Balzac in love


Comme le fait remarquer Emmanuelle de Boysson, Balzac a dédié plus d’un tiers des romans qui composent La Comédie humaine à des femmes, car Balzac a aimé les femmes, leur a plu, s’est fait aimer d’elles. Pourtant physiquement il était loin d’être le sosie de Dom Juan, mais il avait un charme qui le rendait attirant. Si Balzac avait vécu à notre époque, il aurait sûrement fait une psychothérapie pour assumer les rapports qu’il eut avec sa mère, Laure, car celle-ci, le moins que l’on puisse dire n’avait pas une tendresse maternelle développée, l’inverse d’ « une mère poule ». Le petit Honoré fut confié dès sa naissance à des nourrices et très jeune placé en pensionnat à Vendôme sans avoir même la possibilité de revenir en famille durant les vacances. Et puis, il y a son petit frère Henri, choyé par cette « terrible » mère, qui est le fruit des amours adultérins que celle-ci a eus. Cette dernière en quelque sorte avait des circonstances atténuantes car son mari Bernard-François passait plus de temps dans le lit de ses maîtresses que dans le conjugal. Cependant Balzac avait deux de sœurs Laure et Laurence avec qui il a tissé des liens très profonds et dont l’échec de leurs mariages (surtout Laurence qui mourra jeune en couche) explique en grande partie le contenu de Physiologie du mariage, livre qui causa un grand scandale (et fit connaître son auteur) tant il développe des positions « féministes » à une époque où la femme avait autant de droits qu’un meuble.

Quoiqu’il en soit, Balzac aime les femmes, même si souvent c’est par intérêt : toute sa vie il rêve d’une femme idéale qui soit mère et maîtresse, libre et soumise, issue de préférence de l’aristocratie et très riche vu les dettes qu’il empile régulièrement. Il passe une grande partie de sa vie à chercher cette épouse idéale, et nous savons tous qu’il l’a trouvera en Éwelina Hanska riche polonaise qu’il épousera six mois avant sa mort.
Honoré de Balzac a « un cœur d’artichaut »: quand il tombe amoureux c’est pour la vie, c’est pour toujours. Sauf qu’il a un cœur immense et qu’il peut aimer, sincèrement, plusieurs femmes à la fois, d’où souvent des problèmes de jalousie qu’il doit gérer. Son premier amour, Laure de Berny a tout supporté, tout subi, s’est offerte totalement à lui et jusqu’à son décès restera toujours présente à ses côtés, quelque soient ses turpitudes. Et il y a eu Laure d’Abrantès, la veuve ruinée du maréchal Junot, dont Balzac servit de nègre pour la rédaction de ses mémoires, Henriette de Castries qui lui a fait l’affront de le manipuler comme un pantin sans jamais céder à ses avances, et tant d’autres.

C’est grâce à toutes ses femmes, mère et sœurs comprises, que Balzac est cet immense écrivain qui a su parfaitement décrire la nature féminine, ses aspirations, ses désirs, ses déceptions. Avec Flaubert, à mon avis de lecteur et non de lectrice, c’est celui qui a su aller le plus loin dans cette analyse.

Olécio partenaire de Wukali

Balzac a vécu « à cent à l’heure », incapable de gérer les problèmes matériels, toujours à la poursuite d’utopies irréalistes, mais adorant les apparences, faisant montre d’un immense égoïsme, continuellement à la recherche d’argent qu’il dépensait avant même de l’avoir touché, mais surtout l’auteur d’une immense œuvre qui est due en grande partie aux femmes qui ont croisé son chemin et qui l’ont sincèrement aimé pour l’homme, le génie, qu’il était

Émile Cougut


Emmanuelle de Boysson est journaliste à Version Femina. Elle est aussi auteur de livres à succès et de romans historiques dont une trilogie se déroulant dans le monde si mystérieux du XVIIème siècle où les femmes avaient aussi leur mot à dire.
Elle est présidente du prix de la Closerie des Lilas, qui récompense une romancière de langue française.

De juin à septembre 2016, exposition à la Maison de Balzac sur le thème : « Balzac et les artistes ».


Balzac Amoureux
Emmanuelle de Boysson

éditions Rabelais. 14€80


WUKALI 13/06/2016
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