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S’inspirant de la même légende rhénane, l’histoire de la Loreleï, cette sirène qui dissimulée sur un rocher sur une boucle du Rhin, séduisait pécheurs et bateliers et les conduisait à la noyade, voici les oeuvres de deux poètes, l’un allemand, l’autre français Heinrich Heine et Guillaume Appolinaire. Heinrich Heine a aussi inspiré des musiciens: lied de Robert Schumann et sonate pour piano de Franz Liszt. Beauté des textes. Le poème d’Heinrich Heine est directement suivi de sa traduction en français. La poésie est faite pour être lue, elle est aussi faite pour être dite, récitée et écoutée, pour cela nous avons choisi en illustration quatre vidéos associées dont deux purement musicales avec en pur bonheur Régine Crespin interprétant en allemand le lied de Schumann.
P-A L
HEINRICH HEINE
Die Lorelei
Ich weiß nicht, was soll es bedeuten,
Daß ich so traurig bin;
Ein Märchen aus alten Zeiten,
Das kommt mir nicht aus dem Sinn.
Die Luft ist kühl, und es dunkelt,
Und ruhig fließt der Rhein;
Der Gipfel des Berges funkelt
Im Abensonnenschein.
Die schönste Jungfrau sitzet
Dort oben wunderbar,
Ihr goldenes Geschmeide blitzet,
Sie kämmt ihr goldenes Haar.
Sie kämmt es mit goldenem Kamme
Und singt ein Lied dabei,
Das hat eine wundersamme,
Gewaltige Melodei.
Den Schiffer im kleinen Schiffe
Ergreift es mit wildem Weh;
Er schaut nicht die Felsenriffe,
Er schaut nur in die Höh.
Ich glaube, die Wellen verschlingen
Am Ende Schiffer und Kahn;
Und das hat mit ihrem Singen
die Lorelei getan.
Heinrich Heine (1797-1856) : die Lorelei. 1823
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traduction en français
La Lorelei
Mon Coeur, pourquoi ces noirs présages?
Je suis triste à mourir.
Une histoire des anciens âges
Hante mon Souvenir.
Déjà l’air fraîchit, le soir tombe,
Sur le Rhin, flot grondant;
Seul, un haut rocher qui surplombe
Brille aux feux du couchant.
Là-haut, des nymphes la plus belle,
Assise, rêve encore;
Sa main, où la bague étincelle,
Peigne ses cheveux d‘or.
Le peigne est magique. Elle chante,
Timbre étrange et vainqueur,
Tremblez fuyez! la voix touchante
Ensorcelle le coeur.
Dans sa barque, l‘homme qui passe,
Pris d‘un soudain transport,
Sans le voir, les yeux dans l‘espace,
Vient sur l‘écueil de mort.
L‘écueil brise, le gouffre enserre,
La nacelle est noyée,
Et voila le mal que peut faire
Lorelei sur son rocher.
Mon Coeur, pourquoi ces noirs présages?
Je suis triste à mourir.
Une histoire des anciens âges
Hante mon Souvenir.
GUILLAUME APPOLINAIRE
La Lorelei
( à Jean Sève)
À Bacharach il y avait une sorcière blonde
Qui laissait mourir d’amour tous les hommes à la ronde
Devant son tribunal l’évêque la fit citer
D’avance il l’absolvit à cause de sa beauté
Ô belle Loreley aux yeux pleins de pierreries
De quel magicien tiens-tu ta sorcellerie
Je suis lasse de vivre et mes yeux sont maudits
Ceux qui m’ont regardée évêque en ont péri
Mes yeux ce sont des flammes et non des pierreries
Jetez jetez aux flammes cette sorcellerie
Je flambe dans ces flammes ô belle Loreley
Qu’un autre te condamne tu m’as ensorcelé
Evêque vous riez Priez plutôt pour moi la Vierge
Faites-moi donc mourir et que Dieu vous protège
Mon amant est parti pour un pays lointain
Faites-moi donc mourir puisque je n’aime rien
Mon coeur me fait si mal il faut bien que je meure
Si je me regardais il faudrait que j’en meure
Mon coeur me fait si mal depuis qu’il n’est plus là
Mon coeur me fit si mal du jour où il s’en alla
L’évêque fit venir trois chevaliers avec leurs lances
Menez jusqu’au couvent cette femme en démence
Vat-en Lore en folie va Lore aux yeux tremblant
Tu seras une nonne vétue de noir et blanc
Puis ils s’en allèrent sur la route tous les quatre
la Loreley les implorait et ses yeux brillaient comme des astres
Chevaliers laissez-moi monter sur ce rocher si haut
Pour voir une fois encore mon beau château
Pour me mirer une fois encore dans le feuve
Puis j’irai au couvent des vierges et des veuves
Là haut le vent tordait ses cheveux déroulés
Les chevaliers criaient Loreley Loreley
Tout là bas sur le Rhin s’en vient une nacelle
Et mon amant s’y tient il m’a vue il m’appelle
Mon coeur devient si doux c’est mon amant qui vient
Elle se penche alors et tombe dans le Rhin
Pour avoir vu dans l’eau la belle Loreley
Ses yeux couleur du Rhin ses cheveux de soleil
Guillaume Apollinaire (1880 – 1918) in “Nuits Rhénanes” 1904-1908 ECOUTER VOIR ECOUTER VOIR Franz Liszt
ILLUSTRATION. La sirène. John Waterhouse.Huile sur toile. 53cm x 81cm. 1900. Collection Sotheby’s