Between French West Indies and France during the first world war

Après Le champ de personne et Paulette et Roger, Daniel Picouly continue avec le Cri muet de l’iguane de nous narrer avec le brio qui le caractérise sa saga familiale autour de la personne mythique de son grand-père Jean Jules Joseph Picouly né en 1893 à la Martinique. Si on en croit sa bru, Paulette qui a l’art de créer des univers que l’on croit réels, à lui seul il a gagné la guerre de 14/18 et refusé la croix de la bravoure militaire par modestie.

Ce héros, mort bien avant sa naissance, a bercé l’enfance de l’auteur qui a voulu lui rendre hommage en écrivant un livre sur sa vie. Mais lors de ses recherches un courriel d’une historienne le prévient qu’il n’y a aucune trace de Jean Jules Joseph dans les archives des armées. Concomitamment, dans les archives familiales, il découvre un carnet ayant appartenu à son ancêtre à partir duquel il va reconstituer la vraie vie de Jean Jules Joseph. Il a été élevé par sa mère Rosalie (impossible de savoir qui fut son père parmi tous les amants de passage de cette dernière), dans un hameau d’ « amazones », il est le héros de ce groupe de femmes. Dès l’enfance, il est amoureux d’Aurore, la fille du plus riche planteur de l’île et se trouve en butte contre le frère dévoyé de cette dernière.

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Jean Jules Joseph est le témoin en 1908 du crime raciste contre Antoine Singer le maire noir de Fort de France, échappe par miracle à l’explosion de la Montagne Pelée, boxe contre le premier noir champion du monde de boxe poids lourd, se trouve mêlé dans une histoire de trafic et contrebande de rhum, le tout dans un univers profondément raciste où les séquelles de l’esclavagisme sont encore très présentes dans les mentalités des blancs. Mais, en 1917, il part en France, non comme soldat, comme il eût souhaité, mais comme ouvrier dans une usine d’armement à Tarbes. Il y rencontre Marie avec qui il va avoir trois garçons et une fille qui décédera jeune. La famille va déménager à Varennes-Vauzelles dans la banlieue de Nevers où il travaillera dans un centre de réparation de locomotives. C’est là qu’il décédera d’une blessure à l’œil qu’il refusera de soigner, car Marie a finit par connaître son secret à cause de la vengeance du père d’Aurore.

Ceci n’est qu’un très court résumé du livre (dont je vous laisse le plaisir d’en comprendre le titre à sa lecture) qui foisonne d’anecdotes, de morceaux d’Histoire, de situations parfois burlesques, parfois graves, profondes. On trouve dans ce livre tout ce qui fait le talent d’écrivain de Daniel Picouly : une écriture flamboyante, chaude, avec des trouvailles comme ce monologue de la Montagne Pelée qui dégage une poésie certaine, une empathie pour ne pas dire un amour profond pour tous les protagonistes et pas que pour les membres de la famille.

On savait que Daniel Picouly est un grand écrivain, on en a la confirmation à la lecture du Cri muet de l’iguane.

Émile Cougut


Le Cri muet de l’iguane

Daniel Picouly

Éditions Albin Michel. 21€50


WUKALI 21/04/2015

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