Ah Sacha Sperling, mon dieu que la vie est dure et souvent cruelle, pire, sans espoir, quand on est né avec une cuillère en argent dans la bouche ! Mon dieu, que c’est quasi invivable quand pour fuir Paris et une relation qui se délite, la solution c’est un presbytère dans un petit village de basse Normandie racheté par la mère du romancier au couple Gainsbourg/ Birking.
Oh oui, la vie est vraiment injuste quand vous êtes né dans un milieu cinématographique avec des parents connus et reconnus dans la profession, et avec en prime un frère aîné qui réussit dans ce milieu ! Imaginez le calvaire que devient votre quotidien quand vous avez connu un vrai succès littéraire à 18 ans et que vous ne savez qu’écrire !
Bon, vous avez compris, le dernier livre de Sacha Sperling est une longue, très longue, très très longue suite de jérémiades autour de son nombril. Au bout d’une cinquantaine de pages le lecteur (qui oublie que c’est très difficile, mais il a atteint une sorte d’overdose) a envie de lui dire de réagir, de prendre sa vie en main, de changer de psy, d’arrêter les drogues et l’alcool et surtout de tout ramener à lui. Avec en plus cette superbe propension à se poser en victime. Oh, il dit l’inverse, c’est lui qui rend les autres malheureux, mais c’est vieux comme le monde, on sait qu’il veut dire que c’est faux, que tout n’est pas de sa faute, que les autres aussi ont eu leur rôle ! Car ça, battre sa coulpe, il sait faire, mais cette ligne de conduite qui se trouve au début du roman, finit vite par disparaître, montrant qu’il était sincère comme un âne qui recule.
Très vite l’échec, très vite l’échec de son couple avec Mona qui ne surmonte pas la maladie et la mort de son père atteint indéniablement d’un Charcot, et l’échec de celui qu’il a créé avec le fils de son voisin pêcheur, Léo (qui, soit dit en passant est un manipulateur, gigolo qui a très bien compris qui est Sacha et tous les avantages matériels qu’il peut tirer en couchant avec lui) sont dus à ses amants tandis que lui, bien sûr, se présente comme une victime, victime de ses sentiments, mais surtout victime de ces deux personnes qui n’ont pas su (enfin plus exactement voulu) le comprendre.
Sacha Sperling est à mettre en parallèle avec les chanteurs actuels de variété comme Benjamin Biolay et autre Julien Doré qui ne font que se lamenter à travers leurs textes de leur pauvre sort. Alors trop, c’est trop ! A force de vouloir disséquer, analyser chaque détail en ramenant tout à soi, cela devient pénible… et long, très long… On finit par écrire 346 pages, alors qu’une longue nouvelle aurait amplement suffit.
Oui, il y a beaucoup de témoignages personnels depuis plusieurs années lors des rentrées littéraires. Hélas tous n’ont pas le talent de Frédéric Mitterrand quand il a écrit l’extraordinaire Mauvais Garçon
Le fils du pêcheur
Sacha Sperling
éditions Robert Laffont. 20€
Illustration de l’entête: Hiroshima (1961). Yves Klein
Pigment pur et résine synthétique sur papier marouflé sur panneau139.5 x 280.5 cm. The Menil Collection, Houston, États-Unis© Succession Yves Klein c/o ADAGP, Paris