. La plupart n’ont fait que reproduire ce que leurs « patrons » faisaient et n’ont pas assimilé le fait que la police en particulier et la société en général avaient quelque peu évolué. Les « patrons » d’aujourd’hui sont bien plus surveillés que leurs prédécesseurs ; la multiplication des syndicats a abouti à ce que « les petits arrangements entre amis » sont beaucoup plus difficiles à mettre en œuvre. La police maintenant veut « laver plus blanc que le blanc ». Il est dommage que l’auteur ne fasse pas une référence au code de déontologie, mais surtout aux résultats des conseils de disciplines qui sont de plus en plus durs pour les auteurs. Un fait qui, il y a 20 ans, aurait valu au pire un avertissement peut ainsi devenir aujourd’hui une exclusion.

Olécio partenaire de Wukali

On sait que la police, tout comme la gendarmerie ou l’armée, a développé un esprit de corps très développé, ce qui, en soit, constitue un réseau interne d’entraide. Mais, bien sûr, depuis les fantasmes de l’Abbé Barruel, le réseau qui viole la loi, qui protège ses membres au mépris de toutes les règles, c’est bien sur la Franc-maçonnerie ! Et, à une exception près, toutes les affaires qui sont narrées dans ce livre, ont comme explication l’appartenance à la maçonnerie d’au moins un des protagonistes. Sincèrement parfois le lien est plus que très tenu (un seul sous-fifre suffit pour qu’il i ait suspicion d’une intervention de la Franc-Maçonnerie) comme le scandale de l’Association Nationale d’Action Sociale des personnels de la Police Nationale dont le président et bénéficiaire n’était pas « frère », ou la Firme autour de Nicolas Sarkozy.

Bien sûr me répondra-t-on, j’exagère, car on voit surtout des réseaux de copains de connaissances, des réseaux politiques, des réseaux mafieux, etc. Mais alors pourquoi faire allusion à l’appartenance à la maçonnerie de certains, même si cela n’a aucun rapport avec l’affaire ? Il est certains que certains juges ont systématiquement essayé de chercher les liens avec une obédience maçonnique dès qu’une affaire de corruption concernaient un policier. Fantasmes quand tu nous tiens !

Car se sont surtout des affaires de corruption, directes ou indirectes qui sont ici décrites. Il est indéniable, que certaines personnes entrent en maçonnerie non pour les principes qu’elle défend, mais avant tout par intérêt personnel. Les affairistes existent, c’est indéniable. Mais si la police cherche à couper ses branches pourries, il en est de même dans les différentes Obédience maçonniques (et ce n’est pas ce qui manque en France), même à la Grande Loge Nationale de France (qui est mise en cause dans ce livre dans les trois quarts des histoires), et ce n’est pas Alain Bauer, ancien grand Maître du Grand Orient de France, spécialiste de la police, « faiseur de carrières » au sein de l’institution aux vues de ses déboires actuels tant judiciaires que maçonniques qui le démentira. L’attrait de l’argent a toujours été un moteur, certains ont succombé à ses sirènes.

Mais l’immense majorité des francs-maçons refusent de renier leurs serments en entrant dans un quelconque réseau de pression ou d’intéressement, l’immense majorité des policiers maçons érigent une frontière infranchissable entre leur métier et leur engagement maçonnique. Bien des policiers francs-maçons, ont connu des carrières « normales », n’ont eu aucun coup d’accélérateur grâce à leur appartenance. Le croire c’est méconnaître un phénomène : la rencontre de celui qui aidera à la carrière. Le plus souvent, il n’y a aucune trace d’un quelconque lien avec la maçonnerie ; Henri Cuq, commissaire de police a été ministre (chargé des relations avec le parlement). Quand il était directeur départemental des renseignements généraux de la Corrèze, il a rencontré une certain Jacques Chirac : aucun lien avec la maçonnerie. Peut-on parler d’un réseau politique ou d’un lien d’estime voire d’amitié ? Je ne sais si Henri Cuq était franc-maçon, mais il est certain qu’il n’a pas été condamné !

Dans cette avalanche quelque peu brouillonne (qui finirait par faire croire à un vrai complot maçonnique au sein de la police), un seul réseau est vraiment à part : celui autour de Marine le Pen. Mais est-ce un réseau, quelle est sa structure ? Quels sont les liens entre ses membres ? Ce réseau concerne combien de personnes au sein de l’institution ? Voilà bel et bien des questions qui conviendrait à une étude sociologique (et non journalistique) pour apporter des débuts de questions.

Il ressort de ce livre que oui les hommes sont vénaux, que le pouvoir et l’argent attirent et que certains, dont des policiers, à titre individuel succombent à leurs sirènes au mépris d’une vraie éthique individuelle. Et c’est encore plus condamnable quand ces personnes sont des francs-maçons car ils se parjurent. Mais ont-ils une conscience ?

Les  réseaux de la Police
Loges, Influence, Corruption
Frédéric Ploquin

Nouveau Monde éditions 21 €90

WUKALI est un magazine d’art et de culture librement accessible sur internet
Vous pouvez vous y connecter quand vous le voulez

Votre meilleur soutien pour WUKALI: nous relayer sur les réseaux sociaux (voir leurs icônes en haut ou en contrebas de cette page)
Contact ➽  redaction@wukali.com

         

Ces articles peuvent aussi vous intéresser