A subtle musical direction plus beautiful and vibrant voices


[**Emmanuelle [**Haïm*]*] s’adresse à son public du Grand Théâtre de Provence, ce mardi 16 avril 2019. « Nous sommes tous bouleversés par ce qui s’est passé hier. Ce concert est dédié à Notre Dame de Paris ». L’émotion ne quittera plus la salle. Car, oui, on pouvait y aller les yeux fermés à ce concert, mais mieux valait quand même les garder ouverts, tant il donnait à voir.

Une fois de plus Emmanuelle Haïm confirme qu’elle se sent parfaitement à l’aise dans ce répertoire, à la tête du Concert d’Astrée, elle excelle à diriger [**Haendel*]. Elle est étonnante la rousse Emmanuelle Haim dans sa direction, une gestuelle reconnaissable entre toutes, et si on ne doute pas que chacun de ses gestes est étudié, chorégraphié, tout semble pourtant si facile et spontané. Oui, Emmanuelle Haïm possède un joli tempérament, ce que lui permet d’offrir à son public une vision baroque à la fois naturelle, expressive, et pleine d’éloquence.

Olécio partenaire de Wukali

C’est un beau voyage dans l’œuvre du compositeur qui nous a été offert, avec des joyaux de la musique baroque. Un répertoire qu’il est difficile de ne pas aimer tant il comprend de belles choses, profondément virtuoses, charnelles et dramatiques aussi. C’est pour beaucoup une musique très intérieure. Et comme nous le confiera Emmanuelle Haïm après le concert, « certains pensent qu’elle est trop intérieure et s’adresse à des initiés, mais il n’en est rien ». Il suffisait hier soir de se laisser porter pour s’en convaincre. Mais affaire de sensibilité et de goût ou pas, force est de reconnaître que ce concert était d’une beauté extrême. L’Ouverture de Rodelinda offerte en début de récital ne manquait pas de souffle dramatique. D’emblée la cheffe fait montre de vivacité, et les musiciens de la suivre avec bonheur.

[**Sandrine Piau*] est pour beaucoup de mélomanes la plus grande interprète haendélienne de sa génération, et avec le séduisant [**Tim Mead,*] ils formaient un joli couple sur scène. C’était une fort belle idée de les réunir pour ces duos d’exception car nul doute, l’interprétation passait par leur prisme.

C’est l’amitié qui a réuni [**Sandrine Piau*] et [**Emmanuelle Haïm*] qui se connaissent depuis de longues années. La complicité des deux étudiantes fut immédiate. La chanteuse était l’élève de [**William Christie*] tandis qu’Emmanuelle Haïm était étudiante en clavecin. Elles ont fait une partie de leur parcours d’étudiante ensemble et ne se sont plus quittées. N’oublions pas encore que la claveciniste et cheffe d’orchestre a également travaillé auprès de William Christie.

Le public connaît bien la chanteuse encore pour ses capacités virtuoses, son expression unique avec une voix qui soudain peut se fait quasi « instrumentale » et d’autres fois, à l’opposé, devient très humaine dans l’interprétation des grands personnages. Son intelligence scénique en fait une interprète remarquable et ses jolies robes ce soir-là, ont elles aussi fait sensation ! Et quand la belle se fâche, elle prouve, si besoin était, qu’elle excelle aussi dans l’air de fureur. On songe à (Dalinda) « Neghittosi, or voi che fate », très convaincant.

Ce qu’on aura préféré ? Les beaux duos ! L’entrelacs des voix de la soprano et du ténor se fait particulièrement lumineux, rayonnant dans ces duos des plus beaux opéras de [**Händel*]. On retient encore le duo de Tamerlano, « Vivo in te », un air qui met en lumière la tonalité singulière de cette pièce où les deux amoureux se retrouvent et se parlent d’amour. [**Tim Mead*] possède une magnifique voix très chaude de contre-ténor, qui peut aussi envoyer « facilement » des aigus incroyables. Une grande tessiture, de la virtuosité, une grande sensibilité, tout est réuni chez ces deux interprètes et on n’ a pas de doute sur leur plaisir de chanter ensemble. Lors de cette soirée pleine de tumultes et forte en émotions, leur connivence faisait plaisir à voir.

On vit avec eux leurs passions. Les deux héros se retrouvent dans des situations souvent tragiques. Nous partageons ces moments, avec ces grands airs de désespoirs, notamment avec l’amoureuse Alcina, qui, bien que magicienne, ne parvient tout de même pas à se faire aimer (excepté de nous !). On se souviendra longtemps de la scène de folie d’Orlando interprété par le contre-ténor. Plus qu’un exercice de style, le chanteur nous émeut par sa capacité à jouer ce rôle notamment par d’étonnantes inflexions de voix. On se souvient que ces chants à l’époque étaient prévus pour être interprétés par des Castrats, car seule « la voix des anges » semblait capable de couvrir un registre aussi large, sans perdre de sa subtilité ni de sa puissance. Fort heureusement, les contre-ténors sont tout aussi captivants dans l’interprétation de ces rôles. Courtisées, magnifiées par des archets et des vents excellents, les voix se libèrent, se déploient, pleurent, se perchent haut, si haut qu’elles tutoient les étoiles ! Chic, on nous offre en bis des duos. Les amants se fâchent, « mais comme on ne peut pas en rester là, on va les réunir de nouveau », dira Emmanuelle Haim. De tendres et émouvantes retrouvailles avec Giulio Cesare, dont le sublime air nous trottera longtemps dans la tête. |right>

Des instruments anciens, des voix superbes, des passions amoureuses, et le génie de Haendel, on était bien à Aix ce mardi soir.

[**Pétra Wauters*]|right>


Illustrations de l’article: photos Caroline Doutre


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Contact : redaction@wukali.com

WUKALI Article mis en ligne le 17/04/2019

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