Too much too little


too fat

too thin

or nobody.

Olécio partenaire de Wukali

laughter or

tears


haters

lovers


strangers with faces like

the backs of

thumb tacks


armies running through

streets of blood

waving winebottles

bayoneting and fucking

virgins.


an old guy in a cheap room

with a photograph of M. Monroe.


there is a loneliness in this world so great

that you can see it in the slow movement of

the hands of a clock


people so tired

mutilated

either by love or no love.


people just are not good to each other

one on one.


the rich are not good to the rich

the poor are not good to the poor.


we are afraid.


our educational system tells us

that we can all be

big-ass winners


it hasn’t told us

about the gutters

or the suicides.


or the terror of one person

aching in one place

alone


untouched

unspoken to


watering a plant.


people are not good to each other.

people are not good to each other.

people are not good to each other.


I suppose they never will be.

I don’t ask them to be.


but sometimes I think about

it.


the beads will swing

the clouds will cloud

and the killer will behead the child

like taking a bite out of an ice cream cone.


too much

too little


too fat

too thin

or nobody


more haters than lovers.


people are not good to each other.

perhaps if they were

our deaths would not be so sad.


meanwhile I look at young girls

stems

flowers of chance.


there must be a way.


surely there must be a way that we have not yet

though of.


who put this brain inside of me?


it cries

it demands

it says that there is a chance


it will not say

« no. »


Charles BUKOWSKI (1920-1994)


Traduction

L’Écrasement


trop grand

trop petit


trop gros

trop maigre

ou rien du tout.


rire ou

larmes


haineux

amoureux


des inconnus avec des gueules

passées

à la limaille de plomb


des soudards qui parcourent

des rues en ruines


qui agitent des bouteilles

et qui, baïonnette au canon, violent

des vierges


ou un vieux type dans une pièce misérable

avec une photographie de M.Monroe.


il y a dans ce monde une solitude si grande

que vous pouvez la prendre

à bras le corps.


des gens claqués

mutilés

aussi bien par l’amour que par son manque.


des gens qui justement ne s’aiment

pas les uns les autres

les uns sur les autres.


les riches n’aiment pas les riches

les pauvres n’aiment pas les pauvres.


nous crevons tous de peur.


notre système éducatif nous enseigne

que nous pouvons tous être

de gros cons de gagneurs.


mais il ne nous apprend rien

sur les caniveaux

ou les suicides.


ou la panique d’un individu

souffrant chez lui

seul


insensible

coupé de tout

avec plus personne pour lui parler


et qui prend soin d’une plante.


les gens ne s’aiment pas les uns les autres.

les gens ne s’aiment pas les uns les autres.

les gens ne s’aiment pas les uns les autres.


et je suppose que ça ne changera jamais

mais à la vérité je ne leur ai pas demandé


des fois j’y

songe.


le blé lèvera

un nuage chassera l’autre

et le tueur égorgera l’enfant

comme s’il mordait dans un ice cream.


trop grand

trop petit


trop gros

trop maigre

ou rien du tout.


davantage de haine que d’amour.


les gens ne s’aiment pas les uns les autres.

peut-être que, s’ils s’aimaient,

notre fin ne serait pas si triste ?


entre-temps je préfère regarder les jeunes

filles en fleurs

fleurs de chance.


il doit y avoir une solution.


sûrement il doit y avoir une solution à

laquelle nous n’avons pas encore songé.


pourquoi ai-je un cerveau ?


il pleure

il exige

il demande s’il y a une chance.


il ne veut pas s’entendre dire :

« non. »

***

Charles Bukowski (1920-1994) – L’amour est un chien de l’enfer (Love is a Dog from Hell, 1977) – Traduction Gérard Guéguan

Ces articles peuvent aussi vous intéresser