An XVIIth century painting enters Rijksmuseum collections


C’est un tableau célèbre quoique mal connu du grand public, que le Rijksmuseum vient d’accrocher dans ses collections. Il s’agit d’une oeuvre de Gerard van Honthorst (1592-1656), peintre d’Utrecht, Satyre et Nymphe peint en 1623 . Grâce à un accord de prêt de long terme signé avec une association caritative hollandaise la Broere Charitable Foundation propriétaire du tableau, le Rijksmuseum expose dans sa galerie d’honneur via ce tableau un aspect peu connu du XVIIème siècle hollandais.

Gerard van Honthorst fait partie de ces peintres européens (le terme semble quelque peu anachronique) qui ont fait le voyage à Rome où il passera dix ans et c ‘est là qu’il découvre avec les peintres nazaréens l’oeuvre du Caravage. Il est le peintre hollandais le plus représentatif des caravagesques, c ‘est à dire sous l’influence de ce luminisme, de ces scènes réalistes éclairées de façon indirecte, de cette lumière de cave, le clair-obscur, mais aussi de ce souci de ce que l’on appellerait de nos jours la scénographie. De retour d’Italie et installé dans sa bonne ville d’Utrecht, Van Honthorst créera un atelier réputé avec pas moins de vingt cinq élèves qui devaient débourser pour leurs études auprès du maître pas moins de cent guilders par an, ce qui était considérable pour l’époque. Très prisé par les familles nobles et bourgeoises, il fera de nombreux portraits. L’École d’Utrecht compta aussi dans ses rangs d’autres grands artistes tels Ter Brugghen (1588-1629), Dirck Van Baburen (1595-1624) ou Abraham Bloemaert (1564-1651)

Satyre et Nymphe, donne du style de Gerard van Honthorst, une vision différente, en effet ici en l’occurence bien davantage que du Caravage, il faut y voir l’influence également romaine d’Annibal Carrache. Cette peinture de Van Honthorst a d’ailleurs marqué son temps et l’érotisme qui s’en dégage a troublé plus d’un de ses contemporains. Le sujet même a par la suite été repris et reproduit notamment dans la porcelaine de Meissen.

Olécio partenaire de Wukali

Que voit-on : un couple formé d’un satyre, personnage d’âge mûr, rustique, à la peau tannée sous le soleil, barbu à souhait, le visage couperosé, la langue gourmande, les yeux vifs, le torse imberbe avec un téton en pointe, et tenant par le menton une souriante nymphe, pulpeuse ( la mythologie permet bien des audaces), à la peau claire, les deux beaux seins généreusement offerts sans retenue et tenant par la barbichette ( je te tiens, tu me tiens par la barb…!) son partenaire dans le plaisir partagé exprimé par des regards complices et ô combien sensuels.

Le contraste saisissant entre les deux carnations des personnages, cette peau cuivrée pour le satyre et d’albâtre rosé et purpurine pour la nymphe, contribue à renforcer cette impression de sensualité et de jouissance torride, cette offrande jubilatoire, tendre et amoureuse faite de connivence sensuelle, d’envies et de plaisirs gourmands et partagés entre l’état de nature et celui de culture. On est ici dans la joie, dans l’hédonisme, dans cette soif chaude de vie et de volupté, dans cette fusion des désirs et des sens, dans ces oppositions énergétiques, dans ce rapprochement de ces deux corps nus et dont les avant bras respectifs s’encadrent mutuellement. Une branche de chêne vient à point nommé dissimuler le bas ventre du satyre. Une certaine théâtralité s’exprime par le biais des étoffe précieuses, la soierie sur laquelle repose la belle et celle dont ses jambes sont recouvertes, contrepoint raffiné au milieu d’un décor végétal et près d’un être de nature mi homme mi bête.

Pierre-Alain Lévy


WUKALI 24/11/2015
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