Pour cette rentrée littéraire 2025, retenez bien le nom de cette nouvelle auteure Melvin Mélissa et de son premier roman, Une pieuvre au plafond, juste publié aux éditions Rivages. Une véritable plume, un style, de la gueule quoi !
Deux jeunes gens que d’aucuns, « bien pensants », appellent marginaux, vivent à Lille. Sibylle est artiste plasticienne (avec un vrai talent), Simon est tout à la fois toxicomane, faux-monnayeur (il faut bien vivre et la drogue a un coût certain), mais aussi un photographe qui, lui aussi, est un véritable artiste en son domaine. Et puis un jour, ils rencontrent Haroun, un traducteur dans le domaine médical. Et, ce qui devait être la rencontre d’un soir (trouver un partenaire sexuel pour Simon qui est quelque peu bisexuel) évolue très vite, car Haroun a exactement la même sexualité que Simon. De fait se forme un vrai « trouple » mu par une vraie passion réciproque qui amène l’adhésion de leurs proches.
Mais pour pouvoir avancer, bâtir un avenir et non vivre que pour l’instant présent, ils vont devoir régler, assumer leurs passés et sortir de l’enfer de la drogue : lâcheté, viol, inceste, chacun doit gérer ses démons et surtout, être toujours présent pour aider l’autre. Ce n’est que quand ils seront allés jusqu’au bout de leur addiction, qu’ils arriveront à se pardonner, à comprendre qu’ils ne sont en rien responsables de ce qui leur est arrivé, qu’ils vont pouvoir vivre harmonieusement.
Il y a du Baise-moi de Virginie Despentes dans ce livre, cette rage de vivre suivant des codes qui ne sont pas ceux de la société, voire de Lila dit ça de Chimo. Et puis ce que certains appellent « la bohème » (nous sommes dans un milieu d’artistes) n’est pas le propre de Paris, n’en déplaisent à ceux qui pensent qu’au-delà du périphérique c’est un monde barbare seulement destiné aux études des ethnologues et autres sociologues. Non, la vie, la vraie, se trouve aussi en province, la créativité, le talent aussi !
Il se dégage une grande humanité des trois protagonistes, mais aussi des personnages secondaires ; leurs interrogations, leurs doutes, leurs tourments sont parfaitement décrits. Enfin, des personnages qui ne passent pas leur temps à pleurer sur eux-mêmes, à subir et à être totalement irresponsables tant ils sont autocentrés sur leur nombril. Dans Une pieuvre au plafond c’est l’inverse, les personnages assument leurs choix, veulent prendre leurs responsabilités mais que leurs responsabilités, pas celle des tiers : même si parfois ils sont « choqués », ils ne jugent pas d’entrée, ils essaient de comprendre et savent mettre leurs potentielles critiques (qui ne sont que des lieux communs comme « ça ne se fait pas» etc., que nous rencontrons dans tant de romans) en veilleuse pour ne voir que le côté positif de la situation pour l’autre. Accepter l’autre tel qu’il est et non tel que l’on voudrait qu’il soit, c’est une démarche, hélas, rare. Cela ne veut pas dire, loin de là, qu’il faille tout accepter : le négatif doit être combattu, mais ils sont toujours là pour aider celui qui le vit, qui le porte, plutôt que de le rejeter.
Melvin Mélissa signe ici son premier roman, nous ne pouvons que lui souhaiter de continuer sur cette voie avec la même subtilité dans l’analyse des complexités de l’âme humaine.
Une pieuvre au plafond
Melvin Mélissa
éditions Rivages. 20€
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