The eternal French debate between conservatives and liberals, left & right.


Les Montaigu et les Capulet, Roméo et Juliette, Gog et Magog, «Le Zéro et l’Infini,» cher à Arthur Koestler, «Le Diable et le Bon Dieu» de Jean-Paul Sartre, Gauche et Droite, de même Lagarde et Michard ou Roux et Combaluzier, nos repères intellectuels et de mémoire innombrables fonctionnent aisément dans le registre pair. Pur moyen mnémotechnique ou suprême classification, fruits d’un processus analytique poussé à son extrême, phénomènes matriciels, énergétiques, génétiques, neurosciences appliquées ou indigence intellectuelle portée par un cerveau reptilien ? Et en politique de quel ressort ce système dual relève-t-il ? Suite logique d’une histoire féconde ou commodité tactique de prise de pouvoir ?

Francis Benoît Cousté que nous avons déjà lu dans Wukali dans des tribunes* sur l’art et la musique se penche avec gourmandise, dans notre rubrique Agora consacrée rappelons-le au débat, à l’étude et à la réflexion, sur cette dichotomie entre gauche et droite, fruit juteux de nos batailles rhétoriques et politiques que nous avons élevé au rang de spécificité bien française. Faut-il s’en flatter, ou faut-il au contraire le porter aux gémonies, tel est bien le sens du débat dont nous sentons le frémissement et qui ne manquera pas d’être enrichi

P-A L

Olécio partenaire de Wukali

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« Être de droite ou de gauche, c’est être hémiplégique »…

Qui ne connaît cette formule – que se seront successivement attribuée un Raymond Aron (homme de droite), puis un André Glucksmann (gauchiste rallié au sarkozysme) ? Mais qu’en réalité, nous devons au philosophe espagnol José Ortega y Gasset (La révolte des masses, 1929)…

Je lisais naguère, dans Le Monde, la déclaration d’un éminent philosophe, selon lequel la bipolarisation Droite/Gauche ne serait que manichéisme travesti. Ce n’est pas mon avis : je ne pense pas qu’entre la Gauche & la Droite, ce soit le Diable & le Bon Dieu, le Noir & le Blanc, le Bien & le Mal… La réalité est autrement complexe – la réaction n’étant pas toujours le fait de la Droite, ni le progressisme celui de la Gauche.

Mais d’où vient ce dualisme ? Je soutiendrai, quant à moi, que le binaire nous est naturel, inné. Alors que le ternaire ressortit au domaine du culturel, de l’acquis…

Partons du plus élémentaire, pour constater la bipartition de la plupart de nos organes : hémisphères droit & gauche du cerveau, deux yeux, deux narines, deux oreilles… aussi bien que de nos membres – à la notable exception de celui derrière lequel nous marchons, messieurs ! Sans oublier le couple masculin/féminin, généralement source d’équilibre et d’harmonie. Bien qu’un certain Platon ait pu considérer l’androgynie comme première…

Le binaire d’opposition ne nous est pas moins naturel. Ainsi des grands archétypes que sont : le haut & le bas, le chaud & le froid, le sec & l’humide, la lumière & les ténèbres, etc. Il en va de même pour les grands concepts philosophiques : le bien & le mal, le positif & le négatif, le concret & l’abstrait, le conscient & l’inconscient, le signifiant & le signifié… Là aussi, la liste serait interminable.
[Souvenons-nous toutefois que notre pensée occidentale s’est développée autour des trois binaires que sont : le Bien & le Mal, le Vrai & le Faux, le Beau & le Laid.]

Nombre de symboles ne sont-ils pas, eux mêmes, géminés ? Le pain & le vin, la faucille & le marteau, l’ange & le démon… et jusqu’au loup & l’agneau – soit la proie & son prédateur. Grâces soient ici rendues aux éminents fabulistes que furent Ésope, La Fontaine et Karl Marx

[Notons, au passage, qu’il n’est pas de langue plus universelle que celle des symboles – bien plus universelle, au demeurant, que l’espéranto, le volapük ou le globish.]

Mais « Jamais deux sans trois », dit-on. Et d’arguer que la plupart des religions sont trinitaires : la chrétienne, bien sûr, mais aussi [sous réserve d’inventaire] l’égyptienne, l’indienne, l’hindouiste, la bouddhiste, la juive…

Quant à nous, hommes et femmes de bonne volonté, notre ambition première n’est-elle pas – entre Charybde et Scylla – de tracer de nouvelles voies ?

Sans, pour autant, nous imaginer que les futures générations accéderont d’emblée au ternaire. Non ! Le binaire restera toujours premier, car il est l’expression de la jeunesse, de l’élan vital, de l’Éros (comme eût dit le bon Siegmund).

C’est pourquoi les jeunes gens sont si ordinairement arrogants, extrémistes, manichéens, qualifiant la 3e voie, non de raisonnable, sage ou modérée, mais de triste, fade ou mollassonne – moyens termes entre le Nul & le Génial…

[Citons ici Renaud Camus (je dis bien Renaud) : « Accorder aux opinions de la jeunesse tout le respect qu’il faudrait leur porter, ce n’est pas toujours facile. Elles sont prévisibles, nous sommes tous passés par elles, nous pouvons difficilement les percevoir autrement que comme un moment tout à fait normal d’une évolution courante, une simple phase. Mais comment le dire ? »]

Cela dit, tout système éducatif ne devrait-il pas viser au ternaire, à une pédagogie de la complexité – versus la démagogie de la simplicité ? Or, cet aspect initiatique n’a cessé de reculer depuis le siècle des Lumières. L’enseignement n’est plus, aujourd’hui, que transmission de savoirs utilitaires – et non plus formation de l’esprit…

Que propose-t-on à notre jeunesse ? Sinon des outils d’asservissement à leurs futures fonctions… Aussi la plupart de nos contemporains n’ont-ils plus d’idées que de leur profession. Et où cultive-t-on encore l’aptitude à « être » ? Si ce n’est dans quelques ghettos ou cercles de réflexion, tel que le nôtre…

Plutôt que d’Aristote qui prônait le Tiers-exclus, inspirons-nous du Taoïsme qui prône – quant à lui – le Tiers-inclus. Symbolisé par le diagramme du Yin & du Yang : cercle divisé, par une ligne sinueuse, en deux parties égales – la partie noire comportant un point blanc, et la blanche un point noir… Sans, pour autant, faire nôtre cet idéal de « fadeur » que la pensée chinoise aura cultivé durant des millénaires – fadeur jugée seule capable de contrer l’arrogante radicalité du chiffre « Deux »…

Plus près de nous, c’est le très catholique Georges Bernanos (1888-1948) qui distinguait deux sortes d’imbéciles : les optimistes (heureux, forcément heureux) & les pessimistes (forcément malheureux).

[N’hésitant pas à classer tous les intellectuels (dont lui-même) parmi ces « imbéciles ». Catégorie réunissant, selon lui, tous les manieurs de concepts – idéologues & théoriciens, vivant loin des réalités. Seuls, trouvaient grâce à ses yeux les créateurs – les artistes, notamment.]

Cependant que l’agnostique Romain Rolland (1866-1944) parlait, quant à lui, de pessimisme de l’intelligence & d’optimisme de la volonté. Formule reprise par le marxiste Antonio Gramsci (1891-1937), lequel préconisait l’alliance de ces deux facultés. À la plus grande gloire – bien sûr ! – du matérialisme dialectique…

Essayons maintenant – sans esprit polémique – de définir les qualités respectives de la Droite et de la Gauche.

Malraux disait qu’« il est deux manières d’être un homme : la première étant de cultiver la différence, la seconde d’approfondir la communion » [Volonté de se différencier : ambition de la Droite. Idéal d’union : ambition de la Gauche].
Il est toutefois remarquable que la conjonction de ces deux attitudes définisse notre idéal. Cultiver la différence, n’est-ce pas le socratique : « Connais-toi, toi-même » ? Et approfondir la communion, n’est-ce pas viser à l’égrégore ?

La Gauche se réfère volontiers aux valeurs de générosité et de justice qui furent celles des Lumières. Cependant que la Droite se veut héritière de la Chevalerie du Moyen Âge, de ces valeurs personnalistes que sont le courage, le goût de la compétition et le sens du destin individuel, pour ne pas dire de la prédestination – qu’elle soit d’essence divine ou nietzschéenne.

Si la Droite met volontiers l’accent sur le Destin de la France et la Gauche sur celui de l’Humanité, il ne s’agit là, bien sûr, que de dominantes – la Droite n’ayant pas plus le monopole du patriotisme que la Gauche celui du cœur [pour reprendre une formule célèbre]…

J’ai cependant la conviction qu’entre Droite et Gauche républicaines existe un large consensus. Sur les objectifs, sinon sur les moyens… Oserai-je une formule : « La Gauche, c’est l’intérêt de tous ; la Droite, celui de chacun ».

Un certain dissensus demeure toutefois souhaitable, car il nourrit le débat démocratique. Clivage que de bons apôtres – Raminagrobis toujours aux aguets – voudraient nous persuader qu’il est dépassé, obsolète !…
• Ainsi du fondateur des Éditions du Trident, Jean-Gilles Malliarakis, qui a créé un mouvement intitulé « 3e voie » – avec trident, bien sûr, pour emblème viril.
• Même déni chez les apôtres d’une « alliance des extrêmes » – tel que le rouge/brun Alain Soral (affilié à l’ultragauche, mais inconditionnel soutien du révisionniste Robert Faurisson).
• Même chose chez les skins, punks et autres néo-punks – furieux medley d’anarchisme & de néonazisme…
• Citons, enfin, le cas de ces champions de l’économie libérale qui – du haut des pistes de Davos – auront décrété que le clivage Gauche-Droite a désormais fait place au clivage Anciens-Modernes [les Anciens étant, bien entendu, ceux qui persistent à distinguer leur droite de leur gauche ; les Modernes étant les autres, ceux pour qui l’argent est politiquement neutre, n’a pas plus de couleur que d’odeur]…

Tous exemples confirmant le propos du philosophe Alain : « Celui qui récuse la distinction Droite-Gauche est toujours un homme de Droite ».

L’une des rares tentatives, non pas de dépasser ce clivage, mais d’être ailleurs (dans un « ailleurs » où cette dichotomie n’aurait plus eu de sens), aura été Mai 68. Les candides acteurs de « ce joli mois » ont cru au pouvoir de l’émotion, de l’effusion. Et auront vécu, quelques semaines, dans cette illusion lyrique qu’ils changeaient le vieux monde, qu’ils créaient un égrégore universel ! Thèse reprise, plus tard, par un Francis Fukuyama (dans son fameux essai La fin de l’histoire). On sait ce qu’il en advint !

Il arrive, hélas ! trop souvent, que la bipolarisation dérape vers un antagonisme aveugle, systématique, marqué au sceau de l’intolérance et de la mauvaise foi… Il ne s’agit là, bien sûr, que de perversions du débat démocratique.

Perversion lorsque, par exemple, une critique légitime dérape vers des accusations ad hominem (voire ad feminem), ou lorsque la souhaitable alternance est vécue comme une revanche – assortie de son funeste spoil system

Autre classique perversion : lorsque partis et syndicats – excluant (comme d’habitude) toute incertitude de leurs convictions – ne reconnaissent jamais, au grand jamais, s’être trompés, ou même laissés convaincre… Et, dès lors, bétonnent, verrouillent leurs positions, voire « flibustent », font de l’obstruction – au nom, bien sûr, du droit sacré à la liberté de parole.

[Brève parenthèse : pour déplorer que – tout au moins dans l’ordre philosophique – les Français soient si ordinairement réputés gens de « l’un ou l’autre ». Cependant que les Allemands seraient (nous dit-on) gens de « l’un et l’autre ».]

Il est une autre perversion – majeure celle-là – lorsque le pouvoir, à quelque bord qu’il appartienne, drape le « droit du plus fort » sous le beau nom de Liberté. Amalgamant, à plaisir, ultralibéralisme (i.e. loi de la jungle) et libertés individuelles… Vive donc le renard libre dans le poulailler libre ! Et de pieusement évoquer les mânes vénérables de Margaret Thatcher ou de Ronald Reagan

Nonobstant l’habileté d’une Marine Le Pen qui fait aujourd’hui sa chattemite [Ne manquez surtout pas de relire, à ce propos, Le chat, la belette et le petit lapin…], l’Extrême-Droite ne s’embarrasse guère – à l’ordinaire – de subterfuges ou de précautions oratoires : proclamant ouvertement son darwinisme social, réhabilitant le principe inégalitaire, tel que développé dans la sociobiologie d’un Edward O. Wilson, aujourd’hui professeur à Harvard, éminent spécialiste – nul ne s’en étonnera – de la société des fourmis.
Lequel prône un « Nouvel Ordre inégalitaire », fondé sur le libéralisme sauvage, l’idéologie sécuritaire et une saine xénophobie. Le tout entretenu par un discours apocalyptique qui trouve désormais – hélas ! un peu partout – le meilleur écho…

Il n’est pas moins regrettable que le terme d’« Égalitarisme » (néologisme forgé par l’Extrême-Droite pour disqualifier le principe républicain d’Égalité) connaisse, aujourd’hui, une telle faveur. Or, tout ne se vaut pas, bien sûr ! Tout ne peut être égal… Un hippopotame ne saurait danser «Le lac des cygnes», et le cannibalisme n’est pas un goût comme les autres.

Citons ici Yvan Blot, fondateur du Club de l’Horloge, pour lequel égalitarisme, nivellement par le bas et médiocratie seraient les seules valeurs de la Gauche.
Extrême-Droite qui ne désespère pas de remettre en cause – dans notre Code de la nationalité – le Droit du sol (Jus solis), au bénéfice du Droit du sang (Jus sanguinis). Tout au contraire d’une Mme Merkel III qui prône désormais – via la double nationalité – le retour au Jus solis…

[Petite parenthèse sémantique : On confond trop souvent Bipartisme (tel qu’il peut exister aux États-Unis ou en Angleterre) avec Bipolarité (regroupement de diverses sensibilités autour de deux pôles).

Quant à la Dyarchie (ou Cohabitation), elle n’aura jamais fonctionné, chez nous, que cahin-caha… Bien qu’une majorité de nos concitoyens – les sondages en témoignent – aspirent à la réconciliation, à la fin de cette malveillance mutuelle, de ce climat perpétuellement méphitique qui règne entre la Droite & la Gauche – plaie de notre système politique, et ce depuis l’Affaire Dreyfus.]

Une autre plaie de nos sociétés occidentales – celle-ci plus récente -, c’est le déclin des idéologies : plates-formes et programmes tendant à disparaître au profit du spectacle, du look, du « paraître à la télévision ».

Le plumage plutôt que le ramage ! À la conviction a succédé la séduction ! On en vient à la « non-idéologie » à l’américaine – sans projet de société, sinon économique. Tout en cultivant, bien sûr, les petites phrases, les formules assassines, les « fritages ». Et vive nos « conseillers en communication » ! Même s’il y a consensus sur le fond, il faut cultiver les apparences de la discorde, dramatiser, vitrifier les positions, créer le combat des chefs. La concurrence ne joue plus guère, désormais, entre idées ou programmes, mais entre présidentiables putatifs…

Certes, une part de politique-spectacle aura toujours été nécessaire, car l’absence de compétition démobilise l’électorat, générant « l’escapisme » (abstention galopante), phénomène que l’on observe en Suisse où – à échelle confédérale – l’absence d’antagonisme bipolaire entraîne un abstentionnisme record.

Dès lors qu’un parti ne s’adosse plus à un corpus idéologique, il n’est plus qu’outil de conquête personnelle du pouvoir. « Tout à l’égo », mon bon monsieur ! Alors que, jadis, les élites – à quelque bord qu’elles appartinssent – fondaient leur pouvoir sur la transcendance, elles ne la fondent plus que sur la performance – vertu équestre, s’il en est…

Aussi n’est-il que de voir tel ou tel de nos meilleurs énarques : évaluer, soupeser, supputer – au sortir de l’École – le parti qui lui assurera la plus brillante carrière. N’est-ce pas là mettre la charrue avant les bœufs : choisir d’abord un camp, pour en adopter ensuite les valeurs ? Quitte à bientôt tourner casaque – au nom, bien entendu, des grands principes…

Ne voit-on pas, de même, Gauche et Droite marauder désormais sur les terres centristes, voire extrémistes [partis attrape-tout, prêts à s’allier au plus offrant] ?

Aussi nos dirigeants sont-ils désormais conduits à ériger le pragmatisme, la realpolitik, en doctrine – sinon en dogme. Masque, ô combien propice à tous futurs reniements ! Avec, pour seule perspective, le ras des pâquerettes…

Certes, le pouvoir conduit inévitablement à composer avec les idéaux. Lorsque elle est « aux affaires », la gauche serait, nous dit-on, moins généreuse, visant à l’efficacité (ce que d’aucuns taxent de « dérive droitière »). Et la droite serait moins élitiste, plus débonnaire (on parle alors de « socialisme rampant »… Il est, en vérité, des suppositoires qu’il faut savoir… avaler !

Entre Droite & Gauche « républicaines », quels sont les probables consensus ?

• Sur les Droits de l’Homme, sans doute. Si ce n’est, je le crains, sur leur éventuelle restriction au bénéfice de la sécurité (contrôles d’identité, fouilles, vidéosurveillance, fiches d’hôtel, délation civique, etc.).

• Il y a, de même, un quasi-consensus sur la pérennité de nos institutions – quelles que soient les réserves émises, çà ou là, sur la durée du quinquennat ou l’excès de pouvoir aux mains d’un seul homme…

• Consensus également sur notre politique de défense & d’indépendance nationale – avec retour en force de la notion de Patrie : l’Internationalisme n’a plus, en effet, très bonne presse, même à gauche. [Notons, à ce propos, l’invraisemblable couple que forment désormais « Mondialisation des objets » (réels ou virtuels) et « Tribalisation des sujets » (repliement sur la cellule familiale).]

• Il semblait naguère admis que l’État jacobin avait fait son temps, qu’il fallait mettre fin à l’héliotropisme parisien… On en revient ! Et cela, suite à l’aberrante inflation du nombre d’entités administratives (régions, départements, arrondissements, cantons, communes) et, bien sûr, de leurs charges induites…

• Longtemps cheval de bataille de la Gauche, la notion d’État-Providence a du plomb dans l’aile. Chacun ayant pris conscience que la solidarité n’est pas l’assistanat – lequel déresponsabilise, trop souvent, les personnes secourues.

• Même unanimité pour applaudir à la restauration de la discipline à l’École. La formule : « Le pouvoir est au bout du bâton de craie » semble, enfin ! réunir tous les suffrages. Cela dit, le mammouth n’est guère agile, et craint toujours… la souris !

Il n’est plus guère de véritables dissensus, sinon…

• sur l’immigration – encore que les désaccords se situent davantage au niveau des principes que de la pratique [cf. l’actualité]… Comment pourrions-nous désormais confondre l’hôte (celui qui reçoit) avec l’hôte (celui qui est reçu) ?

• dissensus également sur nationalisations et privatisations. Mais ne s’agit-il pas, là aussi, d’une alternative plus symbolique que réelle ?

Il n’empêche : ce large consensus n’a pas encore induit de grand parti centriste… Sans vouloir plaider à tous crins pour un improbable Marais, il faut bien reconnaître que l’absence d’un Centre comme force politique organisée (tel que l’était naguère le Parti Radical) donne un rôle d’arbitre aux extrémistes…

Mais là, le terrain est miné ! Et le Béarnais que je suis – tout compatriote qu’il soit du grand François Bayrou – ne s’y hasardera pas davantage…

Quid d’une Troisième voie ?

Lorsqu’elle devient réflexe, une telle quête ne risque-t-elle pas de donner dans le prêchi-prêcha messianique [langue de coton, tout imbibée de miel et de fiel], de nous conforter dans l’illusion que nous détenons la vérité ? Induisant une inaltérable bonne conscience, fondée sur ce que j’appellerais un « paléoprogressisme de bonne compagnie »…

Non ! Demeurons hommes de l’interrogation… Car seul le doute est fécond (en un seul mot). Et s’il est un pari à faire, ce n’est pas celui de Pascal, mais bien un pari sur l’Homme. Sans jamais toutefois – sous peine de névrose – perdre contact avec le binaire, c’est-à-dire la nature. Un homme libre, en vérité, n’a-t-il pas toujours un pied dans le camp d’en face ?

Quant au thème de ce jour, je crois [dussé-je me répéter] à la nécessité d’une permanente bipolarité. Avec ses indispensables confluences… « Confluence », comme image mentale de deux rivières provenant de régions opposées, mêlant indissolublement leurs eaux… Image qui me paraît plus idoine que celle de « convergence » – laquelle vise un point unique, expression du statique, du définitif.

Il est temps de conclure

Répétons-le encore : une majorité de nos compatriotes aspire à une trêve entre forces politiques de droite et de gauche. Ils en ont plus qu’assez de ce régime de malveillance mutuelle, de ces perpétuels anathèmes qui, en réalité, tuent le dialogue – donc la démocratie… Et souhaitent que s’instaure une saine alternance, douce et non plus revancharde – seul moyen de faire pièce à ces extrémismes dont la menace se précise, hélas ! chaque jour davantage.

Écoutons, à ce propos, l’inquiétant faire-part du poète Jean-Pierre Faye

Cette lumière pourtant
n’en finit pas de mourir
derrière les arbres, où
se précise le métal

En traitant pareil sujet, j’aurai essayé de ne pas tenir un discours trivialement partisan – non plus que de maltraiter les mouches…

Mais, comme disait l’autre, si vous m’avez compris, c’est que je me serai, sans doute, mal exprimé…

Francis-Benoît Cousté


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