Financier of the French monarchy during the 15th century

Dans une chronique précédente, en date du 11 avril 2019, nous avions évoqué le Bitcoin et les libertaires américains (cliquer), pour qui le rôle de l’Etat doit strictement se cantonner a ses fonctions régaliennes. A l’heure où, sous la pression populaire on supprime l’[**ENA*], où [**Carlos Goshn*] est en prison au Japon, où on envisage de privatiser [**ADP*] ( Aéroport De Paris ), des affaires qui déclenchent des passions et qui font débat dans notre pays, passons à l’autre extrémité du spectre, c’est-à-dire à ceux qui pensent que l’Etat peut aussi se mêler de la construction de véhicules automobiles ou de gérer des galeries marchandes dans des aéroports internationaux, sous prétexte que ces opérations sont très rentables; un peu comme l’Armée Populaire de Chine, qui gère des centres commerciaux et des karaokés…D’où viennent de telles représentations, bien ancrées dans l’imaginaire français ? De loin, de très loin en fait.


– « Sur la mer il avoit à ses despens plusieurs grans vaisseaulx qui alloient en Barbarie, et jusqu’en Babylone quérir toutes les marchandises par la licence du Souldan et des Turcs infidèles ; aussi en leur payant trivaige (droits de douane ), il faisoit venir desdits païs des draps d’or et de soye, de toutes façons et de toutes couleurs, plus des fourrures servant tant à d’hommes qu’à femmes, de diverses manières, tant martre, genettes, et austres choses estranges de quoy ont sçu finer ( se procurer ) pour or, ny pour argent, ès marches de par deçà ( en Occident )  ». Ainsi s’exprime, avec admiration, [**Mathieu d’Escouchy,*] chroniqueur picard du XVième siècle, témoin de la Guerre de Cent Ans entré au service de [**Philippe le Bon*] puis de [**Louis XI*] ( qui l’anoblira ), à propos de [**Jacques Cœur*], grand commis de l’état né vers 1395.|right>

– [**Qui est Jacques Coeur, un héros français*]

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Mais Mathieu d’Escouchy ne fut pas le seul admirateur inconditionnel de Jacques Cœur. [**Georges Chastelain*], lui aussi chroniqueur et historiographe des Ducs de Bourgogne, lui aussi au service de [**Philippe le Bon*], duc de Bourgogne ( fils de [**Jean sans Peur*] et père de [**Charles le Téméraire*] ), écrira en parlant de [**Jacques Cœur*], que c’était « un homme plein d’initiative et de haut engin, saschant conduire par labeur…et qui s’était enrichi d’étonnante manière, et tant multiplia en bien que, en l’état de sa vocation, n’avoit pareil au monde ». [**Honoré de Balzac*] fera également son éloge dans « Splendeurs et misères des courtisanes », et Jacques Coeur figurera sur le billet de 50 Francs mis en circulation en 1941. Plus près de nous, [**Jean-Christophe Ruffin*] écrira « Le Grand Cœur », paru en 2012, hymne à la gloire de Jacques Cœur, réformateur, passeur de cultures, expérimentateur, aventurier, bref, un homme en avance sur son temps.

– [**Qui était donc Jacques Cœur ?*]

La légende est brillante et sans faille. Quand naît Jacques Cœur à Bourges, en 1395 ou en 1400, [**Charles VI,*] roi fou, règne sur la France, mais le royaume est en proie aux querelles des princes, en particulier à celle des Armagnacs et des [**Bourguignons*]. En mai 1418, éclate à [**Paris*] une révolte des Bourguignons et Paris est livré à une populace qui pille et tue. La situation est dangereuse. Finalement, le dauphin, futur [**Charles VII*], doit fuir Paris en août 1418, à la suite d’émeutes menées par [**Capeluche*], bourreau de Paris, qui fit 20.000 morts. Le dauphin et sa cour trouvent refuge à Bourges, mais en 1420, Charles VI désigne pour héritier [**Henri V d’Angleterre*], marié à sa fille [**Catherine de France*]. Voilà le dauphin Charles déchu, accusé d’être un bâtard.

[**Charles VI*] et [**Henri V*] meurent peu après à quelques mois de distance, et [**Henri VI d’Angleterre*] n’a que 10 mois ; c’est l’occasion de réagir. Le « petit roi de Bourges  » va reconquérir la France, conduit par [**Jeanne d’Arc*], et celui qui deviendra [**Charles VII*] sera sacré à Reims le 17 juillet 1429.

[**Bourges*] bénéficiait désormais des faveurs royales, la ville ayant soutenu le dauphin. [**Pierre*], père de Jacques Coeur, était pelletier, fournisseur en belles fourrures du [**duc de Berry*], celui-là même qui fit confectionner les enluminures des « Très Riches Heures  ». Dans son « Histoire du Berry depuis les temps les plus anciens jusqu’en 1789 », publié en 1881, [**Louis de Raynal*] fera même de Pierre Cœur « le marchand pelletier le plus riche de son temps  ». Jacques Cœur, contrairement à une certaine légende, n’est donc pas parti de rien. Il à 15 ans quand l’armée française se fait tailler en pièce à [**Azincourt*], il en a 18 lorsque le dauphin, futur [**Charles VII,*] chassé de Paris par [**Jean sans Peur*], se réfugie à Bourges et devient le « petit roi de Bourges ». [**Lambert de Léodepart*], ancien valet de chambre du [**duc Jean 1er de Berry*], et désormais prévôt ducal de Bourges, habitait la maison qui jouxtait celle des Cœur. En 1418, Jacques Cœur épouse sa fille, [**Macé de Léodepart*], et en 1427, il achète la « ferme de la monnaie de Bourges », et devient responsable de l’atelier monétaire de la ville.

– [**Jacques Coeur est lancé*]

Jacques Cœur deviendra négociant international, banquier, armateur, patron de multinationale, financier hors pair, « argentier » de Charles VII, et aussi l’un des hommes les plus riches de France. Innovateur, il met en place, avec audace, un plan destiné à concurrencer Venise, Pise et Gênes dans le commerce du Levant ; il exploite des mines d’argent dans le Lyonnais et le Bordelais, fait fabriquer des galères et se rend en Egypte et en Syrie, puis s’établit à Montpellier afin d’y installer son commerce avec les infidèles. |right>

Grand innovateur, il devient si riche qu’on le soupçonne d’avoir inventé la pierre philosophale, grâce a sa rencontre avec l’alchimiste [**Raimond Lulle*], pourtant mort en 1316, 80 ans avant sa naissance ! Jacques Cœur possède 16 navires, dispose de 300 agents dans le monde, fait installer un chantier naval à Aigues-Mortes. Il exporte des draps, des toiles, du vin et du cuivre et importe des soieries, des draps d’or, des fourrures, des tapis, des pierres précieuses. L’homme est entreprenant !!

Le 2 février 1439, Jacques Cœur est nommé « argentier du Roi » ; il aidera Charles VII à lever des fonds afin de contribuer à bouter les Anglais hors de France ( il lui avance 200.000 écus pour reconquérir la Normandie, et sera à ses côtés le 27 juillet 1447, lors de l’entrée solennelle du Roi dans Rouen). [**Michelet*] dira de lui que « cet homme intelligent rétablit les monnaies, invente en finance la chose inouïe, la justice, et croit que pour le Roi, comme pour tout le monde, le moyen d’être riche est de payer ». Charles VII confie à Jacques Cœur de nombreuses missions diplomatiques à Toulouse, à Gênes, à Rome, et celui-ci s’en acquittera fort bien.

Finalement, Charles VII anoblit Jacques Cœur en avril 1441 ; sa devise sera  : « A vaillans cuers riens impossible » ( « A coeur vaillant, rien d’impossible » ). Le 27 juillet 1447, Jacques Cœur fait frapper des pièces d’argent de bon aloi, à 92% d’argent fin, qui seront surnommées les « Gros de Jacques Cœur  ».
L’homme est alors au sommet de la gloire. [**Agnès Sorel*], favorite de Charles VII, devient la cliente, puis l’amie de Jacques Cœur ; elle le poussera à la cour. Fut-elle sa maîtresse ?
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Mais elle meurt le 9 février 1450, à 28 ans, et Jacques Cœur perd sa protectrice. En 1451, Jacques Cœur, jalousé de toutes part, est accusé de lèse-majesté, emprisonné, torturé, sa femme meurt de chagrin. Le 29 mai 1453, Jacques Cœur est condamné, ses biens saisis, mais en octobre 1454, il s’enfuit du château de Poitiers, et trouve refuge chez le pape [**Nicolas V*] à Rome. Puis, il monte, pour le pape [**Calixte III*], une expédition sur l’île de Chios, menacée par les Ottomans. Capitaine Général de l’Eglise, il commande l’expédition, mais meurt à Chios le 25 novembre 1456. Il sera enterré dans l’église des cordeliers de Chios.
Quelle vie quand même !

– [**L’heure des comptes*]

Pourtant, des historiens vont régler son compte à Jacques Cœur, et dans la foulée, peut-être sans le vouloir, ils vont mettre en évidence certains problèmes liés aux traditions françaises, des problèmes dont peuvent souffrir aujourd’hui encore l’économie française.
Dans « Jacques Cœur », paru en 1997 chez Perrin, le grand historien [**Jacques Hees*], professeur honoraire à la Sorbonne, explique que « Jacques Cœur n’était pas du tout un homme d’affaires, mais un commis du Roi, un officier Royal qui doit son succès aux monopoles d’état dont il jouissait » ; déjà ! « Jacques Cœur n’a rien d’un « moderne », écrit-il, il n’innova en rien et, surtout, n’entreprit aucune sorte de « révolution  ». Commis du roi, employé aux approvisionnements et à mettre en place puis à consolider des monopoles d’état, il s’y est appliqué excellemment… Jacques Cœur n’est absolument pas un « grand marchand  », champion de « l’esprit d’entreprise ». Mais tout le contraire, puisque commis du roi…De ses parents, il n’a hérité que du désir de se placer au mieux dans la familiarité et la clientèle du roi et de la cour…Très vite, il épousa la fille du prévôt ducal, petite-fille d’un maître des monnaies. Lorsque plus tard, homme puissant et fortuné, il s’établit à Bourges, d’une manière qui fit si mal parler de lui, il décida que se serait loin du quartier des marchands, à l’ombre des palais du roi et de l’archevêque…les succès de Jacques Cœur sont ceux de l’économie d’Etat, et donc de l’une des premières manifestations d’aussi grande envergure en tous cas, d’une politique appelée à contrôler, par toutes sortes de moyens, de vastes secteurs de l’activité économique et de les placer sous tutelle ». Voici réglé le compte de Jacques Coeur…

Ainsi en fut-il du commerce avec le Levant ; alors que les grandes villes d’Italie, Venise, Florence, Gênes, laissaient ce commerce entre des mains privées, Charles VII et Jacques Cœur mirent sur pied un tout autre système, un monopole d’état, une structure d’économie administrative destinée à éliminer les marchands privés et à garder pour l’état tout le bénéfice de ce commerce. Voilà une économie sous tutelle, géré par des grands commis de l’état parfois loin des réalités des marchés. Un mal qui remonte loin et qui bride encore les réformes…|center>

– [**Jacques Coeur trafiquant ?*]

Mais un malheur ne vient jamais seul. On accusera aussi Jacques Cœur d’être un trafiquant d’armes, équipant les armées françaises en armures, cuirasses, lames et épées achetées à Milan ou à [**Paolo de Campofregoso*], doge de Gênes.
Et ce n’est pas tout.

Quand, en 1427, [**Jacques Cœur*] et ses acolytes, les frères [**Godard*], changeurs, et [**Ravant le Danois*], rachètent la ferme de la monnaie de Bourges, c’est l’anarchie monétaire; une véritable guerre monétaire battait son plein. Les Anglais, pour jeter le troubles, faisaient frapper à Paris des pièces de faible proportion de métal précieux, qui étaient donc surévaluées et créaient un grand désordre. Il était facile aux spéculateurs de tout poils de payer des marchandises achetées à Bourges avec de la mauvaise monnaie frappée par les Anglais, et de se faire payer avec de la bonne monnaie ! Ce trafic prit d’énormes proportions, la monnaie de bon aloi disparaissait des marchés, et la loi de Gresham ( « La mauvaise monnaie chasse la bonne » ) ne fut pas découverte, comme on le pense souvent, au XIX ième siècle, mais par [**Nicolas Oresme*], conseiller de Charles V, en 1371. Charles VII tenta de mettre bon ordre à ce trafic, dont Jacques Cœur se rendit coupable en frappant des séries de 142 pièces d’or dans un marc d’or pur, au lieu de 93 pièces ; ses associés furent convaincus de s’être livrés à cette spéculation, et Jacques Cœur entreprit un voyage à Damas en 1432, sans doute pour se faire un peu oublier.|right>

Plus tard, Jacques Cœur se prêtera encore à un autre trafic. A cette époque, l’Occident utilisait pour sa monnaie un système bi-métallique or-argent. En occident, l’argent n’était pas vraiment rare, il y avait des mines en Cornouailles, en Espagne du Sud, en Serbie, en Bohême ; par contre, il y avait une véritable « famine de l’or ». Le ratio entre les deux métaux était donc entre un à dix et un à treize. Mais c’était l’inverse au Levant et chez les musulmans, et même en Chine, qui avait adopté le monométallisme argent. A Alexandrie ou à Damas, le ratio n’était plus que de un à sept à un à dix ; c’était là l’occasion d’un juteux trafic, qui pouvait rapporter, tous frais payés, jusqu’à 22%. Jacques Cœur ne s’en priva pas ; il alla même jusqu’à faire installer un atelier secret à Rhodes, où il fabriquait des pièces de moindre aloi, frappé d’un faux poinçon en forme de trèfle qui rappelait crapuleusement le poinçon à fleur de lys des ateliers royaux. « Les Sarrazins qui avoient achetté ledit argent et l’avoient trouvé de moindre loy que ladite marque le demonstroit, avaoient dit communèment et en présence de plusieurs autres marchands estranges que Francoys estoient trompeurs ». Ce genre d’activité n’était pas franchement bon pour la réputation du royaume, et on en fera plus tard reproche à Jacques Cœur.

Jacques Cœur, donc, arriviste et faux monnayeur ? Certes, mais ces écarts, à condition qu’ils restent raisonnables, étaient jusqu’à un certain point tolérés par les agents royaux, car de la sorte, les financiers pouvaient se rembourser de prêts consentis au roi qui, eux, ne seraient jamais payés…

Cela n’empêcha donc pas Jacques Cœur d’être nommé par Charles VII « Commissaire en Languedoc  » ( il y en avait en tout 5 à 7 dans cette région) ; à ce titre, il était en charge des allocations particulières, nommées les « épices », impôts consentis au roi pour une mission particulière, le plus souvent pour la guerre. Les impôts étaient établis par l’Assemblée des Etats, et Jacques Cœur se révéla fort habile à négocier avec eux ; en 1445, il leur demande 200.000 livres, et en obtient 145.000. En 1450, il obtient 170.000 livres, et 120.000 en 1451. Il ne s’oublia évidemment pas au passage : en 1447, son compte personnel fut crédité de 34.375 livres, de 4.000 en 1449, et encore de 4.000 en 1450. On l’accusa de fraudes et de détournements de fonds. A sa décharge, notons que ces abus étaient monnaie courante et qu’il n’était pas le seul à se livrer à ce genre de pratiques. |right>

– [**Les impôts déjà !*]

Mais ce que l’on reprocha le plus à Jacques Cœur, c’était que les impôts fussent devenus trop lourds ; beaucoup trop lourds ! Sous sa férule, l’impôt était de plus en plus mal supporté, il était considéré comme injuste. Un membre de l’Assemblée des Etats du Languedoc dira : « Nostre dit pais de Languedoc estoit par commune renommée comme du tout apouvry, desimé et vuide d’argent et de chevauce  ». En un mot, l’état prenait tout ! Du coup, les affaires périclitaient, trop d’impôt tuait l’impôt, les étrangers ne venaient plus dans les foires, comme de nos jours les investisseurs étrangers hésitent à investir dans les pays à forte fiscalité. Plus grave, les jeunes entrepreneurs allaient chercher ailleurs meilleure fortune, et les exilés fiscaux, déjà, posaient problème : « Parquoy plusieurs habitants d’iceux lieux furent contraints de s’absenter, ce qui ne pouvoit estre qu’au grant dommaige du Roy et de son Royaume   ».

[**Charles VII*] et ses conseillers, en fin de compte, étaient des mercantilistes, qui cherchaient à favoriser les foires et les industries du royaume afin de limiter les achats à l’étranger. Achetez français était déjà leur politique.

Monopoles d’Etat, interventionnisme excessif de la puissance publique, hauts fonctionnaires tout-puissants (1), impôts trop lourds, investissements étrangers fuyant la France, exilés fiscaux, entrepreneurs partant pour l’étranger, politique forcenée du « achetez français », quoi de nouveau sous le soleil depuis six siècles ?

[**Jacques Trauman*]|right>


Jacques Trauman, diplômé de Sciences-po Paris et MBA de Columbia University ( New-York ), a commencé sa carrière dans des banques américaines, avant de devenir Directeur Général de Paribas à Tokyo et Hong-Kong. Il s’est ensuite occupé de fusions-acquisitions.


(1) Sur les tensions qui existent en France entre les entrepreneurs et les hauts fonctionnaires, héritiers des légistes du roi, voir le livre de Marc Simoncini, fondateur de Meetic, « Une vie choisie », Grasset 2018, page 211 : « Quand en 2011, j’entre dans le bureau de Michel Sapin, énarque, quarante ans de carrière politique, il est assis derrière son grand bureau en bois, chaussettes roses et mocassins à gland. Il lève la tête, me regarde, et s’écrie : « Oh…un riche ». Je suis surpris, je penses : »Oh, un con… ». Je le garde pour moi. Hélas ».


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WUKALI Article mis en ligne le 27/04/2019

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