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Lu dans la revue de l’Institut national de recherches archéologiques préventives


Le 24 septembre 2013, dans la nécropole militaire de Thiescourt (Oise), s’est tenue une cérémonie d’hommage à Maurice Babé, poilu dont les restes ont été découverts par une équipe d’archéologues de l’Inrap lors d’une fouille archéologique et identifié grâce à sa plaque militaire. Aux côtés de ses descendants, étaient présents Hubert Vernet, sous-préfet de Compiègne, Thierry Frau, conseiller général et maire de Lassigny, Luc Redregoo, maire de Thiescourt. Daniel Malcouronne, maire de Torcy-en-Valois, Jean-Paul Jacob, président de l’Inrap, Philippe Dumont, directeur du service départemental de l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre et Claude Gauduin, délégué général départemental du Souvenir français.

Maurice Babé, soldat 2e classe, matricule 283

En 2012, une équipe d’archéologues de l’Inrap fouille une ferme gauloise à Campagne (Oise), dans le cadre du projet de construction du canal Seine-Nord Europe, sous la maîtrise d’ouvrage de Voies navigables de France. Prescrite par l’État, cette intervention archéologique a mis en évidence des zones d’habitat et d’activités domestiques, ainsi qu’une activité de production de sel, de l’âge du Fer (IIe-Ier siècles avant notre ère).

Olécio partenaire de Wukali

Le 22 mai 2012, de façon inattendue, des ossements humains sont découverts dans un trou d’obus. Les quelques fragments de pièces d’équipement qui jouxtent ces restes – un casque, trois chargeurs et le trépied d’un fusil-mitrailleur « Chauchat 1915 », une gamelle, une pelle-bêche – confirment l’origine militaire du défunt. Des effets personnels l’accompagnent dont une boussole à chaînette et une bague de femme. Fait rare, la mise au jour d’une plaque d’identité militaire permet de sortir de l’anonymat le soldat Maurice Babé.

Soigneusement nettoyée par les archéologues la plaque porte, au recto, l’inscription « Maurice Babé 1917 » et, au verso, « Soissons 283 ». Ces informations ont permis d’entreprendre des recherches sur ce combattant : Maurice Babé, soldat 2e classe, matricule 283. Né à Torcy, dans l’Aisne, le 26 janvier 1894, il est «tué à l’ennemi » le 30 août 1918. Recruté à Soissons en 1916, il faisait partie du 121e bataillon de chasseurs à pied. Son identification lui assure une sépulture particulière et nominative à Thiescourt, l’une des treize nécropoles militaires françaises de l’Oise.

La découverte de soldats par l’Inrap

L’Inrap applique une procédure particulière lors de la découverte de restes de militaires. Dans le cas d’un soldat français comme Maurice Babé, la gendarmerie et la mairie sont alertées et le Pôle des sépultures de guerre et des hauts lieux de la mémoire nationale, basé à Metz, se charge du prélèvement des restes. Depuis le début des recherches archéologiques sur le canal Seine-Nord Europe, quinze corps ont été découverts et confiés aux services compétents. De différentes nationalités, aucun n’avait pu être identifié jusqu’à présent.

Le canal Seine-Nord Europe au cœur du conflit de 1914-1918

Le tracé du futur canal Seine-Nord Europe recoupe les principales lignes de front de la Première Guerre mondiale, de l’offensive sur la Somme jusqu’à la bataille de Cambrai. Les vestiges laissés dans le sol sont nombreux : trous d’obus, tranchées, boyaux, abris de fortune, munitions de tous calibres… Parfois, ils sont chargés d’émotion : ici, les restes d’un corps enseveli et grêlé de shrapnell ; là, une jambe dont le pied est encore chaussé… Les archéologues de l’Inrap qui opèrent dans le nord et l’est de la France sont habitués à ces rencontres insolites. Dans le cadre des travaux du canal Seine-Nord Europe, bien qu’aucune fouille proprement dite n’ait été effectuée pour des raisons de sécurité, des relevés (cartographiques, photographiques) sont réalisés, au même titre que pour tout autre témoignage du passé. Ce travail s’accompagne de collaborations fructueuses avec les historiens. Les données recueillies offrent l’occasion unique d’examiner sur plus de 100 kilomètres les traces de la Grande Guerre conservées dans le sous-sol d’un secteur où les combats ont été particulièrement intensifs.

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