Paris Freed, Paris Photographed, Paris Exhibited


La chronique parisienne d’Elsa WEILLER et de Sébastien PRUDENT.


Comme nous l’ont rappelé les cérémonies de juin sur les plages de Normandie, la France, les USA et l’Europe célèbrent en 2014 les 70 ans du débarquement allié. L’exposition du musée Carnavalet « Paris libéré, Paris photographié, Paris exposé » poursuit ce travail de mémoire. Son originalité réside en partie dans sa genèse puisqu’en décembre 1944 le même musée Carnavalet avait déjà exposé une grande partie des photographies présentées aujourd’hui.

Olécio partenaire de Wukali

70 ans plus tard, la muséographie a changé, le contenu historique et politique s’est étoffé mais rien n’aurait pu voir le jour sans la lucidité du conservateur du musée de l’époque : François Boucher. Dès septembre 1944, cet homme chercha à réunir toutes les ressources documentaires « indispensables à l’historien de l’avenir » et les exposa en décembre de la même année.

En 2014, l’exposition se déploie sur plusieurs salles thématiques, retraçant chronologiquement les épisodes les plus marquants de la période 1940-1944 : arrivée des troupes allemandes dans Paris, occupation, mobilisation de la résistance pour la libération de la capitale et enfin arrivée de la 2ème DB et des troupes alliées.

L’exposition illustre le travail, en temps de guerre, de photographes aujourd’hui mondialement connus tels Doisneau, Cartier-Bresson, Séeberger… mais aussi de nombreux clichés d’anonymes qui ont marqué de leur empreinte une époque et la mémoire des générations suivantes. D’autres médias sont exploités et on découvre avec plaisir plusieurs vidéos d’archive françaises et américaines ainsi qu’une carte interactive de Paris. Cette dernière permet le visionnage de témoignages récents de protagonistes qui vécurent sous différents prismes ce moment unique que fut la libération de Paris. Cet événement historique a marqué les mémoires et c’est le généticien Axel Kahn qui, au travers d’un court exposé sur le fonctionnement de notre cerveau, nous en décrit le processus.

A présent, quelques mots sur la muséographie : l’exposition est dense, tant visuellement que conceptuellement (il faut compter environ 1h30 de visite), riche et didactique. Chaque élément présenté – photo ou vidéo – est succinctement commenté (avec traduction en anglais et en allemand), et chaque période illustrée est agrémentée d’un texte plus élaboré, présentant les enjeux exposés, et d’une citation les mettant en relief. Le parallèle avec l’exposition de 1944 est rappelé, tant dans les textes que dans les cartels, par un logo spécifique qui désigne les photos présentées lors de la première exposition.

Pour conclure, cette exposition, extrêmement bien documentée et mise en scène, procure un réel plaisir. Présentant un regard plus objectif et critique que son équivalente de 1944 (notamment sur la non représentation des femmes, des noirs, des étrangers sur les images de l’époque…), elle laisse place à la réflexion sur la place du photographe, qu’il soit anonyme, acteur ou témoin. Le point de vue qu’il laisse à voir oriente notre regard et notre perception d’un événement. Ce biais de sélection, illustré dans « Paris libéré, Paris photographié, Paris exposé », permet de réaliser, s’il le fallait, que la profusion d’images ne suffit pas à garantir l’objectivité du message et en conséquence à se forger une opinion juste. Dans une société où les médias sont rois, où l’information quasi-permanente tend à dessiner les opinions publiques et in fine les décisions politiques, cela laisse à penser.

C’est donc une exposition que l’on conseille sans réserve, à voir seul(e), en famille ou entre amis pour approfondir sa connaissance de l’histoire de Paris tout en se régalant les yeux !

Elsa Weiller et Sébastien Prudent.
bureau de Wukali à Paris


Discours du Général de Gaulle à l’Hôtel de Ville de Paris, 25 août 1944

«  Pourquoi voulez-vous que nous dissimulions l’émotion qui nous étreint tous, hommes et femmes, qui sommes ici, chez nous, dans Paris debout pour se libérer et qui a su le faire de ses mains.

Non ! nous ne dissimulerons pas cette émotion profonde et sacrée. Il y a là des minutes qui dépassent chacune de nos pauvres vies.

Paris ! Paris outragé ! Paris brisé ! Paris martyrisé ! mais Paris libéré ! libéré par lui-même, libéré par son peuple avec le concours des armées de la France, avec l’appui et le concours de la France tout entière, de la France qui se bat, de la seule France, de la vraie France, de la France éternelle.

Eh bien ! puisque l’ennemi qui tenait Paris a capitulé dans nos mains, la France rentre à Paris, chez elle. Elle y rentre sanglante, mais bien résolue. Elle y rentre, éclairée par l’immense leçon, mais plus certaine que jamais, de ses devoirs et de ses droits.

Je dis d’abord de ses devoirs, et je les résumerai tous en disant que, pour le moment, il s’agit de devoirs de guerre. L’ennemi chancelle mais il n’est pas encore battu. Il reste sur notre sol. Il ne suffira même pas que nous l’ayons, avec le concours de nos chers et admirables alliés, chassé de chez nous pour que nous nous tenions pour satisfaits après ce qui s’est passé. Nous voulons entrer sur son territoire comme il se doit, en vainqueurs. C’est pour cela que l’avant-garde française est entrée à Paris à coups de canon. C’est pour cela que la grande armée française d’Italie a débarqué dans le Midi ! et remonte rapidement la vallée du Rhône. C’est pour cela que nos braves et chères forces de l’intérieur vont s’armer d’armes modernes. C’est pour cette revanche, cette vengeance et cette justice, que nous continuerons de nous battre jusqu’au dernier jour, jusqu’au jour de la victoire totale et complète. Ce devoir de guerre, tous les hommes qui sont ici et tous ceux qui nous entendent en France savent qu’il exige l’unité nationale. Nous autres, qui aurons vécu les plus grandes heures de notre Histoire, nous n’avons pas à vouloir autre chose que de nous montrer, jusqu’à la fin, dignes de la France. Vive la France !

»


Musée Carnavalet

« Paris libéré, Paris photographié, Paris exposé » , du 11 juin 2014 au 8 février 2015,

16, rue des Francs-Bourgeois Paris 3e. Métro: St Paul, Hotel de ville

Ouvert du mardi au dimanche de 10h à 18h.
Dernière entrée à 17h30.
Fermé le lundi et les jours fériés.



WUKALI 27/07/2014


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