Le vent qui pousse les colonnes de feuilles mortes

Octobre, quand la vendange est faite dans le sang

Le vois-tu avec ses fumées, ses feux, qui emporte

Le Massacre des Innocents

Olécio partenaire de Wukali

Dans la neige du monde, dans l’hiver blanc, il porte

Des taches rouges où la colère s’élargit ;

Eustache de Saint-Pierre tendait les clefs des portes

Cinquante fils la mort les prit,

Cinquante qui chantaient dans l’échoppe et sur la plaine,

Cinquante sans méfaits, ils étaient fils de chez nous,

Cinquante aux regards plus droits dans les yeux de la haine

S’affaissèrent sur les genoux

Cinquante autres encore, notre Loire sanglante

Et Bordeaux pleure, et la France est droite dans son deuil.

Le ciel est vert, ses enfants criblés qui toujours chantent

Le Dieu des Justes les accueille

Ils ressusciteront vêtus de feu dans nos écoles

Arrachés aux bras de leurs enfants ils entendront

Avec la guerre, l’exil et la fausse parole

D’autres enfants dire leurs noms

Alors ils renaîtront à la fin de ce calvaire

Malgré l’Octobre vert qui vit cent corps se plier

Aux côtés de la Jeanne au visage de fer

Née de leur sang de fusillés


Pierre SEGHERS. (1906-1987)

1941 (repris dans La Résistance et ses Poètes. France 1940-1945, 1975)

Ces articles peuvent aussi vous intéresser