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Dessins d’anatomie de Léonard de Vinci, au Clos Lucé

par Communiqué musée

L’exposition, présentée au Clos Lucé près d’Amboise, plonge le visiteur au coeur des années de Léonard anatomiste et de l’émergence de nouvelles méthodes scientifiques comme la dissection. Trente ans d’une quête absolue afin de percer le mystère de la vie et de décrypter le corps humain dans sa mécanique, son mouvement, son fonctionnement organique.

Un parcours didactique et pluridisciplinaire mêlant livres d’époque, dessins originaux du XVIe siècle de disciples de Léonard, fac-similés, maquettes anatomiques, instruments de dissection, installations et vidéo 3D animées fait découvrir au visiteur l’anatomie du corps humain dans les pas de Léonard.

Léonard de Vinci, folios du codex de Windsor (fac-similé),

Des premières études concentrées sur l’anatomie superficielle et marquées par la lecture des travaux de Galien aux dissections de cadavres au tournant du XVIe siècle, les études anatomiques de Léonard de Vinci représentent l’une des plus importantes contributions à la science de l’anatomie de la Renaissance. Ces études devaient servir à un traité de l’anatomie que Léonard ne publia jamais. Par ce dévoilement du corps qui va de pair avec sa découverte des secrets de la nature et de l’univers, Léonard de Vinci se lance un défi sans fin.

Léonard de Vinci, folios du codex de Windsor (fac-similé
Cardio-vasculaire et principaux organes de la femme
© Château du Clos Lucé – Parc Leonardo da Vinci

Le visiteur parcourt l’exposition au gré des grandes thématiques de recherche de Léonard : analogie entre le microcosme du corps humain et le macrocosme du corps de la terre, proportions du corps humain, mécanique du corps (les os, les muscles et les tendons) apparentant ce dernier à une machine, logique des sens (notamment de la vision) et toutes les fonctions corporelles (digestion, respiration, circulation sanguine, reproduction). L’exposition se termine sur les rapports étroits entre les recherches anatomiques et l’oeuvre peint de Léonard.

Olécio partenaire de Wukali

Comment Léonard a-t-il pu reproduire le corps humain avec autant de précision ?

Convaincu de l’importance d’une approche quantitative pour percer les secrets du corps humain, Léonard a de lui-même élaboré une méthode originale de dissection procédant par couches ou par tranches ou encore par un regard tournant autour de l’objet (une méthode de sculpteur) avant d’opérer une synthèse.

Contrairement à l’opinion communément répandue, Léonard n’a pas réalisé ses dissections en secret, mais bien au coeur des hôpitaux et en complet accord avec les autorités politiques et religieuses, du moins jusqu’à ce que ses idées matérialistes entrent en contradiction avec les bulles pontificales notamment à propos de l’embryologie.

Et tout ce que tu feras pour ce côté de la main, tu le referas pour les trois autres, à savoir la partie intérieure ou palmaire, la partie dorsale et la partie des muscles extenseurs et fléchisseurs. Dans le chapitre sur la main, tu procèderas donc à trente démonstrations ; et il te faudra en faire autant pour chacun des membres. Ainsi, tu acquerras la connaissance complète.
Léonard de Vinci, extrait du codex de Windsor (RL 1906r)

Image scanner de la cage thoracique. © Hôtel-Dieu de Pont-l’Abbé

La méthode de dissection de Léonard est décryptée par un dialogue inédit entre ses dessins anatomiques et l’imagerie médicale d’aujourd’hui, révélant ainsi leur grande précision pour l’époque. Les vues de scanner ou d’IRM se confrontent aux célèbres planches de la collection Windsor et des codex Leicester et Huygens (fac-similés).

L’art de Léonard révèle une stylisation incomparable qui apporte la clarté nécessaire à ses illustrations didactiques. Il devient aisé de percevoir ses qualités de sculpteur dans les études issues de la dissection tridimensionnelle, notamment ses représentations du foetus, du crâne ou de l’épaule.

Pour aller plus loin dans la compréhension de la méthode de travail de Léonard, le parcours propose également une salle complète de dissection reconstituée qui ne devrait pas manquer de surprendre les jeunes visiteurs.

La dernière section se concentre sur le lien intime qui lie le regard du scientifique à celui de l’artiste lorsqu’exactitude anatomique rime avec beauté plastique. Cette étude assidue du vivant sert sa quête absolue dans la peinture : peindre les vibrations de la vie pour s’approcher du mystère de celle-ci.

Une vidéo réalisée par le Laboratoire de Traitement de l’Information Médicale de Brest montre les squelettes en 3D des apôtres de La Cène afin de mettre en lumière la position des corps. Chaque image respecte scrupuleusement l’attitude des personnages. Ainsi, le visiteur prend-il la mesure des connaissances en biomécanique de Léonard et de leur restitution dans son travail de peintre.

Modélisation en 3D de La Cène à partir de la version numérisée de Kiyoshi Bando
© Joël Savéan, Christian Lefèvre, François Gaucher

Léonard a choisi un contexte temporel particulier pour sa composition : le moment où Jésus vient de dire : « l’un d’entre vous va me livrer » (l’observateur peut même remarquer les lèvres encore entrouvertes de Jésus terminant son propos), d’où l’état de stupeur des 12 apôtres, chacun réagissant à sa manière, avec son émotion et sa gestuelle, ce qui explique une grande diversité d’attitudes spontanées.

Parmi les personnages de La Cène, Barthélemy, situé à l’extrémité gauche de l’oeuvre, offusqué se lève brutalement, avec une posture en avant permise par une contraction puissante du hauban postérieur, ce dont témoigne sa musculature bien visible. La contraction combinée des haubans antérieurs et postérieurs du cou est à l’origine d’un aspect de crispation figée bien visible sur le personnage de Judas, personnage sombre au physique ingrat (prognathe) qui, comprenant que Jésus parle de lui, réagit par un recul brutal.

Léonard de Vinci pousse son art à un stade ultime jusqu’à laisser paraitre de manière très visibles les émotions des apôtres dans leurs postures physiques.

En écho, une installation monumentale de l’artiste Ivana Gayitch, présentant une version de La Cène où seules demeurent les mains des apôtres et la table du repas, vient clôturer le parcours. Ces mains de cire prennent en charge la parole, l’émotion, et les non-dits des personnages. Chacune d’entre elles joue sa partition dans une mise en scène théâtralisée.

Ivana Gayitch est une artiste franco-serbe née en 1957 à Paris. Elle se forme à la sculpture auprès de Dino Quartana, suit les cours de dessin et de graphisme de l’école Estienne. Elle explore dans sa sculpture les matériaux traditionnels de son art comme la terre, la pierre, le plâtre. La cire dans La Cène est une nouvelle expérience.

Commissaires de l’exposition
Dominique Le Nen
Dominique Le Nen est professeur des Universités et chirurgien des Hôpitaux. Il est le cofondateur du SOS Mains au CHRU de Brest.

Pascal Brioist
Pascal Brioist est professeur d’Histoire moderne à l’Université de Tours et, depuis 1994, membre du Centre d’études supérieures de la Renaissance. Il travaille sur Léonard de Vinci depuis plus de vingt ans et conseille le château du Clos Lucé à Amboise.

Exposition Léonard de Vinci et l’anatomie, la mécanique de la vie
Château du Clos Lucé – Parc Leonardo da Vinci

2 rue du Clos Lucé – 37400 Amboise
Informations (cliquer)
du 9 juin au 17 septembre 2033

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