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Analyse des questions existentielles traitées par philosophes et scientifiques

par Bernard Taillardat

Ce sont sans doute les deux questions que se sont posés les hommes depuis qu’ils ont acquis la conscience. Depuis  des lustres ces questions les hantent et ils ont eu recours à des tas d’explications (dont peu sont cohérentes) eu égard aux moyens dont ils disposaient.

Le travail que j’entreprends pour WUKALI sera orienté plus sur le Comment que le Pourquoi, même si j’y fais quelques fois allusion.

Remontant aux premières découvertes de l’archéologie avec les premières inhumations, l’on comprend que la question de la vie et de la mort, avait saisi les hommes de ces époques, donc une tentative du Pourquoi. 

La quête du Comment se poursuivit, longtemps après, avec les Grecs de Grèce et les Grecs d’Alexandrie.

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C’est ainsi qu’en Grèce, au Vème siècle avant J.C, Démocrite s’était inquiété de la constitution de la matière, ainsi a-t-il été l’un des premiers à penser que la matière était constituée de particules microscopiques. On dit que l’idée lui en était venue en observant les marches des temples qui s’usaient, foulées à répétition par les fidèles qui les parcouraient. Il avait pensé que ces minuscules particules étaient fondamentales et ultimes, il les appela  atomes  ἄτομος (en grec le « a  » est privatif, et tomei veux dire couper), les atomes étaient donc insécables .

Il va falloir attendre près de 25 siècles pour démontrer que l’on pouvait aller au delà des atomes et qu’en fait ils ne constituent pas l’ultime stade de la nature! Bel exemple des progrès du Comment.

Le fait que la terre est un globe et non une surface plane était déjà connu des Grecs,  la circonférence en avait été calculée par un grec d’Alexandrie, Eratosthene (Ἐρατοσθένης ).

 Dès le deuxième siècle avant JC  par une observation très subtile, il connaissait la distance séparant Alexandrie de la ville de Syènne (aujourd’hui Assouan) dans le sud de l’Égypte. il attendit un jour midi à Assouan et midi à Alexandrie, quand les rayons du soleil arrivaient pile dans un puits assez profond, ce qui assurait la verticalité des rayons, à la même heure, à Alexandrie il mesurait  l’angle de l’ombre portée d’un obélisque, référence verticale, la valeur de cet angle entre 6 et 7 degrés et la distance entre les deux villes donnait facilement la circonférence de notre globe, et ceci à 400 km près de la valeur calculée aujourd’hui, voilà un autre bel exemple de la recherche du Comment!

Il va falloir attendre quelques siècles pour voir à nouveau progresser la recherche du Comment. Elle va se développer à partir de la Renaissance et c’est grâce à la lumière et au progrès accomplis dans la taille des lentilles optiques que des découvertes importantes seront faites.

Les lentilles, permettront d’explorer le microcosme et le macrocosme.

Copernic (1473-1543) fera la révolution qui porte son nom  en théorisant l’héliocentrisme par opposition au système compliqué de Ptolémée, qui voyait la terre comme centre du monde.

Galilée et sa lunette
Crédit : Christian Jégou/Observatoire de Paris/Découvertes Gallimard

 Cette théorie de l’héliocentrisme se verra confirmée par Galilée (1564-1642) grâce à son télescope. Ce même télescope qui venait des Pays-Bas et qu’il perfectionna. Il découvrira ainsi les satellites de Jupiter, ce qui lui fera comprendre que la Terre n’est pas le centre du monde. Au demeurant, l’on sait tous les ennuis que cette position lui attirèrent, car l’Eglise avait toujours suivi Ptolémée et il n’était pas question pour elle d’accepter un nouveau système qui chamboulait les Ecritures.

Son procès est demeuré célèbre et c’est seulement parce qu’il était un ami du Pape, que l’Inquisition ne le condamna seulement qu’à résidence. On se souvient tous du : « Et pourtant elle tourne ! « , citation sans doute apocryphe, mais ô combien célèbre !

Avec la Renaissance au XVIème siècle, apparaitra l’explosion de la méthode scientifique, éteinte depuis les Grecs. C’est dans tous les domaines que vont alors se développer des quantités de découvertes qui vont bouleverser la connaissance du monde.

Les connaissances (ou tout du moins ce que l’on croyait en connaître), étaient basées sur les traces qui subsistaient du passé, sans nulle mise en doute de leur contenu et la religion qui contrôlait la société d’alors en avait fait les bases de son credo! Ainsi l’on ne pouvait y toucher sans ébranler les fondements de la société.

Et nous serons sensibilisés quant à la manière dont ces évolutions de la connaissance se produiront, car c’est par la lumière que ces connaissances seront acquises, et c’est par l’optique (tant en direction du macroscosme que du microcosme) que nous commencerons à découvrir l’organisation du monde et de l’univers.

Succédant à Galilée, le plus grand savant du XVIIème siècle et sans doute un des plus grands savant tout court, il s’agit d’ Isaac Newton (1643-1727), qui excellait dans de nombreux domaines, mathématiques, physique, astronomie.

Outre l’amélioration du télescope qui porte son nom,  et la décomposition de la lumière blanche en ses constituants (l’arc en ciel) sa plus grande contribution est sans doute le découverte de la gravitation universelle.

Observons que les détracteurs des apprentissages du calcul et des mathématiques (tels certains de nos contemporains d’aujourd’hui, qui considèrent les savants de l’Antiquité comme de vieilles barbes et dont on continue bien sûr à enseigner leurs travaux et les théorèmes qui en découlent), devraient savoir que leurs équations n’ont absolument rien perdu de leur pertinence, mieux encore elles sont aujourd’hui utilisées pour calculer la trajectoire des fusées envoyées vers la Lune et placer tous les satellites en orbite.

C’est la découverte de la première des quatre forces qui régulent le monde, la gravitation. Vous la connaissez, c’est celle qui fait que vous tombez par terre…! Nous ferons  connaissance un peu plus loin avec les trois autres.

En ce siècle, des découvertes auront lieu en direction du plus en plus petit, ce que l’on nomme le réductionnisme, et ce encore grâce à l’optique. C’est ainsi que les premiers microscopes du hollandais Leuwenhoek (1632-1723) vont révéler les globules rouges et les paramécies, ouvrant la voie des sciences naturelles. 

Le XVIIIème siècle ne sera pas avare en savants et découvertes extraordinaires. Ainsi en chimie, Lavoisier découvre le rôle de l’oxygène et débute ainsi la chimie qui remplacera l’alchimie chargée de magie.

L’électricité, déjà en partie découverte par les Grecs, fait un grand retour au XVIIIéme siècle.

Le siècle suivant Maxwell (1831-1879) et Faraday (1791-1867)découvrent les principales lois qui régissent l’électromagnétisme, ouvrant la voie à toutes les applications qui en dériveront à la fin du XIXème siècle et surtout au XXème siècle.  C’est la deuxième force.

Les progrès seront également considérables dans les sciences de la vie avec Darwin (1809-1882) et la théorie de l’évolution et les débuts de la génétique avec Mendel (1822-1884) (vous vous souvenez peut-être des petits pois lisses et des pois ridés!), sans compter sur les sciences de la terre avec Wegener (1880-1930) et la dérive des continents au début du XXème.

Bref à la fin du XIXè et au début du XXè, l’on était a peu près persuadé que l’on avait fait le tour du Comment .

Albert Einstein. Princeton University
Photo: United Press/ Arthur Sasse. 1951

Patatras, voilà qu’un obscur personnage, occupé comme expert du bureau des brevets de Berne, Albert Einstein (1879-1955) va proposer la théorie de la Relativité restreinte en 1905, puis la Relativité générale en 1915,  qui vont bouleverser la physique et le monde. Pour faire court, le temps et l’espace sont liés et variables. Mais cela va surtout déboucher sur l’explication de la théorie de la constitution de l’atome et de son fonctionnement et c’est ainsi que vont être révélées, les deux dernières forces de la nature.

La force nucléaire faible qui est responsable de la radioactivité, que l’on retrouve dans la datation au carbone 14 et dans la transformation de l’uranium en plomb en 4 milliards d’années.

Et la quatrième force, la force nucléaire forte, nichée au coeur des atomes et qui s’exprime dans la fusion, responsable avec la gravité, de la fabrication des étoiles.

Mais cette gravité, bien qu’étant très faible par rapport aux trois autres, règne en maitresse sur l’univers.

Encore une fois on a l’impression qu’on comprend tout, il est vrai que l’on a beaucoup progressé dans la quête du  Comment, encore n’ai-je pas abordé la mécanique quantique qui se comporte bizarrement dans l’infiniment petit!

Je vais essayer de vous donner deux exemples qui nous semblent incompréhensibles.

A vouloir trancher sur la constitution de la lumière, onde ou particule?

Il s’agit en premier de l’expérience des Fentes de Young (1773-1829) .

On perce un plan de deux petits trous, on éclaire ce plan avec une source de lumière, de l’autre coté les faisceaux issus des deux trous produisent sur l’écran une figure d’interférence, c’est à dire une série de franges alternativement sombres et lumineuses, cela prouve le caractère ondulatoire de la lumière, mais lorsque au début du XXème siècle, on démontre  que la lumière est corpusculaire, l’expérience de Young est modifiée pour explorer le caractère double  de cette lumière.

La  source lumineuse, ce sont les photons, on a appris a les  faire passer un à un.

On détecte sur l’écran l’impacte des photons sur une plaque photographique, ceci révèle leur nature corpusculaire. Bien. Mais après un grand nombre de photons à travers les trous, la figure d’interférence réapparait, les photons ou leurs impacts reconstituent la figure des interférences!!!! Ainsi, un par un ils se comportent en particule, mais en groupe, ils se comportent comme des ondes ! Ce faisant ces résultats confirment la dualité corpusculaire et ondulatoire de la lumière, cette dualité, onde et  particule que la physique est incapable  de décrire totalement ! Ces résultats ne sont pas limités aux photons mais à toutes les manifestations dites  » particules. »

Cette dualité va être formalisée par le physicien français Louis de Broglie (1892-1987), qui obtiendra le prix Nobel de physique en 1924. Cette nouvelle physique quantique remplace alors la simple théorie des quanta pour décrire le microcosme! Cela n’a l’air de rien

mais c’est un bouleversement complet de la physique et du Comment !

Le deuxième exemple va encore chambouler les physiciens, surtout les relations entre Einstein et Bohr.

C’est le principe d’exclusion, formulé par Wolfgang Pauli (1900-1958) et le principe d’incertitude d’Heisenberg (1901-1973).

Conférence Solvay 1927. Jouez à reconnaître chacun de ces 29 participants dont 17 furent Prix Nobel. (photo colorisée)

Le principe d’incertitude d’Heisenberg explique que l’on ne peut pas connaître la position et la vitesse d’une particule en même temps, on ne peut connaître ces valeurs qu’exprimées par des probabilités. Ce qui veut dire que dans l’infiniment petit, le monde n’est pas déterministe mais probabiliste, alors qu’à notre échelle règne le déterminisme. Einstein n’y croyait pas, c’est là qu’il disait que Dieu ne joue pas aux dés. De nombreuses expériences prouvèrent qu’il avait tort, cette incertitude est fondamentale.

Mesurer la position, puis la vitesse ne donne pas le même résultat que mesurer la vitesse puis la position, cela s’appelle la non commutativité.

Là encore, une citation de Richard Feynman (1918-1988), presque l’égal d’Einstein, qui s’adressait à ses étudiants au sujet de la mécanique quantique:« si vous avez compris ce que je viens de dire ,c’est que je me suis mal exprimé! « 

Enfin un troisième exemple réside dans la vérification de la violation des inégalités de Bell, pour lequel A. Aspect vient de recevoir le prix Nobel de physique 2022.

Pour les plus curieux d’entre vous, je vous recommande de lire le chapitre de Wikipedia (cliquer) sur ce sujet assez complexe, mais qui semble prouver que la mécanique quantique domine le monde, mais elle est complètement contre intuitive.

Autre point, en astronomie, les galaxies tournent trop vite ! 

Quand on calcule leur masse globale, celle ci est trop faible pour les faire tourner au rythme que nous observons, ainsi il manque 95% de matière, d’où cette quête de la matière noire ou de l’énergie noire!

Donc, oui, il reste beaucoup a découvrir et  tout cela n’explique pas pourquoi nous sommes là, sur une petite planète, qui tourne autour d’une très banale étoile, perdue dans les deux cents milliards d’étoiles de notre Voie Lactée, elle-même au milieu de milliards d’autres galaxies…

L’amas d’étoiles globulaire Messier 4. En son centre se trouve un trou noir de taille intermédiaire. (Crédit photo : ESA/Hubble & NASA)

Enfin dernière remarque à méditer : Une homonymie troublante l’anthropie et l’entropie.

L’anthropie c’est la croyance que le développement de l’univers s’est effectué avec l’apparition de l’homme comme but , c’est évidemment une croyance et l’on constate que nous semblons être cet aboutissement ultime, mais sans doute temporaire, du Big Bang, c’est donc un déterminisme.

Quant à l’entropie c’est une des lois de la thermodynamique, la deuxième, et dit que toute énergie se dissipe et que c’est irréversible et que depuis le Big Bang l’énergie n’a cessé de se dissiper et que la température résiduelle aujourd’hui est de -270° Kelvin, mesurée dans les annés 60 par Penzias et Wilson, ingénieurs de la sociéte Bell, confirmée par G Gamov (le zéro absolu est des -273° degré Kelvin).

Il  ne reste plus que 3° pour que l’univers s’éteigne, ce qui sera atteint dans un certain nombre de milliards d’années d’une manière asymptotique.

On peut donc penser que c’est l’Entropie qui l’emportera sur l’Anthropie!

Donc profitons du temps qu’il nous reste et continuons a explorer le Comment et le Pourquoi, qui comme l’Eldorado semblent nous fuir à mesure que nous croyons les saisir.

Dans tout cela, ou sommes nous? Le fil d’Ariane, c’est la Lumière. 

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