Jalousie
Je suis jaloux. Tu es là-bas, à la campagne,
et moi je suis là, tout seul, à présent !
Des parents, je sais, t’accompagnent
qui ne sont pas très amusants.
Mais je suis jaloux tout de même,
jaloux de te savoir là-bas par ce printemps…
Tout ce bleu doit te faire oublier que tu m’aimes…
Moi je pense à toi tout le temps !
J’ai l’âme ivre et comme défaite.
Je pleure d’amour et d’ennui.
Ton image est là, dans ma tête :
tu es joliment bien, petite âme, aujourd’hui !
Je suis jaloux, quoi que je fasse ou que je veuille.
Il fait tiède et doux dans Paris !
C’est adorable ! Et moi je rage et je t’écris,
à toi, à toi, petit chéri,
qui est là-bas, où sont les feuilles…
Tu dois avoir ton grand chapeau
de paille blonde et de glycines
qui met des petits ronds de soleil sur ta peau.
Tu dois bien m’oublier ! Et moi je te devine
jolie, heureuse… Il fait si beau !
Ah ! je pleurerais de colère !
Il a plu pendant tout un mois :
Il faut qu’on t’écarte de moi
quand tu m’es le plus nécessaire !
Je ne t’ai jamais tant aimée qu’en ce moment.
Cet air tiède et doux m’exaspère
qui pénètre l’appartement
Je t’en veux, je souffre, et souhaite
que là-bas tu souffres autant.
Ce n’est pas très gentil, bien sûr ! C’est un peu bête.
Mais, que veux-tu ! je t’aime tant !
Je voudrais que tu me regrettes
au point de haïr ce printemps…
Je serais même très content
s’il te faisait un peu mal à la tête.
Paul Géraldy (1885-1983)