Accueil Actualités Tremblement de terre Maroc, drame humain et séisme sur le patrimoine culturel

Tremblement de terre Maroc, drame humain et séisme sur le patrimoine culturel

par Pierre-Alain Lévy

Nous avons tous été sidérés quand la nouvelle est tombée. Le vendredi 8 septembre, peu après 23 heures, un tremblement de terre d’une magnitude de 6,8 a frappé la région du Haut Atlas au Maroc, faisant plus de 2 680 morts, plus de 2 500 blessés et au moins 300 000 sinistrés, tels sont les chiffres provisoires que nous avons collectés. Marrakech a été cruellement atteinte. Nous savons la douleur, le deuil, la tristesse et la peine, nous savons ce qu’un tel cataclysme naturel apporte comme misère humaine et quels sont les dégâts de toutes sortes qu’il provoque.

Ce tremblement de terre est le plus puissant à frapper le pays depuis 100 ans. Une réplique survenue dimanche a aggravé les dégâts et les victimes ont dû dormir dehors de peur que leurs maisons ne s’effondrent. De nombreuses personnes se sont rendues à Marrakech – à environ 45 Km de l’épicentre du tremblement de terre – pour recevoir un traitement médical. La catastrophe naturelle a également gravement endommagé une partie du patrimoine culturel de la ville.

Nous sommes allés chercher de l’information sur les phénomènes liés à la sismicité. Voilà ce qu’en dit l’Institut de Physique du Globe de Paris

On compare le tremblement ce tremblement de terre à celui d’Agadir en 1960, qui avait fait près de 15 000 morts. Les causes de leurs déclenchements sont-elles similaires ?

Robin Lacassin.- “Les deux séismes sont liés à la tectonique de la chaîne de montagnes du Haut Atlas. Même si ce n’est pas la même faille qui a rompu, les deux participent au même système qui est responsable de la croissance des reliefs du Haut Atlas. Par contre, il faut noter que le séisme d’Agadir avait une magnitude estimée à 5.8, donc un point de moins que celui de la nuit dernière. Ceci signifie trente fois moins d’énergie mise en jeu. Mais son épicentre était situé juste sous la ville et à très faible profondeur, ce qui explique les très importants dégâts”.

La magnitude d’un séisme n’est plus mesurée selon l’échelle de Richter, jugée obsolète par les scientifiques. Pouvez-vous expliquer pourquoi ?

Robin Lacassin.- “La magnitude de Richter, datant de 1935, est imprécise et non universelle (lors de sa création par Richter, elle était adaptée à la Californie). Pour les petits séismes on utilise encore une magnitude assez semblable, appelée magnitude locale (notée ML). Mais elle présente les mêmes défauts, et surtout n’est pas adaptée aux forts séismes car elle sature. Les sismologues utilisent plutôt la magnitude de moment qui mesure l’énergie libérée par le séisme. Celle-ci est directement reliée à la rupture sismique et au glissement qui s’est produit sur la faille lors du séisme. Cette magnitude est notée Mw. Le séisme de la nuit dernière a été estimé entre 6.8 et 6.9 en magnitude de moment”.

Le fracas du séisme sur le patrimoine culturel

Dans le centre médiéval de la ville de Marrakech, deux mosquées situées à proximité de la place  jemaa el fna que chacun connait – ont été gravement touchées. Le minaret de la petite mosquée Kharbouch s’est effondré, et une vidéo montre le minaret de la mosquée Koutoubia  الكتبية  voisine en train de trembler. Selon Eric Fact, directeur régional de l’UNESCO au Maroc, cette mosquée a subi «d’importantes fissures».

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«Le minaret de la Koutoubia présente des fissures importantes ; de nombreuses maisons de l’ancien quartier juif du Mellah se sont effondrées ; les remparts de la vieille ville sont eux aussi touchés en de multiples endroits» comme le précise un communiqué de l’UNESCO qui ajoute: «Dans la province de Ouarzazate, le Ksar Aït Ben Haddou, inscrit depuis 1987 sur la Liste du patrimoine mondial, compte plusieurs bâtiments fissurés. Le grenier collectif qui surplombe le village est sérieusement endommagé. La catastrophe risque aussi d’avoir un impact notable sur l’économie créative, domaine dans lequel le pays est particulièrement engagé, ainsi que sur des traditions et savoir-faire constituant le patrimoine immatériel».

La situation dans le domaine de l’éducation est également préoccupante. Le séisme a impacté une zone particulièrement rurale et enclavée, englobant un bassin de population scolaire d’environ un million d’élèves inscrits et un corps enseignant de plus de 42 000 professionnels. Selon un premier bilan dressé par les autorités marocaines, au moins sept enseignants ont péri lors de la catastrophe et plus d’un demi-millier d’établissements scolaires et une cinquantaine d’internats sont endommagés. Dans les provinces d’Al Haouz, de Chichaoua et de Taroudant, une quarantaine de communes sont contraintes de suspendre temporairement les cours.

Mosqée de Tinmel après le séisme. (Capture d’écran)

Dans les montagnes proches de l’épicentre du séisme, la mosquée de Tinmel, datant du XIIe siècle, semble avoir été presque entièrement détruite, selon des photos diffusées sur Twitter. L’église a été construite au XIIe siècle par le chef de l’empire almohade.

Mosquée de Tinmel avant le séisme (Photo Flickr)

La mosquée de Tinmel a été édifiée dans la région du Haut-Atlas à la mémoire de Mehdi Ibn Toumert fondateur de la dynastie Almohade (XIIème siècle), un réformateur berbère chieuh musulman). Cette mosquée a été construite selon un procédé Andalou Maghrébin qui allie le raffinement de la tradition architecturale et les techniques de construction locale.

Marrakech مُرَاكُش est la destination touristique la plus populaire du Maroc et sa Médina est une destination très fréquentée. Au-delà de la place Jemaa el-Fna, de nombreux sites populaires, tels que la citadelle fortifiée de la Kasbah, le palais Badiâ du XVIe siècle et la Medersa Ben Youssef  مدرسة ابن يوسف, une école islamique construite dans les années 1300, ont été largement épargnés. Selon les informations recueillies sur place, certaines excursions ont été annulées, mais d’autres voyageurs ont décidé de rester. D’autres zones touristiques très fréquentées du Maroc, telles que les villes de Fès et de Casablanca, n’ont pas subi de dégâts.

Illustration de l’entête : Mosquée Moulay Brahim, Marrakech. Photo Instagram/ Mosa’ab Elshamy

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