Philosophy in favor of Emmanuel Macron


Par Robert Redeker


C’est lors de son déplacement à l’[**usine Whirlpool d’Amiens*] qu[**’Emmanuel Macron*] a obtenu mon adhésion active à sa candidature.

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Jusqu’ici, depuis 2007, tous les déplacements de politiciens sur des sites de production livrés au déclin et menacés de disparition s’accompagnaient de promesses démagogiques méprisantes pour l’intelligence des ouvriers. D’effets d’estrade dignes d’orateurs de café du commerce. Bref, d’indignité. A Amiens, Macron a parlé à l’intelligence des ouvriers, non à leurs tripes ; à leur esprit, non à leur ventre ; à leur raison, non à leurs passions. Il a rompu avec le barnum bariolé et tapageur inventé par [**Sarkozy*], poursuivi par [**Montebourg*] et ses croissants distribués aux employés, et porté à sa triste perfection par[** Le Pen Marine*]. Du coup, une porte s’est ouverte : Macron pourrait être le président de la complexité, le président pédagogue qui essaie d’élever les citoyens à la compréhension de la polydimensionalité des difficultés et des défis, au lieu de les maintenir dans l’attente puérile du Père Noël. A Amiens, j’ai compris que l’attitude politique de Macron décalquait avec bonheur la politique des Lumières définie par[** Kant*] : sortir les gens de la minorité dans laquelle les démagogues de tout poil cherchent à la maintenir, s’adresser à eux en adultes majeurs capables de comprendre. Je précise le plus important : capables de dépasser leurs passions, leurs colères, leurs désespoirs, pour se hausser à un point de vue universel. Parfaitement kantien, malgré quelques envolées lyriques, Macron a traité ce jour-là ses auditeurs en adultes majeurs. Ce doit être un jour-référence, ce doit être un jour matriciel pour sa présidence.

La pensée – bien que ce mot soit très excessif – de [**Le Pen Marine*] fonctionne (comme d’ailleurs celle, plus élaborée, et plus intéressante, de [**Mélenchon*]), sur le modèle pré-rationnel de la pensée magique. Ces deux personnages publics se déguisent en sorciers : l’incantation bruyante, talentueuse et littéraire chez Mélenchon, et aussi vulgaire que vociférante, chez Le Pen Marine, est censée transformer sur le champ une situation difficile en réalité conforme au désir. Il est d’ailleurs curieux que la catholique autoproclamée admiratrice de[** Jeanne d’Arc*] se coule dans une pratique qui fut celle du paganisme et de ses superstitions.

Chez Whirlpool, Macron n’a pas cédé – au contraire de son adversaire – à la démagogie braillarde destinée à flatter la colère. La colère, dit [**Spinoza*], est une passion triste, et on ne fait rien de bon avec les passions tristes. On fait même le pire. Plus : pour Spinoza, l’exploitation des passions tristes caractérise la politique de la servitude (de l’âme). La promotion, par les médias, au cours de ces dernières semaines du thème de la colère est une des choses les plus inquiétantes qui pouvaient arriver à notre pays dans la mesure où elle légitime la colère comme passion politique. La colère, chacun le sait pourtant, est la pire des conseillères. On ne guérit pas les passions tristes en les arrosant d’autres passions tristes, comme aiment à faire les démagogues, comme fait Le Pen Marine, par les faux espoirs et les mensonges complaisants, on les guérit par la rationalité et la connaissance. On ne guérit pas de leur cécité les aveugles en leur crevant les yeux – c’est pourtant ce que fait avec acharnement celle qui s’affirme « candidate du peuple ».

Ce jour-là, chez Whirlpool, un homme d’Etat est né. Une mue s’est opérée : derrière le candidat est apparu ce que pourrait être Macron à l’Elysée, un président philosophe. Un président qui fait confiance dans ce que l’homme à de meilleur, qui s’adresse à cette meilleure part de l’homme, la raison.

[**Robert Redeker*]
Philosophe
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WUKALI 05/05/2017
Illustration de l’entête: capture d’écran

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