L’exploration spatiale, puisque vous êtes fidèles lecteurs de WUKALI vous le savez, est l’un de nos sujets de prédilection. Ce domaine embrasse le champ de notre génie humain. Il est à l’égal de l’art dans sa transcendance, et cette quête du savoir qui nous porte si loin de nos ténus horizons, bouleverse le champ de nos possibles. Que faire des morceaux des missions lunaires Apollo ou d’autres éléments de la technologie humaine éparpillés dans le système solaire ? Doit on inventer une archéologie spatiale? La question vous semble farfelue ou oiseuse, pas du tout, en effet le souci de documenter, d’étudier ce qu’il advient de toute cette multitude de vaisseaux spatiaux et débris d’engins projetés dans l’espace et posés constitue l’une des préoccupations des astronautes. C’est ce sujet qui a retenu notre attention dans un article que nous avons lu, et publié par le site Space.com, en voici la substance.
Alors que les ingénieurs aéronautiques de la NASA et d’autres organismes telle l’Agence spatiale européenne avec la mission Artemis prévoient de nouvelles missions lunaires habitées à court terme dans les années à venir, une nouvelle étude suggère d’observer les changements causés par l’environnement lunaire sur les objets humains laissés à la surface, afin de préserver ce qui peut l’être : Les engins spatiaux, les expériences, les déchets et d’autres choses.
«Les traces matérielles qui existent actuellement sur la Lune risquent rapidement d’être détruites si l’on n’y prête pas l’attention nécessaire au cours de la nouvelle ère spatiale», a ainsi déclaré Justin Holcomb, chercheur postdoctoral au Kansas Geological Survey (université du Kansas), dans l’article publié par Space.com publié le 25 juillet.
Cette étude s’appliquerait également à d’autres mondes que l’homme a visités avec des engins spatiaux, tels que les rovers, les atterrisseurs et les sites d’écrasement de Mars, qui sont fouettés par des vents secs. De nombreuses missions sur la planète rouge ont succombé aux températures extrêmes ou à la poussière omniprésente, qui s’infiltre partout.
L’archéologie est l’étude de l’homme et de ses objets, de la préhistoire à nos jours. L’archéologie spatiale est donc, par extension, «l’étude de la culture matérielle associée à l’exploration spatiale à partir du XXe siècle», selon l’Encyclopedia of Global Archaeology. Les premières expériences de fusée, aujourd’hui associées à l’exploration spatiale, ont débuté dans les années 1920, ce qui signifie que les objets spatiaux datent tout au plus d’un siècle.
Certes, la NASA fait ce qu’elle peut. Outre les nombreux musées de l’espace dans le monde, comme le musée de l’Air et de l’espace à Paris- Le Bourget ou la Cité de l’Espace à Toulouse en France, qui conservent les objets rapportés sur Terre, l’agence américaine a appelé à une exploration prudente de la lune par le passé. Elle documente soigneusement ses activités sur d’autres mondes dans une perspective d’avenir. En outre, la NASA et de nombreuses autres agences spatiales internationales respectent les traités des Nations unies qui définissent les modalités d’exploration de l’espace ; cela implique non seulement le respect des personnes, mais aussi celui des objets laissés par ces personnes.
L’archéologue spatiale australienne Alice Gorman est l’une des pionnières de l’archéologie spatiale. Elle codirige une étude sur les artefacts de la Station spatiale internationale, parmi de nombreux autres projets. Les références à un article de 2021 sur un projet de station spatiale dirigé par Justin Walsh, de l’université Chapman, suggèrent que le terme « archéologie spatiale» a commencé à prendre substance au tournant du millénaire. (Le 30e anniversaire de la mission Apollo 11, pionnière de l’alunissage humain en 1969, qui s’est déroulé en 1999, y est peut-être pour quelque chose).
Certains scientifiques définissent toutefois l’« archéologie spatiale» comme l’observation de l’archéologie depuis l’espace, à l’aide de satellites. L’exploratrice du National Geographic Sarah Parcak, archéologue et professeur d’anthropologie à l’université d’Alabama à Birmingham, en est un exemple frappant. Quant à Justin Holcomb, de l’université du Kansas, il considère quant que l’«archéologie spatiale» consiste à préserver les artefacts des vols spatiaux.
J. Holcomb et son équipe proposent de créer un nouveau sous-domaine de l’archéologie spatiale appelé «géoarchéologie planétaire», qui se réfère à la manière dont les processus culturels et naturels d’un monde (comme la Terre) influencent les artefacts à sa surface.
Les artefacts (terme on ne peut plus archéologique et qui désigne les productions humaines tels les objets de fouilles) tels que les satellites – ou les engins spatiaux volant vers un autre monde – ne sont pas tout à fait des sites de géoarchéologie planétaire, tant qu’ils sont en orbite dans l’espace. Mais les sites d’écrasement ou d’atterrissage de ces engins seraient probablement pris en compte. Selon l’Union of Concerned Satellites, plus de 6 700 satellites sont actuellement en orbite autour de la Terre, et un grand nombre d’autres engins spatiaux volent actuellement ailleurs dans l’espace ou résident sur d’autres mondes.
La NASA prévoit de renvoyer des humains sur la Lune dans le cadre de sa mission Artemis 3 au plus tôt en 2025 ou 2026, à condition que le programme respecte le calendrier prévu. (Artemis 2, une mission visant à faire le tour de la lune avec des humains à bord, est actuellement prévue pour novembre 2024). Selon M. Holcomb, le nouveau programme Artemis renouvelle les appels à la préservation des objets Apollo sur le site. Cette question a même fait l’objet d’un projet de loi au Congrès américain en 2013.
«Je pense qu’il y a un risque pour ce patrimoine posé sur la Lune», a déclaré Justin.Holcomb à propos de la nouvelle génération d’explorateurs lunaires. La plupart des pays du monde ont signé le traité des Nations unies sur l’espace extra-atmosphérique, qui établit des normes internationales en matière d’exploration lunaire, mais les accords Artémis de la NASA sur le travail lunaire et la collaboration pacifique dans l’espace ne concernent que 27 pays ( la France a signé cet accord en juin 2022). La Russie et la Chine sont en train de créer leur propre alliance spatiale, à laquelle le Vénézuela a récemment adhéré. Et c’est sans compter le nombre d’entreprises privées qui peuvent désormais explorer le domaine lunaire de manière indépendante.
Justin Holcomb souhaiterait que les archéologues soient impliqués en première ligne dans l’exploration de la Lune et de Mars, notamment pour préserver des sites clés tels que la zone d’atterrissage d’Apollo 11 dans la mer de la Tranquillité, ou le site pionnier de la NASA Viking 1 à Chryse Planitia sur Mars.
Outre la poursuite du suivi des objets, la mise à jour des lois et le contrôle des effets de l’environnement sur les engins spatiaux, il invite la communauté à garder un œil vigilant sur les artefacts en péril. Les rovers et les engins spatiaux martiens sont particulièrement susceptibles d’être enterrés, ou pour dire plus juste, enfouis, a-t-il déclaré, ce qui les met hors de portée pour de futures études scientifiques.
Le principal objectif de l’article, selon le texte, est de «stimuler la recherche sur l’interaction entre l’homme et l’environnement dans l’espace». Il a été publié le 11 juin dans la revue à comité de lecture Geoarchaeology.
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