Theatre season starts in Paris with Festival d’Automne

Le Festival d’Automne s’ouvre avec le metteur en scène québécois, Robert Lepage, dans un spectacle autour du souvenir au Théâtre de la Ville.

Robert Lepage, seul en scène, raconte, revit, explique, illustre, détaille, découpe, entrecoupe son histoire et l’Histoire. Son récit est un préambule nécessaire à l’interprétation du poème de Michèle Lalonde « Speak White » qui rappelle la difficulté, encore aujourd’hui, d’être francophone au Canada. Poème qui culmine par son universalité un récit intime et autobiographique. Mais intime jusqu’à quel point ? Lepage ici se livre sans se dévoiler, expose sa vie avec pudeur pour ne pas tomber dans le déballage des sentiments auquel il préfère le déballage des cartons. De sa boîte magique, élément scénographique central, construite comme une maison de poupée aux échelles qui varient inlassablement, il extrait les souvenirs imbriqués les uns dans les autres, de façon décousue, comme on sort d’un boîte de photos des clichés qui nous ramènent pêle-mêle à l’adolescence, à une journée d’enfance, à un événement politique ; comme les synapses du cerveau brouillés par la maladie d’Alzheimer connectent entre eux des évènements qui n’ont rien à voir les uns avec les autres, en deux heures des dizaines de bribes de souvenirs s’illustrent et se rencontre sur la scène, confrontant espaces temps et espaces géographiques.

Olécio partenaire de Wukali

Robert Lepage déroule tous les sens possible du mot souvenir. De ce qu’il restera de lui en souvenir après sa mort, de ce qu’il adviendra de ses propres souvenirs, des souvenirs de son pays, de sa province. « Je me souviens », devise des québécois, peuple qui ironiquement se reproche de ne pas se souvenir de sa propre histoire, des Amérindiens, des Français, des Anglais qui ont construit l’identité nationale, et ont laissé un drapeau. Drapeau qui lui aussi trompe les souvenirs par ses couleurs.

Lepage ne surprend pas vraiment dans 887, seul en scène, il nous captive dans son récit saupoudré d’effets scénographiques ingénieux qui nous rappelle ses mises en scènes passées. Des effets, parfois trop, pas toujours utiles, parfois illustratifs, mais toujours dans un souci enfantin d’invention. L’hyper-précision technique relative aux spectacles de Lepage nous laisse parfois sur la touche émotionnelle. C’est toujours le même danger chez Robert Lepage, jouer avec un concept scénographique fort, le renouveler en quelques heures sans atteindre l’ennui du spectateur. Il ne l’atteindra pas avec 887, mais de ses boîtes à souvenirs, l’émotion était l’absente du grand déballage.

Ronan Ynard


WUKALI 15/09/2015
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Illustration de l’entête: photo Erick Labbe


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