Le mercredi 15 juin 2022, la danseuse et chorégraphe Carolyn Carlson était officiellement installée à l’Académie des beaux-arts [section de chorégraphie] par son confrère Laurent Petitgirard, secrétaire perpétuel et membre de la section de composition musicale.
Après que celui-ci eut relaté l’extraordinaire parcours de la récipiendaire, celle-ci le remercia fort poétiquement, ainsi que tous les membres de la prestigieuse institution qui l’accueillait en son sein. Propos heureusement illustré de très nombreuses séquences dansées – en direct ou bien filmées…
Son épée d’académicienne fut remise à Carolyn Carlson par l’éditrice et ancienne ministre Françoise Nyssen.
Elle rejoint donc aujourd’hui Blanca Li, Thierry Malandain et Angelin Preljocaj, élus le 24 avril 2019. L’Académie compte également parmi ses membres le chorégraphe néerlandais Jiří Kylián (élu membre associé étranger de l’Académie le 25 avril 2018) ainsi que Didier Deschamps et Dominique Frétard, correspondants de la section de chorégraphie.
Rappelons que Carolyn Carlson née en Californie en 1943, se définit avant tout comme une nomade. De la baie de San Francisco à l’Université d’Utah, de la compagnie d’Alwin Nikolais à New York à celle d’Anne Béranger en France, de l’Opéra de Paris au Teatrodanza La Fenice à Venise, du Théâtre de la Ville à Helsinki, du Ballet de l’Opéra de Bordeaux à La Cartoucherie de Paris, de la Biennale de Venise à Roubaix, Carolyn Carlson est une infatigable voyageuse, toujours désireuse de développer et faire partager son univers poétique.
L’épée de Carolyn Carlson a été réalisée par Gilles Nicolas. Sa poignée et sa lame sont fabriquées en bambou (de diamètres différents), la garde symbolise un gros coquillage et le pommeau est en aventurine (pierre verte translucide). Son habit a été créé par la maison de couture agnès b..
Nous vous rapportons les deux discours prononcés lors de cette cérémonie d’installation, d’une part celui de Laurent Petitgirard, puis de la récipiendaire Carolyn Carlson
Discours de Laurent Petitgirard
Chère Carolyn Carlson,
J’ai gardé en mémoire la force poétique qui émanait de vous lors de la présentation de Dialogue with Rothko au Théâtre National de la Danse de Chaillot. La présence du violoncelliste Jean-Paul Dessy, qui en avait composé la musique, votre incroyable osmose avec cet instrument au milieu des lumières de Rémi Nicolas et des costumes de Chrystel Zingiro m’avaient fortement impressionné. Je pense, quand je revois ce ballet dans ma mémoire, à une phrase de vous, que j’ai lue plus tard et que j’ai notée : Je ne danse pas pour les yeux, je danse pour l’âme.
On pourrait se dispenser du discours que vous allez devoir subir, Mesdames et Messieurs, tant cette évidence que vous avez exprimée, Chère Carolyn, résume votre vie, surtout si l’on tient compte de ce que vous dansez avec votre corps, bien sûr, mais aussi avec les mots, avec le dessin, avec le cœur jusqu’en avoir le vertige.
Précisons tout de suite qu’il n’est nullement question de faire une exégèse de votre œuvre, la tâche serait immense et aurait imposé de prévoir des sacs de couchages sous la Coupole, idée à laquelle je ne sais pourquoi notre cher chancelier Xavier Darcos semble réfractaire. Je vais donc devoir survoler votre vie en m’arrêtant parfois au gré d’une émotion sur des œuvres et des relations humaines qui ont marqué votre carrière, disons plutôt votre existence car je doute que le mot carrière vous plaise beaucoup.
Précisons tout de suite que le nombre important de titres de vos ballets en anglais va permettre à vos amis et admirateurs de comprendre pourquoi vous m’avez fait l’amitié et l’honneur de me demander de vous recevoir sous cette Coupole, vous cherchiez évidemment un académicien avec un accent français aussi prononcé lorsqu’il parle anglais que le vôtre lorsque vous vous exprimez en français.
Votre grand-mère finnoise vous racontait des contes et des légendes tirés du Kalevala, nul doute que cette épopée qui s’ouvre par l’évocation de la création du monde a été source de grandes émotions en stimulant votre imaginaire.
Serait-ce cet univers qui vous a inspiré le ballet Dark, créé en 1988 sur une musique de Joachim Kühn au Théâtre de la Ville à Paris ? Ce ballet, très impressionnant, et que son titre décrit parfaitement, évoque l’Apocalypse.
Sa violence a dérouté certains, mais les cent mille spectateurs qui l’ont découvert lors de plus d’une centaine de représentations ont eu la chance d’assister à l’un des temps forts de la danse contemporaine à la fin du siècle dernier.
Au sein de cette communauté finlandaise qui se réunissait le dimanche dans votre maison, votre père vous faisait danser et vous adoriez ces moments où vous pouviez laisser libre court à votre imagination dans de grandes improvisations. Il était vétérinaire, vous avez donc vécu au milieu de toutes sortes d’animaux, votre mère jouait du piano et chantait, la musique vous a passionnée très tôt, vos deux frères jouent du violon, de la clarinette, de la guitare et même du saxophone.
Vous avez très jeune participé à plusieurs concours de danse. Suis ton cœur et fais ce que tu aimes, vous disait votre père que vous avez eu la douleur de perdre alors que vous n’aviez que quinze ans. Sa disparition a été un choc très fort, « je ressens toujours sa présence », expliquez- vous.
Dans les deux années qui suivent vous abandonnerez les études de danse classique, vous les reprendrez plus tard à la San Francisco School of Ballet.
La mer vous a toujours fascinée, vous y ressentez la force comme la violence du ressac et la nécessité d’accompagner ce mouvement perpétuel.
« La danse c’est ma vie », dites-vous après avoir vu L’Oiseau de Feu dans la chorégraphie de Georges Balanchine au début des années 50. Cette vie, votre mère en avait rêvé pour vous, vous l’avez réalisée.
Vous découvrirez la Finlande à 18 ans et vous aurez l’impression de la connaître depuis toujours. La lumière blafarde de la nuit finlandaise vous fascine. Vous retrouverez la Finlande en 1991, vous y créez pour le Ballet de l’Opéra National Maa, première de vos fructueuses collaborations avec la compositrice Kaija Saariaho.
Je suis heureux de vous annoncer que le 18 mai 2022 notre Compagnie a élu Kaija Saariaho Membre associé étranger de l’Académie des beaux-arts au siège qu’occupait Philippe Roberts-Jones.
A partir de 1963 vous suivez à l’université de Salt Lake City les cours de Shirley Ririe et de Joan Woddbury, toutes deux élèves de Alwin Nikolais tout en suivant des cours de philosophie de l’Art.
Vous avez déjà réalisé quelques chorégraphies durant votre séjour dans cette université dans laquelle vous découvrez le travail de la chorégraphe et pédagogue Anna Sokolow, venue créer une pièce avec les étudiants. Cette rencontre vous offre l’occasion d’interpréter votre premier solo.
Mais lorsque le Maître est venu en personne dans votre université, vous expliquez avoir vécu deux semaines inoubliables.
Il y a là une rencontre, peut-être même la rencontre essentielle de votre vie, qui va vous marquer à jamais. Je ne m’étendrai pas sur cette collaboration car je suis certain qu’Alwin Nikolais va avoir une part importante dans votre discours. Toujours est-il qu’en 1965, dès la fin de ce stage vous quittez la Californie pour venir, sur sa proposition, suivre son enseignement à New-York.
Évidemment les conditions de vie seront radicalement différentes de celles, confortables, dont vous bénéficiez auparavant. Vous demeurez dans un quartier déshérité de New-York et vous devez assumer seule votre existence. Vous vous pliez à l’intensité du travail artistique qu’exige Alwin Nikolais de ses danseuses et danseurs, vous devenez l’interprète idéale de sa création. Mais dans le même temps il va vous inciter à présenter votre travail dans des lieux alternatifs de New-York.
Quelque soit l’admiration sans bornes que vous avez pour lui, vous sentirez la nécessité de vous émanciper de l’univers d’Alwin Nikolais et, à la fin de 1971, avec le soutien du scénographe et créateur lumières John Davis, vous quitterez New-York pour la France. Vous êtes nommée chorégraphe, puis directrice de la Compagnie Anne Béranger à Paris.
En 1972 à Avignon, dans la Cour d’honneur du Palais des Papes vous présentez avec la compagnie Rituel pour un rêve mort. Ce sera un choc, le public est saisi, les critiques sont enthousiastes et vous reviendrez régulièrement vous produire à Avignon dans les années suivantes. C’est au sein de la compagnie Anne Béranger que vous rencontrerez le danseur qui sera votre double masculin tout au long de sa carrière : Larrio Ekson
Vous quitterez la Compagnie Anne Béranger pour aller enseigner à Londres et pour concevoir une chorégraphie pour le London Contemporary Dance Theater.
Rolf Lieberman vous avait repérée en 1973 à Hambourg où il avait programmé Kyldex, ballet d’Alwin Niklolais sur une musique de Pierre Henry et les sculptures de Nicolas Schöffer dans lequel vous dansiez. Rolf Lieberman considère que la musique est trop négligée à l’Opéra de Paris dont il vient de prendre la direction.
Il nomme Marius Constant directeur de la Musique. L’une de ses premières initiatives sera un cycle Varèse. C’est notre cher Hugues Gall qui sera chargé de venir vous convaincre et on ne le remerciera jamais assez d’avoir réussi. Vous présentez un solo sur Density 21.5 qui va marquer les esprits. Cette œuvre d’à peine plus de 4 minutes pour flûte seule d’Edgar Varèse est extrêmement tendue et sa brièveté vous incite à la faire précéder d’une danse sans musique de trois minutes.
Rolf Lieberman va vous nommer en 1974 Etoile-Chorégraphe de l’Opéra.
Évidemment ce serait un doux euphémisme de dire que cela a créé certains remous, on devrait plutôt parler d’une bronca et d’un véritable traumatisme pour celles et ceux qui voulaient avant tout que l’Opéra de Paris reste le temple de la danse classique. Mais Rolf Lieberman tiendra bon, il acceptera votre exigence de travailler avec un groupe restreint de danseuses et danseurs choisis par vous et ouverts à votre approche, ainsi que celle de prodiguer un enseignement que vous ouvrirez également à des artistes extérieurs.
C’est la naissance du GRTOP, le Groupe de Recherche Théâtrale de l’Opéra de Paris. On verra arriver à l’Opéra de Paris des musiciens plutôt inhabituels que vous alliez chercher aussi bien dans l’univers du jazz que dans le métro.
On raconte même que Rolf Lieberman est venu demander à votre joueur de cornemuse de jouer un peu moins fort car il gênait une répétition d’orchestre d’un opéra de Mozart. Vous travaillez avec le saxophoniste John Surman et son groupe S.O.S. pour la première création de la compagnie Sablier Prison sur des photos de Jean-Loup Sieff.
Le ballet sera présenté, dans une scénographie de John Davis, à peine 3 mois après votre prise de fonction, Rolf Lieberman le programme à 18h30 et à tarif réduit afin d’attirer un nouveau public ce qui vous réjouit.
Vous êtes alors passionnée par La Poétique de l’Espace de Gaston Bachelard, philosophe qui vous a fortement marquée et inspirée. Ses écrits servent non seulement de base à votre travail, ils vous permettent également de sensibiliser les étudiants à votre approche.
Le psychanalyste Thierry Delcourt, qui vous a consacré une magnifique biographie poétique, dont j’avoue qu’elle a été une mine d’or dans la préparation de ce discours, décrit ainsi l’influence de Gaston Bachelard sur votre travail :
Il est le support d’une partie de la conceptualisation de sa création.
Ce poète et philosophe lui a permis de formuler et de conforter la place essentielle de l’image matérielle, déjà là par sa présence réelle et symbolique, comme le sont une fenêtre ou une porte. Cette image matérielle aide Carolyn à construire ses images poétiques et sa poésie visuelle durant tout son parcours de création.
Comme certainement de très nombreux artistes présents aujourd’hui, vous avez reçu un choc à la découverte du Regard du Sourd de Bob Wilson, créé en 1971 au Festival de Nancy.
Cette incroyable dilatation du temps et de l’espace nous a toutes et tous interpellés, comme si l’on se retrouvait devant une partition sans barre de mesure, voir même sans notes, avec le sentiment d’un vertige au ralenti contrôlé. Vous allez transposer dans la danse cette vision théâtrale nouvelle.
A l’Opéra vous collaborerez avec le compositeur Igor Wakhévitch et la chanteuse Eve Brenner dont l’incroyable tessiture a marqué de nombreux compositeurs.
Après Spar, L’Or des fous, Les Fous d’or ou encore X-land vous allez présenter en 1976 Wind, Water, Sand, pièce en 37 actes avec une scénographie de Petrika Ionesco.
Vous découvrirez alors qu’un ballet de 37 actes ne correspond pas exactement aux habitudes des musiciens du magnifique Orchestre de l’Opéra de Paris qui peuvent être parfois très facétieux.
Les chefs d’orchestre qui ont dirigé le Sacre du Printemps à l’Opéra ont souvent été surpris d’entendre comme un murmure accompagnant les fameuses 5 notes de trompette basse qui, juste avant la Danse Sacrale, dialoguent sur fond de timbales et de pizzicati de violoncelles avec la flûte en sol.
Le fait est que cette trompette basse est un instrument peu utilisé que pratiquait notamment un tromboniste, promu intendant de l’orchestre et que l’on voyait donc assez rarement au milieu de l’orchestre.
Mais voilà, qui dit instrument rare dit supplément, l’intendant ne ratait donc aucune représentation du Sacre du Printemps et à chaque fois qu’il lançait fièrement mi-fa-fa#- sol-sol# ses collègues susurraient discrètement « soixante-quinze pour cent… »
En 1977, devenue beaucoup plus raisonnable, vous présenterez un spectacle de 5 heures composé de 5 pièces This, That, The Other, The End, The Beginning.
De retour du Japon vous créerez The Year of the Horse d’inspiration bouddhiste avec le calligraphe Hachiro Kanno, Petraka Ionesco et la musique de Jean Schwarz.
Cette inspiration bouddhiste vous la partagerez avec le compositeur Alain Kremski, mon merveilleux grand frère malheureusement disparu il y a trois ans. Il avait été passionné par votre collaboration au Musée Guimet et je comprends que l’univers sonore à la fois poétique et mystérieux qu’il dégageait de sa collection de bols tibétains vous ait séduit.
Il avait comme vous une extraordinaire capacité à espacer le temps et à conduire le spectateur vers une véritable introspection. Alain avait reçu le Premier Grand Prix de Rome en 1962 sous cette Coupole, c’est donc très émouvant de le revoir avec vous, ici-même, 60 ans plus tard.
Vous récuserez la proposition de Rolf Liebermann de créer le ballet The Architects sur une musique de Mozart, vous lui préférerez Bach, la musique vous contraignant à un certain académisme, mais que voulez-vous chère Carolyn, le public a adoré.
Pour le ballet Slow, Heavy and Blue, créé en février 1980 à l’Opéra Garnier avec 9 danseurs du ballet de l’Opéra, René Aubry va composer une musique répétitive. L’un de vos poèmes en est la base :
Le soleil se levait lentement La terre devenait lourde
Et la pluie bleue
Vous quittez Paris en 1980 pour passer 4 années à Venise où vous fondez le Teatro danza la Fenice.
Parmi les nombreuses créations que vous y ferez avec René Aubry, signalons Aleksi Aubry, votre fils devenu également compositeur.
La cité lacustre vous fascine, l’omniprésence de l’eau est grisante, ce sera Undici Unde, onze vagues, créé en 1981 au Teatro Malibran, qui démontre le chemin parcouru en une seule année avec la jeune troupe italienne, puis Underwood en mars 1982, enfin la création du solo Blue Lady qui va marquer les esprits lors de sa présentation à la Fenice le 10 octobre 1983.
Votre relation à l’improvisation est passionnante. On mélange souvent tout lorsque l’on aborde ce sujet. A cet égard votre improvisation s’exprime dans un cadre poétique, dans la perception d’une situation que vous avez prédéfinie et qui sera l’ossature de vos ballets. Elle n’a rien à voir avec l’improvisation d’un jazzman sur une grille harmonique ni avec certaines démarches qui trouve dans l’improvisation une échappatoire à l’angoisse de la création.
Ce n’est évidemment pas votre cas, vous n’avez pas peur de fixer une chorégraphie mais vous semblez ressentir en permanence un besoin de liberté pour sortir d’une forme figée. C’est un problème que nous connaissons bien en musique et en prenant en exemple deux éminents membres compositeurs et organistes de notre Compagnie, Olivier Messiaen et Thierry Escaich, tous deux formidables improvisateurs et compositeurs, si leurs concerts d’improvisation ont apporté beaucoup de plaisir et d’émotions, c’est leur œuvre écrite qui constitue, selon moi, la force et la pérennité de leur musique.
Ce n’est pas un hasard si vous avez chorégraphié et interprété autant de solos, c’est probablement la forme ultime de la liberté écrite. Je pense à Solo Donna, les 4 solos que vous avez présenté en 1999 à la Biennale de la Danse de Venise, dansés par Nina Hyvärinen, Carla Fracci, Talia Paz et vous-même, sur des musiques de Kevin Volans, John Adams, Loreena McKennitt et Luigi Nono. Avec Luigi Nono, dont l’abstraction de la musique ferait passer celle de Pierre Boulez pour une aimable berceuse pour enfants, il faut admettre que vous n’avez pas craint de vous confronter aux formes les plus ardues de l’avant-garde musicale.
Vous revenez à Paris en 1985 à l’invitation de Gérard Violette et du Théâtre de la Ville où vous créerez Still Waters, Dark que j’ai déjà évoqué et Steppe.
Après l’épisode finlandais, vous retrouvez la France en 1993 avec le solo Don’t look back sur une musique de René Aubry, dansé par Marie-Claude Pietragalla et le ballet Commedia, sur une musique de Michel Portal.
Vous acceptez ensuite la direction pour une année du ballet Cullberg à Stockholm
En 1995 au Théâtre de la Ville vous présenterez Vu d’ici, 5 portraits de femmes où vous mettez en scène sur une musique de Gabriel Yared, disons plutôt 5 visions d’une même femme qui traversera toutes les émotions, de la nostalgie à la violence, du mystère à la sauvagerie, de la folie au mysticisme.
Il y a un ballet, resté célèbre, qui nous concerne tout particulièrement aujourd’hui, c’est Signes, fondé sur les décors et costumes du peintre Olivier Debré, que nous avons élu dans la section peinture le 17 mars 1999 quelques mois à peine avant sa disparition, qui ne nous aura pas laissé le temps de le recevoir sous cette Coupole.
C’est la chère Brigitte Lefèvre qui a suggéré à Olivier Debré, venu lui présenter son magnifique projet, de vous en confier la chorégraphie. Olivier Debré avait non seulement conçu les décors et les costumes, mais il avait également une conception très précise de la mise en scène à laquelle ils correspondaient. Nul ne sera surpris de savoir qu’il n’était pas question pour vous de vous plier aux concepts de mise en scène de ce grand peintre, la confrontation sera intense, d’ailleurs vous changerez le titre qui de Sourires, allusion à la Joconde, deviendra Signes. Vous confierez la musique à René Aubry et les lumières à Patrice Besombes. Oubliées les tensions passées, l’osmose avec le ballet sera totale.
Rentré au répertoire de l’Opéra de Paris Signes, après sa création en 1997 par Marie-Claude Pietragalla et Kader Belarbi sera repris en 2000, 2004, 2008, 2013 et bientôt en 2023 à l’Opéra de Paris.
En 1999 Paolo Baratta vous confie la direction artistique de la première Biennale de la Danse de Venise, vous élargirez l’aventure avec la création d’une école de danse, l’Academia Isola Danza, conduite en collaboration avec Simona Bucci.
Parallèlement à l’expérience de Venise, vous fondez en 1999 avec Pierre Barnier, l’Atelier de Paris-Carolyn Carlson à la Cartoucherie, avec le soutien de la Ville de Paris. Plaçant la transmission au cœur de son projet artistique et pédagogique, l’Atelier de Paris rassemble professionnels et publics dans un même esprit de partage et d’échange.
Lorsque vous prendrez, fin 2004 la direction du Centre Chorégraphique National de Roubaix, vous serez confrontée à problèmes administratifs inhérents à cette fonction, qui sont si éloignés de vous. Avec l’aide de Claire de Zorzi et d’Olivier Perry vous allez vivifier cette structure.
Ce sera en 2005, après une année de travail Inanna, du nom de la déesse sumérienne, que l’on pourrait se risquer à résumer ainsi : Dieu est une femme. Le CCN de Roubaix, soumis au rythme effréné de créations que vous lui imposez, va devenir une référence. Vous y inviterez des consœurs chorégraphes que vous connaissez bien, Malou Airaudo et Caterina Sagna ou encore en 2009 le danseur chorégraphe hip-hop Brahim Bouchelaghem dont vous accueillerez la compagnie Zahrbat.
Après deux solos dédiés à Sara Orselli et Céline Maufroid vous vous associez à Bartabas pour we were horses avec, en plus des danseurs, les écuyers et chevaux de l’Académie du spectacle équestre de Versailles.
L’aventure du CCN de Roubaix s’achèvera en 2013 avec Dialogue with Rothko, Woman in a room pour Diana Vichneva et le duo all that falls pour Céline Maufroid et Juha Marsalo.
Aujourd’hui, vous dirigez la Carolyn Carlson Company, qui a été en résidence au Théâtre National de Chaillot de 2014 à 2016. Toujours inspirée par l’œuvre de Gaston Bachelard L’air et les songes, vous créez Pneuma, sur une musique de Gavin Bryars, en mars 2014 pour le Ballet de l’Opéra de Bordeaux, ainsi que Now, inspiré par La poétique de l’espace, pièce pour 7 danseurs sur une musique de René Aubry.
Vos collaborations avec les hommes qui ont été les plus proches de vous ont toujours été extrêmement fructueuses.
Il est vrai qu’il y a une dimension fusionnelle dans les couples d’artistes ce qui rend leurs collaborations exaltantes.
Mais il peut aussi y avoir parfois d’autres raisons plus secrètes. Je dois vous avouer que lorsque j’ai dirigé pour la première fois Sonia Petrovna dans Jeanne au Bûcher d’Arthur Honegger et Paul Claudel, outre l’intense bonheur artistique, il y avait la jouissance absolue de pouvoir enfin mener l’amour de ma vie à la baguette…
Vous continuez pendant toutes ces années à chorégraphier, enseigner, transmettre, comme par exemple votre célèbre solo Density 21.5 à Isida Micani.
En 2021 vous achevez votre cycle de pièces inspirées par Gaston Bachelard Des fragments d’une Poétique du feu avec une dernière pièce pour votre compagnie, The Tree (Fragments of Poetics on fire), rêverie poétique pour 9 danseurs, lumières de Rémi Nicolas, peintures de Gao Xingjian, une partie des musiques étant composées par votre fils Aleksi Aubry-Carlson.
Il est clair, même si cela a pu un moment déstabiliser le compositeur qui a l’honneur et le plaisir de vous recevoir aujourd’hui, qu’à la différence d’autres chorégraphes la musique ne semble pas être votre première source d’inspiration.
Elle doit s’inscrire dans un projet poétique dont elle ne sera qu’une composante au même titre que la scénographie, la lumière, les costumes et bien sûr la chorégraphie. C’est un univers artistique entier qu’il faut appréhender et c’est cela qui est fascinant dans votre personnalité.
Parallèlement à la danse, vos créations graphiques ont été exposées à La Piscine, le magnifique musée de Roubaix, au Musée Toulouse Lautrec d’Albi, chez agnès b. à Paris en 2018, à la Chapelle du Méjan à Arles en 2019 ou encore à la galerie Isabelle Gounod à Paris en 2021.
Il faut bien sûr citer votre œuvre poétique abondamment publiée Le Soi et le Rien , Solo, Poèmes et encres Inanna,
Brins d’herbe, Dialogue avec Rothko, Traces d’encre, Writings on Water et tout dernièrement Au bord de l’Infini.
Ainsi que nous le dit si élégamment votre ami José Sasportes :
En accueillant Carolyn Carlson, qu’elle soit silencieuse ou poétiquement active, vous allez profiter du pouvoir de sa présence, comme elle profitera du savoir et des émotions qui s’expriment dans cet hémicycle.
Mais au moment de vous passer le relai, chère Carolyn et d’entendre tout ce que vous allez nous raconter de la vie, de la danse, de la poésie, je dois vous avertir : Vous n’allez pas pouvoir, selon votre charmante habitude et sauf pour citer des extraits de vos poèmes, alterner les phrases dans les deux langues, vous êtes condamnée au français, ou presque. Alors dans mon immense mansuétude j’ai demandé à notre huissier d’apporter une dizaine de pièces de monnaie. A chaque disgression en anglais vous devrez en glisser une dans la tirelire, une fois passée la dixième, plus rien ne vous sera autorisé. Il fallait bien à la fin de discours que j’essaye de brimer l’une des créatrices les plus libres et les plus inspirées de son temps, que nous sommes particulièrement fiers et heureux d’accueillir parmi nous.
Bienvenue chère Carolyn, votre aide nous sera précieuse pour stimuler et aider la création de tous ces jeunes artistes qu’il est de notre mission de soutenir.
Discours de Carolyn Carlson
Chers membres de l’Académie des beaux-arts, consœurs Blanca Li, confrères Thierry Malandain, Angelin Preljocaj, Jiri Kylian, Maurice Béjart et Serge Lifar,
Merci Laurent pour votre texte plein d’ironie sur mon parcours, et votre idée géniale pour la tirelire.
Je dois cet honneur à mes parents, frères et grands-parents, dont le dévouement et l’amour leur ont permis de supporter mes passions. Ma gratitude va à tous ceux qui m’ont inspirée parmi des milliers de chemins : magnifiques danseurs, brillants compositeurs, éclairagistes, artistes visuels, poètes et bien sûr toutes mes équipes derrière la scène, impresari, producteurs, managers, directeurs de théâtre, institutions, généreux public.
C’est un grand privilège d’avoir été choisie comme membre de cette prestigieuse institution dans la catégorie chorégraphie.
L’art éphémère de l’expression. La présence de l’essence sans mot.
Prémonitions
J’ai entendu une voix venue des profondeurs salées…
Tu seras une nomade, une passeuse, une enfant perpétuellement émerveillée
Tu vivras au bord des eaux et des forêts, tu marcheras sur des pierres rugueuses
Tu trouveras dans des rêves insoupçonnés de mystiques royaumes où inventer
Tu accompagneras ton Père dans sa mort à 46 ans avec ses mots pour viatique : « fais selon ton cœur »
Tu partiras vers l’est où un Maître t’attend
Tu franchiras les océans vers une terre étrangère où l’art façonnera ta destinée
Tu lutteras pour atteindre le plus haut de toi-même dans la création au prix de périlleux défis
Tu te trouveras danseuse au cœur tremblant sur les terres du doute tenue au fil de ton humanité fragile
Tu sentiras un feu monter en toi, de la plante des pieds au sommet de la tête tourbillon de flammes
montantes, présence incandescente
…Mystérieux pouvoir qu’aucun philosophe ne saurait expliquer
Tu porteras un gène qui autorise un brin de folie… Poèmes insensés pour que danse un corps
Tu seras le charpentier aux outils spirituels qui cloue des visions dans le corps des choses… Liens
indestructibles avec Tout ce qui Est
Tu constitueras ton essence dans le travail des perceptions et des rêves – artiste jamais en repos
Maintenant tu raconteras ton histoire…
Qui suis-je en tant qu’artiste ?
Je vous fais part ici de mes expériences mystiques, voir le monde avec des yeux émerveillés.
En 1910, lorsque la Russie a envahi l’est de la Finlande, mes grands-parents se sont courageusement mis en chemin, en émigrant en Amérique. J’appartiens à cette culture d’âmes passionnées et braves. Je suis la riche héritière de musiciens et de conteurs.
J’ai eu le privilège très jeune de pouvoir me lancer dans des danses improvisées au rythme de chants traditionnels finlandais et sur la musique de Johan Sibélius. Chaque rassemblement se transformait en fêtes spontanées pour rendre hommage aux traditions finlandaises.
Californie
Face à l’Océan Pacifique j’étais cette enfant qui regardait médusée les grandes vagues s’effondrer sur le rivage dans un grondement de tonnerre et ne s’évanouir dans le sable que pour renaître encore et encore, perpétuel élan de flux et reflux.
Je percevais comme éternel cette suspension du temps, rêvant que notre vie était un cercle sans début ni fin, faite seulement d’instants toujours recommencés.
Imaginez la jeune scoute que j’étais dans les camps d’été de la montagne de Yosémite. Imaginez un séquoia vieux de 3000 ans aussi vaste et haut que cette coupole. Immensité bouleversante.
Ecoutez les courants furieux se jeter sur les roches.
Regardez les étoiles voltiger tout là-haut.
Sentez la forêt, qui s’étend sur la montagne, souvenir de l’effort d’atteindre le sommet.
Sentiment de ne faire qu’une avec la nature.
J’étais l’océan, l’arbre, la rivière, les étoiles, la montagne.
Imagination de visions intérieures, inexplicable, où se mêlent les inventions de ma perception.
Les années dans l’Utah, une étendue de vastes déserts-espace et silence infinis où l’on devient un point minuscule sur l’horizon. Humilité face à l’éternité.
Contemplant le grand canyon pour la première fois, j’eus le souffle coupé-des larmes coulèrent sur mon visage.
La création d’une œuvre d’art phénoménale de la nature.
Au bord du gouffre, l’envie me prit de sauter dans le vide.
Comme l’a dit Carl Jung : “on ne désire rien tant qu’être submergé par l’infini”.
Toutes ces expériences ont laissé en moi une marque indélébile.
Comme chorégraphe, toutes mes créations sont inspirées par ce lien indivisible de la nature et ses forces.
Le prochain extrait de la pièce Now montre plusieurs moments de sérendipité, qui ont permis de développer l’instinct créatif.
Un coup de pinceau, un mouvement inattendu des touches sont au hasard improvisées
même beauté accidentelle dans la Nature
cette façon de peindre le monde comme il advient.
Années 60 New York…
Andy Warhol, Rauschenberg, Pollack, Allen Ginsberg, William Burroughs, John Cage, Philip Glass, Laurie Anderson, Bob Dylan, Merce Cunningham, Meredith Monk, Trisha Brown, Lucinda Childs…
La génération hippie en plein swing de liberté, curiosité collective d’artistes créatifs. Une valse délirante où tout était possible.
J’ai rencontré mon maître Alwin Nikolais. Un génie d’invention révolutionnaire pour la danse- théâtre, qui créait chorégraphie, musique, lumières, décors et costumes. Tout était directement inventé sur scène au théâtre Henry Street.
Le nez comme un aigle des yeux bleus persans, centre de l’imaginaire.
Un homme impliqué, en quête de…trajets surréalistes
entre les bords du cadre lunettes cerclées de noir
il travaille dans la fumée mène qui regarde à l’extase synchronicité d’une affinité programmée
Il a allumé une étincelle dans mon cœur et mon esprit. Il m’a ouvert une porte qui ne s’est jamais refermée. L’avenir était tracé.
Dans le concept de danse de Nikolais, il n’y avait pas des pas à apprendre. Il développait les principes abstraits et universels pour trouver « le geste unique ».
L’abstraction pour Nik, n’élimine pas l’émotion. Les présents les plus grands donnés à l’homme sont sa capacité de penser en termes d’abstraction et sa capacité de transcendance. De ceux- ci, il fait dériver son pouvoir d’imagination.
LE TEMPS: le temps qui passe, le rythme, l’immobilité
L’ESPACE: la distance, la proximité, le volume
LA FORME: densité sculpturale
MOTION: mouvement perpétuel comme la respiration, les battements du cœur.
L’IMPROVISATION sur ses principes nous permettaient d’écouter nos instincts créatifs. Un sens de l’urgence d’actes spontanés, servant la forme.
Balayée l’inflation de l’ego, glissée sous le tapis du « je » danse. La forme est le message. Un moi émergé dans la transcendance. Miraculeuse découverte.
Dans toutes mes œuvres, je suis le processus créatif de mon maître: pour point de départ, les gestes spontanés nés d’une idée. Je suis stupéfaite de voir les différentes approches d’un même thème dans les improvisations singulières de mes danseurs… C’est cela qui donne l’élan pour qu’advienne une force d’invention collective.
Et maintenant en vrai…
Pendant cette période, j’ai rencontré le Bouddhisme zen… Dans des séances de méditation, nous étions assis devant une page vide, un pinceau d’encre noire dans la main, regardant le vide, et avec un seul geste… une trace. C’est vous à ce moment-là…sans jugement.
un geste sur le papier
une danse dans l’air…………..
John Davis, assistant de Nik pour les lumières, m’a dit « dessine tes idées et écris tes poèmes pour partager avec les autres le début d’une création »…et depuis ce jour c’est une de mes clefs, comme un rituel pour mon travail.
Le regard sur mes chemins spirituels et ceux de mon maître sont liés pour un voyage de la perception vers l’impact visuel.
Inspiration : Mark Rothko, le créateur des espaces de communication imaginaires entre l’artiste, le peintre et le observateur, où personne ne peut définir la perception de l’image observée.
NOIR DONT ON DIRAIT QU’IL SCRUTE L’ÉTERNITÉ Tremblement pour la main qui peint
Pour la main qui se tend
La main qui est
A l’Opéra de Paris, sous l’aile de Rolf Libermann, comme vous l’avez dit, cher Laurent, et sans la complicité de John Davis, philosophe, poète, éclairagiste, je n’aurais pu prendre le risque d’être chorégraphe à l’Opéra. Ses idées brillantes et sa clairvoyance, et les discussions avec les danseurs basées sur les théories de Nikolais furent capitales pour la nouvelle génération.
Un début à la Rotonde de l’Opéra qui a bâti ma destinée.
Pierre d’angle : liberté, courage, risque, innovation
une étincelle met le feu au sous-sol
tout était désert brûlant. Tout était porte ouverte
capteurs de prémonition pris dans les tourbillons du changement intervention divine imprévue empreintes embryonnaires pour la postérité.
Rêves
En tant que créatrice d’images mes rêves font partie intégrante des moyens que je mets en œuvre, eux qui viennent aux heures obscures de la nuit d’un univers où tout expérience se vit hors du temps.
Nos rêves nous projettent dans un monde de symboles universels qui concernent à la fois la plus intime réalité de chacun d’entre nous et le fond archétypal commun.
Venise…
Changement de schéma. Semences organiques. Oxygène italien. Etrange prémonition de… convergence. Echos de pas sur la pierre, flots miroitant d’un courant mystique et des siècles obscurs des lagunes vénitiennes, mémoire karmique des souvenirs lavés.
Une autre génération d’artistes en herbe apprend son enseignement, reçoit les dons laissés en héritage…
La passion forcenée de l’instinct et de la quête. Dynamite et dentelle
Artisans de la danse qui produisaient leur propre génie.
René Aubry, un artiste, compositeur poète, capturant intuitivement l’esprit de chaque pièce, m’a accompagnée dans ces années de prolifiques créations vénitiennes. Nous étions une fusion de musique et mouvement. Après la naissance de notre fils, j’ai créé le solo « Blue Lady », basé sur les saisons de la vie, notre fragilité et le voyage de notre brève existence.
Des années plus tard, La Biennale de Venise (teatro Verde)
En tant qu’art, la danse fouille la part abstraite des phénomènes, saisie de l’espace- temps…comme tenté de retenir son souffle à l’instant où il s’échappe, un clignement de l’œil , un courant dans la rivière…une danse advenait par elle-même.
Mes racines connaissent la folie et l’absurdité de l’esprit finlandais. Et maintenant un vrai finnois :
Existence
Événement théâtral spontané
où chacun doit jouer son rôle
interagir dans son propre espace-temps quant à l’intrigue entière liberté.
Il n’y aura pas de répétition.
Il y aura des spectateurs
ceux-ci proches ceux-là lointains.
Ce qui advient n’advient qu’une fois.
Vous pouvez si nécessaire varier les thèmes mais sur le chemin tracé…
Vous serez l’auteur de cet
Événement
Vous serez aussi bien le producteur
que le créateur des accessoires, du décor de la musique, des lumières, des costumes Vous jouerez tous les rôles du début à la fin du spectacle : magicien, comique, tueur,
la victime, le beau gosse, l’énigmatique, le défi
À vous les avatars infinis de l’émotion et de la pensée
Le plus ardu : imaginer la fin…
Bon voyage…
Il n’y aura pas de répétition.
Toutes les routes ramènent en France
Graines semées, qui deviendront arbres immenses de verdure, de fleurs et de rêve.
10 000 heures passées dans l’obscurité…lumière, son, mouvement, silence. Ainsi va le monde de théâtre en théâtre, nos lieux sacrés.
Les femmes qui dansent
Crossroads to Synchronicity
L’artiste se voue à un besoin intrinsèque de s’exprimer, là où le personnel et l’universel vital. Depuis le début, ma quête a été de chercher l’essence spirituelle en l’homme, d’offrir les clés cachées de l’illumination, lumière dans l’élan qui porte une âme à la hauteur de sa propre perception de ce qui éclaire.
Pour terminer je souhaite citer les paroles de mon maître Alwin Nikolais: « Chaque nouvelle perspective de l’art détruit une autre barrière sur le chemin de la quête de l’homme pour sa liberté. La caractéristique principale du regard chorégraphique contemporain, c’est la liberté. Mais celle-ci est à envisager du point de vue de la poésie primordiale de la vie qui est tout et vraiment tout-très exactement ce qu’on appelle l’Art. ».
Illustration de l’entête: Carolyn Carlson dans L’Or des Fous, Théâtre de la Ville, 1975.
BnF, Arts du spectacle © Claude Lê-An